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Finances publiques

TVA: le cadeau empoisonné de Bruxelles à Paris

Il existe déjà 146 dérogations aux règles de TVA en France

Il existe déjà 146 dérogations aux règles de TVA en France - Philippe Hugen-AFP

"Bruxelles s'apprête à autoriser les états-membres de l'Union européenne à décider eux-mêmes des taux de TVA chez eux. Une réforme qui pourrait être lourde de conséquences pour nos finances publiques déjà mal en point."

Cette semaine, la commission européenne va annoncer qu’elle autorisera les états-membres à décider eux-mêmes des taux de TVA. Un vrai cadeau empoisonné pour les états, la France en particulier, puisque tous les lobbies et les groupes de pression vont désormais se ruer sur l’exécutif pour obtenir une TVA moins lourde. 

Paris ne pourra plus se retrancher derrière Bruxelles pour refuser. Car aujourd’hui, il faut l’accord de Bruxelles pour modifier les taux de TVA, pour passer par exemple un produit ou un bien de 20%, le taux normal en France, à 5,5%, le taux réduit.

Satisfaire les Britanniques

Pourquoi une telle réforme? Selon l’argumentaire de la commission, et avec un peu de langue de bois, la TVA a besoin d'être "modernisée et réinitialisée".... En fait, il n'a échappé à personne que la Grande-Bretagne est en pleine campagne sur le référendum sur le Brexit. Et qu’elle réclame des aménagements aux règles européennes pour pouvoir rester dans l’Europe.

Or, c’est Londres qui jusqu’à présent utilise le plus les dérogations aux règles européennes sur la TVA, en particulier en appliquant un taux zéro sur beaucoup de produits. 

Mais ces nouvelles règles vont également aussi avoir des conséquences en France. Aujourd’hui, lorsqu’un lobby ou un secteur d’activité réclame à l’État de baisser la TVA sur un produit ou un service, l’exécutif peut toujours dire qu’il doit demander l’autorisation à Bruxelles, que ce sera long, compliqué.

Demain, le gouvernement français, quel qu’il soit, sera en première ligne pour accepter ou refuser une baisse de TVA. Ce qui sera nettement moins confortable. On imagine bien qu’à la veille de la campagne présidentielle de l’an prochain, les groupes de pression vont tenter d’obtenir le maximum d’engagements des différents candidats sur la baisse de la TVA dans leur secteur.

Impact sur les rentrées fiscales

Et chaque modification des taux, c’est un peu moins d’argent dans les caisses de l’État. Or, la TVA est le premier impôt en France avec 145 milliards d'euros de recettes, le double de l'impôt sur le revenu. 

Il existe déjà en France selon la Cour des comptes 145 dérogations aux règles normales concernant la TVA, ce qui représente un manque à gagner de plus de 80 milliards par an. Il y a de fortes chances que ce chiffre soit dépassé à l’avenir avec la réforme de Bruxelles...

P.C