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Finances publiques

Sécu: la Cour des comptes invite à prendre exemple sur l'Allemagne

Dans un rapport publié ce mardi 14 septembre, les Sages de la rue Cambon ont dressé une étude comparative entre les deux systèmes d'assurance-maladie. Histoire de trouver des solutions permettant de réduire le déficit abyssal de la Sécu.

Comment rendre son système d'assurance maladie plus efficace? En s'inspirant de ce qu'a fait un autre grand pays prenant en charge les principales dépenses de santé de ses habitants: l'Allemagne. C'est en tout cas l'idée de la Cour des comptes qui publie un rapport ce mercredi 14 septembre. Une idée fondée sur un constat budgétaire: entre 2000 et 2014, la branche maladie de la Sécurité sociale française a accumulé 104,8 milliards d'euros de déficit quand l'assurance-maladie allemande a elle enregistré…11,8 milliards d'euros d'excédents.

Evidemment, ce fossé entre les deux pays est dû à des écarts importants de culture. La Cour parle de "philosophies distinctes". La Sécu allemande répond à une logique (et une obligation légale!) d'équilibre des comptes quand son homologue française est seulement centrée sur "la maîtrise des dépenses".

La Cour ne nie d'ailleurs pas ces écarts "forts" qui existent entre l'Allemagne et la France, et reconnaît qu'une transposition "pure et simple" des solutions n'est ainsi pas possible. Mais elle estime ensuite dans ses conclusions que "les constats faits permettent d'ouvrir plusieurs champs de réflexion en termes d'efficience, de pilotage et de soutenabilité". 

"Bouclier sanitaire"

Les Sages mettent ainsi en exergue certaines décisions prises par nos voisins. Elle souligne ainsi que l'Allemagne rembourse mieux certaines prestations. Ainsi les frais d'hospitalisation sont-ils pris en charge à 98% contre 90,4% en France et les honoraires des médecins à 95,3% contre 71%.

En fait, ces taux plus généreux s'expliquent aussi parce que la Sécu allemande s'est délesté d'un certain nombre de dépenses que son homologue française continue à rembourser. En Allemagne, depuis 2003, il ne faut plus compter sur la caisse publique (AOK) quand on doit acheter une paire de lunettes ou remplacer par une couronne une dent dévitalisée. 

Elle a également mis en place en 2004 un système de franchise dont le montant dépend des revenus de l'assuré: une sorte de "bouclier sanitaire". Concrètement le reste à charge pour un ménage sur l'ensemble des prestations de santé assurée sur 12 mois ne peut excéder 2% de son revenu brut annuel. Et même 1% pour les affections dites de longue durée (cancers, diabète, sida...)

La Cour des comptes considère que les mesures allemandes "peuvent conduire à s'interroger" sur les choix français. A savoir privilégier le remboursement à 100% des affectations de longue durée (ALD) "avec pour corollaire un recours progressivement généralisé à une couverture complémentaire qui engage des financements publics considérables (…) tout en laissant à la charge des assurés des restes à financer qui peuvent être élevés".

Un système où tout le monde est gagnant

De même la Cour vante le "rôle essentiel" joué par les partenaires de l'assurance-maladie, un rôle qui "ne peut manquer de retenir l'attention". La Cour fait référence au fait que les honoraires des médecins de ville en Allemagne sont décidés par la voie de négociations essentiellement locales entre les caisses et les médecins eux-mêmes. Elle note que ce système impose "un encadrement des honoraires et une responsabilisation financière des praticiens".

La Cour conclut que "l'exemple allemand montre que des règles strictes dans le contrôle de certaines dépenses sectorielles permettent en définitive à toutes les parties prenantes du système de santé d’en retirer des bénéfices".

Et ce "qu’il s’agisse des médecins, par des revenus élevés, des patients, qui bénéficient de niveaux de prise en charge appropriés et de tarifs respectés et des entreprises et des ménages qui en assurent le financement, parce que ces disciplines contribuent à l’équilibre financier de l’assurance maladie en prévenant ainsi le poids très lourd du financement de la dette sociale". En gros tout le monde est gagnant. Des enseignements à méditer donc pour le gouvernement français. 

J.M.