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Procès Tapie : Stéphane Richard devant les juges

Stéphane Richard devant les juges le 21 mars dernier.

Stéphane Richard devant les juges le 21 mars dernier. - Martin BUREAU / AFP

Le patron d'Orange, est l'un des six prévenus dans le procès sur l'arbitrage Tapie. Stéphane Richard, directeur de cabinet de Christine Lagarde au moment des faits, est poursuivi pour complicité d'escroquerie et complicité de détournement de fonds publics.Il sera entendu mercredi par les juges.

L'ordonnance de renvoi est accablante. Les juges ont décortiqué tout le processus qui a mené à l'arbitrage et pour eux pas de doute : Stéphane Richard a clairement choisi de «sacrifier les intérêts de l'Etat pour satisfaire les intérêts particuliers de Bernard Tapie». Pour eux, en effet, Stéphane Richard a dès son arrivée à Bercy pris personnellement en charge ce dossier, pour en faire son domaine réservé. Il a ensuite tout fait pour mettre en place cet arbitrage, quitte à dissimuler « des informations essentielles à la ministre », pour lever un à un les obstacles.

Selon les juges, Stéphane Richard a ainsi « soigneusement éviter d'attirer l'attention de Christine Lagarde » sur les notes de l'Agence des participations de l'Etat, qui tente alors de dissuader les pouvoirs publics d'engager cette procédure. Ils lui reprochent aussi d'avoir participé à une réunion à l'Elysée, en présence de Bernard Tapie sans en avoir informé la ministre. Ils l'accusent encore d'avoir utilisé sa griffe, une sorte de signature pré-imprimée, à son insu, sur un document capital, puisqu'il s'agissait de lever l'ultime obstacle pour aller à l'arbitrage. Enfin, les juges expliquent qu'une fois la décision tombée, et malgré la somme accordée à Bernard Tapie, « Stéphane Richard a usé de toute son influence » pour éviter un recours.

Une accusation infondée

Pourquoi aurait-t-il agi ainsi ? « Pour plaire à ceux à qui il devait sa nomination au poste de directeur de cabinet, qui allait constituer un formidable tremplin pour sa carrière », expliquent les juges, qui sont convaincus que Stéphane Richard s'est chargé d'exécuter un pacte entre Nicolas Sarkozy, alors Chef de l’État, et Bernard Tapie, qui l'avait soutenu pendant sa campagne présidentielle. Pour eux, tout l'arbitrage aurait donc été biaisé depuis le départ.

« L'idée que Stéphane Richard ait été chargé d'exécuter des instructions de l'Elysée en faveur de Bernard Tapie est totalement fausse et ne repose sur aucun fait tangible », rétorque l'un des avocats de l'ancien directeur de cabinet. Oui, l'Elysée s'est impliqué dans ce dossier et cela n'a rien de suspect compte tenu des enjeux financiers, explique cette même source. Oui, l'Elysée était favorable à cet arbitrage qui devait permettre de clore définitivement l'ensemble de ce contentieux qui durait depuis plus de 13 ans et faisait peser un risque financier à l'Etat. Et rien ne permettait à l'époque de penser que cet arbitrage était contraire aux intérêts de l'Etat.

Christine Lagarde était au courant

Stéphane Richard d'ailleurs a toujours nié en bloc. Il assure n’avoir jamais eu aucune instruction, aucun ordre, ni aucune pression de l’Elysée. Il n’a, dit-il, jamais rien caché à Christine Lagarde. Elle était parfaitement au courant de l'hostilité de l'Agence des Participations de l'Etat à cet arbitrage. La lettre signée de sa griffe ? Stéphane Richard assure qu'il l'en avait informée. La réunion à l'Elysée en présence de Bernard Tapie ? même chose. « Toutes les procédures ont été respectées et c'est en parfaite connaissance de cause que la ministre a décidé cet arbitrage » explique-t-il. Christine Lagarde elle-même a d'ailleurs toujours assumé cette décision.

Quant à la décision de ne pas déposer de recours, Stéphane Richard est catégorique : « S'il y a bien un sujet sur lequel je ne me suis jamais senti en position d'exprimer un conseil, c'est celui-là. Je n'en avais pas les compétences juridiques contrairement à Christine Lagarde et c'est donc elle qui s'est personnellement impliquée dans cette décision ». Enfin et surtout, Stéphane Richard souligne qu'il n'a absolument pas participé au déroulement de cet arbitrage. Il ne connaissait pratiquement pas Bernard Tapie avant cette affaire, il ne connaissait aucun des arbitres. Et ce n'est donc que des années plus tard, à l'issue d'une longue et complexe enquête pénale, qu'il a découvert que cet arbitrage était en fait frauduleux compte tenu des liens entre Bernard Tapie, l'un de ses avocats et l'un des trois arbitres.

L'un de ses avocats résume : « Stéphane Richard ne peut pas avoir été complice d'une escroquerie liée à des faits dont il ignorait totalement l'existence ».