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Les prélèvements obligatoires baissent mais l'écart reste important avec l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne

Pour financer les mesures annoncées à l'issue du grand débat, l'exécutif va supprimer certaines niches fiscales.

Pour financer les mesures annoncées à l'issue du grand débat, l'exécutif va supprimer certaines niches fiscales. - JOËL SAGET / AFP

Selon une étude de Rexecode, si la réforme de la fiscalité du capital des ménages de 2018 a rapproché la France des standards européens, elle n’a pas réduit de façon importante l’écart du poids de la fiscalité entre la France et les grands pays voisins.

Le poids des prélèvements obligatoires est souvent pointé du doigt en France et force est de constater que la tendance demeure à la hausse depuis près d'un quart de siècle, selon la dernière étude de Rexecode sur la question publiée mardi.

Ainsi, au cours de la période 1995-2018, le taux de prélèvement global a augmenté en France de 42% du PIB en 1995 à 46,5% en 2018, soit une progression de 4,5 points de PIB. Des résultats toujours bien supérieurs à ceux observés chez nos voisins européens: 39,4% en Allemagne, 42,2% en Italie, 33,9% en Espagne et 40,3% en moyenne de la zone euro.

Evolution des prélèvements obligatoires
Evolution des prélèvements obligatoires © Rexecode

Il faut dire qu'au cours de la période 1995-2017, les impôts liés au capital des ménages sous toutes leurs formes (hors impôt sur le revenu et cotisations sociales des travailleurs indépendants) ont augmenté de 2,5 points de PIB à 4,7%, soit un accroissement du taux de prélèvement de 80%.

L'écart se réduit un peu avec la zone euro

Pour Rexecode, "le poids global de la fiscalité du capital des ménages, tous impôts liés au capital confondus, n’a au total pas diminué après la réforme de 2018, et il reste sensiblement supérieur à la moyenne des pays de la zone euro, très supérieur par exemple à son niveau en Allemagne". 

Néanmoins, l’écart entre la France et la zone euro, de 6,2 points en 2017, s’est réduit à 5,9 points en 2018. "La réforme de la fiscalité du capital des ménages de 2018 a rapproché la règle fiscale de la France des standards européens, ce qui constitue un progrès dans l’harmonisation, mais elle n’a pas réduit l’écart du poids de la fiscalité entre la France et les grands pays voisins, écart qui reste très élevé", tranche le cabinet d'études. 

Moins d'expatriations fiscales

Un poids qui inciterait les plus fortunés à s'expatrier. "Le cumul, actualisé en euros actuels, depuis la création de l’impôt sur la fortune, des patrimoines appartenant à des personnes soumises à l’ISF ayant relocalisé leur domicile fiscal à l’étranger, avait été estimé à plus de 200 milliards d’euros", rappelle Rexecode qui estime qu'entre la période 2009-2012 et la période 2013-2016, le flux de départs de redevables de l’ISF, net des retours, s’est accru de 63%, passant de 380 départs nets annuels en moyenne à 620 départs nets par an.

La réforme de l'ISF voulue par la gouvernement a justement tenté de stopper cette hémorragie. Avec quels résultats ? "Sur la base des dernières données rendues publiques, il apparaît que le nombre de départs à l’étranger a culminé en 2014 (915 départs de redevables de l’ISF) avant une décrue qui a divisé le flux des départs à l’étranger par plus de 2 en 2017, année de l’annonce de la transformation de l’ISF en IFI (impôt sur la fortune immobilière, NDLR). La perspective des élections de 2017 n’est pas étrangère à une amorce de cette décrue dès 2016", peut-on lire.

Le poids considérable des impôts de production

Du côté des entreprises, ce sont bien les impôts de production qui pèsent le plus. Le total de la ponction représentait en 2017 un poids de 9,1% de la valeur ajoutée des sociétés non financières en France, contre 3,2% en Allemagne. L’écart constitue une surcharge de plus de 60 milliards d’euros sur les entreprises industrielles et commerciales françaises. Conclusion sans appel: "le poids des impôts de production n’a pas diminué en 2018 en France. L’écart avec l’Allemagne ne s’est pas réduit".

Rappelons que le gouvernement a promis de s'attaquer à ces impôts. "Il est très clair qu'il faut être capable de baisser ces impôts de production. L'Etat a des leviers. Je pense qu'on est capable de proposer une trajectoire comme on l'a fait avec l'impôt sur les sociétés. (...) Là on est sur un pacte productif 2025, je pense qu'il faut donner une trajectoire à 2025 et qui ne soit pas 2 milliards d'euros mais qui soit une somme importante. (...). Si c'est pas à deux chiffres, on est pas dans l'épure, on a compris, c'est très clair", a ainsi expliqué récemment sur BFM Business, Agnès Pannier-Runacher, la secrétaire d'Etat auprès du ministère de l'Economie.

"Le point essentiel est l’écart structurel de 1 à 3 environ, entre le poids des impôts de production en Allemagne et en France. On peut donner une idée de ce que représente cet écart en milliards d’euros. Si on appliquait le ratio allemand (3,2 %) à la valeur ajoutée des sociétés non financières françaises, il faudrait diminuer les impôts de production en France de 5,9 points de valeur ajoutée, c’est-à-dire de 60 milliards d’euros, l’équivalent de trois fois le CICE", évalue Rexecode.

Olivier Chicheportiche