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Finances publiques

Fraude fiscale: les 10 milliards qui vont manquer à Bercy

Bercy ne récupère jamais la totalité des redressements fiscaux

Bercy ne récupère jamais la totalité des redressements fiscaux - Dylan Calles-AFP

Dans son rapport sur l'exécution du budget 2014, la Cour des comptes constate que Bercy n'aurait récupéré que 8 milliards d'euros des redressements fiscaux notifiés l'an dernier. Soit moins que les années précédentes. Comment l'expliquer?

"En 2015, la lutte contre la fraude fiscale rapportera 400 millions d'euros de plus que prévu", a promis le 15 avril Michel Sapin, le ministre des Finances. Ce n'est pas gagné si l'on observe les chiffres de l'année dernière.

Dans son tout récent rapport sur l'exécution du budget 2014, la Cour des comptes pointe en effet "une baisse des recouvrements issus des contrôles fiscaux". Alors que ces contrôles ont permis l'an dernier au fisc de réclamer aux contribuables plus de 19 milliards d'euros d'impôts et de pénalités (dont 1,9 milliard auprès des repentis fiscaux), l'Etat n'a pu récupérer réellement que 8 milliards. Soit 2 milliards de moins qu'en 2013 et un milliard de moins qu'en 2012 alors qu'il y a eu autant de contrôles. 

Bercy confirme implicitement cette mauvaise année dans ses "indicateurs de performance 2014" qui viennent d'être mis en ligne. Le ministère fait état d'un pourcentage de 53,40% de recouvrement des sommes réclamées dans les deux ans suivant la notification d'un contrôle au contribuable. Or, en 2013, ce pourcentage était de 74%. Il était de 63% en 2012 et de 66% en 2011. Pour 2015 en tout cas, l'objectif du gouvernement est d'atteindre 62%. 

Explication limitée

Bercy justifie la contre-performance 2014 par un très gros redressement dont "les perspectives de recouvrement seront très limitées" dixit le document budgétaire qui ne donne naturellement pas le nom de l'intéressé, secret fiscal oblige. Ce qui signifie que l'Etat n'en verra jamais la couleur. Ce qui a fait mécaniquement baisser le pourcentage de recouvrement total l'année dernière.

Mais l'explication est un peu courte. En privé, certains fiscalistes expliquent la contre-performance par le choix du fisc depuis quelques années de privilégier les gros contrôles fiscaux, c'est à dire ceux concernant des particuliers ou des professionnels à "fort potentiel", en clair dont le contrôle de la situation peut déboucher sur un redressement important. Or, ces contribuables très au fait de la législation fiscale n'hésitent pas à utiliser toutes les voies de droit pour retarder l'échéance ou obtenir l'annulation du redressement. 

Transactions avec le fisc

Plus généralement, deux raisons expliquent la différence entre les droits "rappelés" par l'administration fiscale, selon l'expression utilisée à Bercy, et les sommes effectivement récupérées auprès des contribuables épinglés.

Premièrement, une fois le montant du redressement transmis aux intéressés, ceux-ci ne paient pas automatiquement. Certains saisissent les tribunaux qui annulent parfois tout ou partie du redressement.

Ensuite, d'autres contribuables négocient des remises au fisc qui accepte souvent. Celui-ci préfère en effet récupérer rapidement une partie de son dû plutôt que d'attendre une décision des juges, toujours aléatoire...

Nombre de contrôles fiscaux

> contrôles de dossiers de particuliers: 683.000

> examen d'ensemble de la situation personnelle: 50.500

Source: DGFiP, chiffres 2013

P.C