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Finances publiques

Revoilà la fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu

Les deux prélèvements rapportent ensemble 160 milliards d'euros par an.

Les deux prélèvements rapportent ensemble 160 milliards d'euros par an. - Joel Saget -AFP

La fusion des deux grands prélèvements, promise par le candidat François Hollande en 2012, va être relancée par un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires remis mercredi 4 février au Sénat. Gros problème : cette fusion pourrait faire jusqu'à 10 millions de perdants !

"La contribution de chacun sera rendue plus équitable par une grande réforme permettant la fusion à terme de l'impôt sur le revenu et de la CSG dans le cadre d'un prélèvement simplifié sur le revenu". 

Qui se souvient de l'engagement de campagne numéro 14 de François Hollande? Visiblement la Commission des finances du Sénat, qui a commandé un rapport sur ce thème au Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), une émanation de la Cour des comptes. Ce rapport sera présenté demain mercredi par Didier Migaud, le Premier président de la Cour. 

Le 20 octobre dernier, c'est Martine Aubry, la maire PS de Lille, qui réclamait cette fusion dans une interview au JDD pour "redonner du pouvoir d'achat aux classes modestes". Pour la gauche, en effet, la CSG a le gros inconvénient d'être proportionnelle aux revenus, à la différence de l'IR qui est progressif avec ses 5 taux.

Pour l'heure, l'exécutif reste silencieux sur le sujet. On ne sait toujours pas si la réforme sera intégrée au projet de loi de simplification fiscale présenté au printemps. 

Quid des transferts de charges?

On le comprend. La fusion CSG-IR dans un nouveau prélèvement unique entraînerait en effet des transferts de charges entre contribuables. C'est ce que va pointer le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires. Et c'est ce que rappelait déjà un rapport de Bercy et de la direction de la Sécurité sociale transmis aux parlementaires en 2012

Selon les scénarios retenus, les perdants seraient au minimum 9 millions de foyers fiscaux sur 37 millions. "35 à 45% des perdants disposent de moins de 26.000 euros de revenus" par an, ajoutait Bercy. Et près d'un million de ces perdants déclarent moins de 14.000 euros par an. Les familles avec enfants seraient par ailleurs perdantes car "une partie des sommes consacrées à la famille est dirigée vers les non-imposables", ajoutait Bercy. En clair, la réforme voulue par les socialistes défavoriserait aussi les classes moyennes et populaires. 

Par ailleurs, pour être constitutionnel, le nouveau prélèvement devrait être global, progressif et surtout prendre en compte les charges familiales. En pratique, une imposition issue de la CSG se substituerait progressivement, sur au moins trois ans, aux deux impôts sous leur forme actuelle. L'IR disparaîtrait à mesure que le nouvel impôt monterait en puissance. Mais ce scénario entraînerait selon Bercy "des risques budgétaires non négligeables", de pertes de recettes fiscales durant la période transitoire. 

Revenir sur la déductibilité de la CSG ? 

Autre sujet explosif évoqué par le rapport remis demain au Sénat : revenir sur la déductibilité de la CSG de l'impôt sur le revenu. C'était d'ailleurs l'une des pistes de la réforme fiscale lancée en 2013 par Jean-Marc Ayrault mais vite abandonnée.

Actuellement, la CSG payée par les salariés, les retraités ou les épargnants, est déductible en grande partie des revenus imposables qui servent de base à l’IR. Cette déductibilité s’explique car la CSG a remplacé des cotisations sociales qui étaient déjà déductibles. Ainsi, la CSG sur les salaires est déductible à hauteur de 5,1% sur un taux de 7,5%, celle sur les retraites à hauteur de 4,2% sur 6,6%, celle sur les indemnités chômage à 3,8% sur 6,2%, et celle sur les placements à 5,8% sur 8,2%.

Mais la déductibilité profite aux seuls contribuables payant l’IR, soit un peu moins d’un sur deux, rappellent les socialistes. De plus, la CSG étant proportionnelle aux revenus, l’avantage fiscal de la déductibilité est d’autant plus fort que les revenus sont élevés. Et pour l'Etat, l'actuelle déductibilité fait perdre 10 milliards d'euros par an aux finances sociales. 

Selon une enquête du ministère des Affaires sociales transmise au Haut conseil pour le financement de la protection sociale, cette non-déductibilité serait profitable à 18 millions de foyers, essentiellement modestes. Ils gagneraient en moyenne 130 euros par an. Mais en face, quelque 6,3 millions de ménages aux revenus moyens ou élevés seraient perdants dans l'opération. Ils laisseraient en moyenne 380 euros par an. Est-ce tenable alors que l'exécutif a annoncé une baisse des prélèvements obligatoires ?

Ce que rapportent la CSG et l'IR

> CSG : 90 milliards d'euros par an

> IR : 70 milliards 

Patrick Coquidé