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Privatisations : le tour de passe-passe comptable de Bercy

Les privatisations d’ADP et FDJ serviront à limiter l’endettement des années à venir.

Les privatisations d’ADP et FDJ serviront à limiter l’endettement des années à venir. - Lionel BONAVENTURE / AFP

Les cessions d’ADP et FDJ serviront à limiter l’endettement des années à venir. Le fonds pour l’innovation promis par le gouvernement sera en réalité financé par le contribuable et non par les privatisations. Explications.

Les privatisations sont une belle histoire de communication. Les ventes des participations publiques dans Aéroport de Paris (ADP) et Française des Jeux (FDJ) rapporteront environ 10 milliards d’euros à l’Etat actionnaire. Un pactole qui devait servir à la fois au financement de l’innovation et au désendettement du pays. La réalité est bien différente.

D’abord, les 10 milliards d’euros de cash seront en fait placés sur un compte au Trésor. Ils ne seront pas investis mais « dormiront » dans les caisses de l’Etat. En conservant cette somme, Bercy opère un petit tour de passe-passe comptable. Les règles « maastrichtienne » autorisent le gouvernement à déduire ce cash de la dette publique. Ce qu’il ne peut pas faire avec des actions d’entreprises.

Pourtant, ces 10 milliards ne feront pas baisser les 2 255 milliards de dettes actuels. Ils seront utilisés comme une sorte de « fonds de roulement » permettant à la France d’emprunter 10 milliards d’euros de moins chaque année. Ainsi, en 2019, le Trésor n’aura besoin de lever « que » 185 milliards au lieu de 195 milliards. Finalement, la dette ne baisse pas mais augmente un peu moins… L’artifice comptable ne sert qu’à emprunter moins. On est loin de la promesse de créer un fonds de 10 milliards d’euros pour investir dans l’innovation.

Eviter que la dette dépasse les 100% du PIB

Bruno Le Maire avait aussi promis que ce fonds produirait un rendement de 250 millions d’euros pour investir dans les start-up. Or, ces 10 milliards d’euros n’étant pas investis, aucun rendement ne sera généré. Ce « rendement » proviendra tout simplement du budget de l’Etat et donc des impôts ! A ce jour, on ne sait même pas comment cet argent sera investi. Bpifrance, chargée de les placer, n’en percevra « que » 70 millions, nous explique-t-elle. Où iront les 180 millions d’euros restants ? Bercy ne nous a pas répondu sur ce point.

Là encore, on est loin de l’image du cercle vertueux qui verrait les privatisations financer les start-up. Elles servent finalement à limiter l’endettement de la France et éviter de passer le seuil symbolique de 100% du PIB. Quant à l’innovation, son financement par le budget de l’Etat ne garantit par sa pérennité. Le gouvernement ne sera-t-il pas tenté de raboter l’enveloppe dans quelques années ?