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Economie et Social

Réforme des retraites : Le gouvernement de plus en plus fébrile

La fameuse "clause du grand-père" est en train de rebattre les cartes. Si bien que l'existence même de la réforme est menacée.

Officiellement, tout va bien. Emmanuel Macron reste déterminé à aller au bout de la réforme. Et il n'y a pas de divergences au sein du gouvernement, affirme Sibeth Ndiaye, la porte-parole du gouvernement.

Voilà pour le discours officiel. Dans les faits pourtant, Jean-Paul Delevoye se retrouve de plus en plus seul pour défendre cette réforme. La perspective d'un nouveau mouvement social, à partir du 5 décembre prochain, a en effet ravivé les divergences au sein de la majorité sur l'intérêt d'une telle réforme. Les tensions ne sont pas nouvelles. Matignon a toujours été réticent face au big-bang des retraites et la grogne qui monte lui donne l'occasion de tenter une nouvelle fois d'enterrer cette réforme, nous explique l'un de ceux qui est au coeur des discussions.

"Il ne s'agit en rien d'un recul"

Le Premier ministre en tous cas semble prêt aujourd'hui à toutes les concessions. Y compris appliquer la clause du grand-père à l'ensemble des salariés. Concrètement, cela reviendrait à n'appliquer cette réforme qu'aux seuls nouveaux entrants sur le marché du travail et pas aux salariés actuels. Ce qui dans les faits reviendrait à n'appliquer cette réforme que dans 40 ans ! Cette piste, qui jusqu'ici a toujours été balayée d'un revers de la main lors des concertations avec les partenaires sociaux, semble aujourd'hui être la solution privilégiée par Matignon. Dans l'entourage du Premier ministre, elle est en tous cas parfaitement assumée : "il ne s'agit en rien d'un recul, la réforme s'appliquerait bien, il s'agit juste de faire une transition en douceur", nous dit-on.

La clause du grand-père appliquée à tous revient à enterrer la réforme

Pour Jean-Paul Delevoye, le Haut-Commissaire à la réforme des retraites, appliquer la clause du grand-père à tous est tout simplement impossible et reviendrait à renoncer à la réforme. Une telle solution en effet reviendrait, pour le gouvernement, à faire l'exact inverse de ce qu'il a promis. Le système ne serait pas plus simple.

Il faudrait créer un 43ème régime en plus des 42 actuels qui devraient continuer à cohabiter pendant une quarantaine d'années. "Une véritable usine à gaz", nous dit un expert. Il ne serait pas plus juste. Seuls les jeunes seraient concernés. "Comment leur expliquer une telle injustice alors que le but initial était précisément de leur redonner confiance dans le système", souligne un responsable syndical. Tout cela pour quel intérêt politique ? Le gouvernement se mettrait à dos la CFDT, son seul véritable allié sur cette réforme. "Si c'est pour en arriver à de telles extrémités, autant abandonner la réforme tout de suite", nous dit un haut responsable de la CFDT. Quant à Force Ouvrière et à la CGT, c'est le principe même d'un système à point qu'il conteste. "On ne veut pas de cette réforme ni pour les salariés d'aujourd'hui ni pour ceux de demain", nous dit un haut responsable de FO.

C'est à l'Elysée qu'il reviendra de trancher. Difficile de savoir si la détermination d'Emmanuel Macron sur cette réforme reste intacte. Le président lui est resté flou sur la clause du grand-père. A aucun moment, il n'a dit clairement qu'il était prêt à l'appliquer à l'ensemble des salariés français. Officiellement, il se dit déterminé à aller au bout de cette réforme. Ceux qui sont au coeur de la concertation pourtant se plaignent que "les discussions, sur le fond, patinent" et assurent que l'Elysée est de plus en plus hésitant".