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Les oubliés de la réformette des retraites : les régimes spéciaux

Retrouvez les coulisses de l'économie avec Jean-Marc Daniel à 7h50.

Retrouvez les coulisses de l'économie avec Jean-Marc Daniel à 7h50. - -

Depuis les grèves de 1995, les régimes spéciaux de retraite sont devenus un fantasme. Ils sont surtout le symbole de l’incapacité du gouvernement à mener des réformes de fond plus qu’un véritable enjeu financier, estime notre chroniqueur Jean-Marc Daniel.

Il y a en France 600 régimes de base de retraite ! C’est tellement absurde qu’il existe des cabinets de conseil qui aident les futurs retraités à essayer de reconstituer ce que sont leurs droits. C’est tellement incroyable que les fonctionnaires de la Commission européenne, dans les dernières recommandations faites à la France sur ses finances publiques, demandaient que l’on uniformise le système tout en avouant être incapables de mesurer ce que cela voulait dire et en exprimant leur surprise, voire leur doute, sur le fait qu’il puisse y avoir tant de régimes ! Sur un plan strictement juridique, les régimes spéciaux de retraite sont des régimes de salariés ; ils sont au nombre de 18 avec comme régimes phares la Sncf et la Ratp et comme curiosité les salariés de la Comédie française et le clergé. Hors fonction publique, cela représente 1 million de retraités, soit 5% du total.

-> La réforme des retraites est-elle assez ambitieuse ?

Alors quel est l'enjeu ?

Il est évidemment financier - 15 milliards d’euros - mais il est surtout politique. Ces régimes sont nés en général avant 1945 et la création du régime général ; ils ont donc des règles très anciennes qui ont vieilli et qu’il est aberrant de conserver. Après les grèves de 1995, qui ont conduit à une incroyable capitulation du gouvernement de l’époque, en 2008 Nicolas Sarkozy a voulu prendre une revanche symbolique sans toutefois risquer un affrontement direct. D’où un résultat qui tend à rapprocher ces régimes du régime général sans vraiment lever les injustices. Dans le cas de la Sncf par exemple, l’âge de départ à la retraite correspondait aux conditions d’existence des conducteurs de locomotive à vapeur. Aujourd’hui, ces conditions ont changé si bien que malgré la réforme de 2008, un conducteur de train a devant lui 28 ans de retraite et un salarié du régime général 17 ans.

Faut-il les supprimer ?

En 1945, quand on a créé le régime général, il était clair que tout le monde devait le rejoindre ! Il serait temps d’y penser et en allant au-delà des simples régimes spéciaux stricto sensu. Si on veut vraiment réformer les retraites, on devrait s’engager dans cette voie en indiquant que désormais, toute personne qui rentre sur le marché du travail rejoint ipso facto le régime général. On parle souvent de l’art de la réforme. En France c’est surtout l’art du rapport et de l’enterrement. Et on peut de moins en moins se l’offrir.

Jean-Marc Daniel