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Macron va lancer la campagne européenne

Emmanuel Macron.

Emmanuel Macron. - GONZALO FUENTES / POOL / AFP

L'Elysée prévoit une intervention mardi, sans doute dans la presse européenne

Emmanuel Macron va s'exprimer sur l'Europe au début de la semaine prochaine, pour ce qui sera « sa prise de parole la plus forte » sur ce thème depuis plus d'un an, a-t-on appris samedi dans l'entourage du président. « Le moment européen que l'on traverse justifie cette expression, qui se veut un signal d'alerte » car « l'Europe est en danger », a expliqué cette source à l’AFP, en citant en particulier le Brexit. L'intervention du chef de l'Etat s'inscrira « dans la continuité du discours de la Sorbonne » à la rentrée 2017, « sous une forme différente ».

Le discours de la Sorbonne, plaidant entre autre pour un renforcement de la coordination économique en zone Euro, mais aussi l'idée d'une Europe à plusieurs vitesses, avec des coopérations renforcées entre certains de ses membres, avait en effet été salué par certains experts mais n’avait eu aucun retentissement dans l’opinion. « Les choses sont encore en train d'être calées sur la forme », selon cette source, qui n'a pas confirmé des informations de presse selon lesquelles le chef de l'État publierait une tribune dans plusieurs quotidiens européens.

Macron isolé en Europe

La donne a radicalement changé sur le front européen depuis lors. Certes les Européens font preuve de cohésion sur le Brexit, mais pour le reste les positions semblent irréconciliables entre les français qui plaident pour une coopération budgétaire accrue, et un certain nombre de pays européens, emmenés par les Pays Bas de Mark Rutte, qui exigent de la France qu’elle commence par respecter les traités. Or les finances publiques françaises recommencent à déraper et leur trajectoire n’est absolument pas conforme aux engagements signés. Cette tension avec les Pays-Bas s’est d’ailleurs exacerbée autour de l’affaire Air France, même si les deux pays tentent de calmer le jeu ces dernières heures.

C’est en juin dernier, devant le parlement de Strasbourg, que le premier ministre Néerlandais avait envoyé une très claire fin de non-recevoir au président français : « la promesse de base de l’euro, c’était que nous pourrions tous jouir d’une plus grande prospérité mais pas d’une redistribution de la prospérité, si les 19 pays de la zone euro mettaient leurs budgets et leurs dettes publiques en ordre, ce serait suffisant en matière de stabilisation. Ça aussi, c’est un accord qui existe, au titre du pacte de stabilité et de croissance ». Quant à l’idée d’un budget européen : « n’oublions pas que des centaines de milliards d’euros sont déjà disponibles dans le budget européen afin de soutenir les réformes structurelles à l’échelon national, nous ne pouvons pas faire face au XXIe siècle avec un budget qui reflète les réalités des dernières décennies. Actuellement, l’agriculture et les fonds structurels engloutissent jusqu’à 70 % du budget. Dépenser moins dans ces domaines permettra d’avoir des fonds pour les nouvelles priorités », propos en contradiction totale avec les revendications de la France, qui réclame le maintien des aides agricoles dans les prochaines perspectives pluriannuelles.

Tension réelle aussi avec l’Italie, Matteo Salvini faisant d’Emmanuel Macron le symbole de l’Europe qu’il rejette, cette fois-ci sur le contrôle des flux migratoire, La chaîne publique italienne RAI Uno diffusera par ailleurs dimanche soir une interview d'Emmanuel Macron, selon les informations du Figaro, le chef de l'État envisage également de recevoir « très bientôt » Sergio Mattarella, son homologue italien, à Paris. Une manière de s'inscrire encore un peu plus dans l'affrontement qu'il veut instaurer avec les « populistes » notamment emmenés par Matteo Salvini.

Reste les relations avec l’Allemagne, mais elles semblent au point mort : certes, le 22 janvier, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont signé un nouveau traité franco-allemand et le Président de la république avait ainsi réaffirmé haut et fort, face à l'opposition de l'extrême gauche et de l'extrême droite, sa volonté de faire converger les politiques française et allemande dans tous les domaines, de l'économie à la défense en passant par l'éducation, la recherche ou la politique étrangère. Mais rien n’indique que la volonté soit la même à Berlin, où l’on se contente d’approuver poliment. L’Allemagne semble aujourd’hui concentrée sur ses problèmes économiques et sur les relations commerciales avec les Etats-Unis. 

Le Brexit comme symbole

Dans ce cadre là, l'entourage d'Emmanuel Macron a souligné samedi le contexte du Brexit, « qui est l'illustration la plus concrète d'un rejet de l'Europe qui ne construit pas, qui met dans l'impasse ». La prise de parole attendue du président français devra dire, en réponse, « comment on reconstruit un projet, comment reprendre le contrôle de l'Europe et comment avoir une Europe qui protège », notamment sur le thème « des migrations, du climat, des menaces extérieures ». Dans sa toute dernière enquête d’opinion à trois mois de l’élection européenne, l’institut Elabe a effectivement identifié cette question migratoire comme le premier sujet dont les français voudraient que l’Europe s’empare. Une Europe qui globalement « ne fonctionne pas » : « 72% des Français déclarent ne pas en être satisfait (dont 50% pas vraiment satisfait et 22% pas du tout satisfait). A l’inverse, 28% des Français disent être satisfaits (mais seulement 2% très satisfaits et 26% assez satisfaits). Cette insatisfaction est partagée par une majorité au sein de l’ensemble des catégories de population, hormis les plus jeunes. Malgré un avis très partagé, les plus jeunes apparaissent les plus satisfaits du fonctionnement actuel de l’Union Européenne, comparativement aux autres tranches d’âge : 57% d’entre eux déclarent en être satisfaits contre 43% pas satisfaits » écrivait l’institut de sondage en milieu de semaine.

L'Europe qui protège

Cela fait plusieurs semaines que les équipes de l'Élysée travaillent dans le plus grand secret. À tel point que la consigne a été passée à l'ensemble du gouvernement de ne pas s'exprimer sur les questions européennes jusqu'au milieu de la semaine prochaine, l’intervention du chef de l’Etat étant à priori programmée pour mardi matin . Le principe directeur devrait en être une fois de plus « l’Europe qui protège », puis de la tête de liste LREM sera désignée début avril, les informations de presse semblent indiquer qu’Agnès Buzyn serait en ce moment la mieux placée, ce qui amènerait d’ailleurs un remaniement d’ampleur au sein du gouvernement.