Google invente le bloqueur de pub qui redonne le sourire aux annonceurs
D'ordinaire, les annonceurs détestent les "adblocks", a fortiori s'ils sont activés par défaut. Mais Google a trouvé un compromis avec un bloqueur d'un nouveau genre: rejetant les publicités trop intrusives, il laissera passer celles qui n'agressent pas les internautes.
Une régie publicitaire peut-elle prendre le risque d'installer un bloqueur de pub actif par défaut sur son propre navigateur? A priori, non. Mais quand on est la régie la plus puissante de la planète, on peut visiblement tout se permettre. Estimant qu’il fallait trouver une solution pour couper l’herbe sous le pied aux adblockers qui ont fait chuter les revenus publicitaires ces dernières années, Google a trouvé un compromis: épargner aux internautes les publicités agressives tout en permettant aux annonceurs de toucher de nouveaux clients.
Selon The Wall Street Journal, le géant du web a déjà commencé à alerter les fournisseurs de contenus que le produit était sur les rails et qu’ils avaient "au moins six mois" pour s’y préparer. En effet, ce nouvel outil sera intégré début 2018 dans Chrome, le navigateur de Google, mais surtout, il sera activé par défaut. D’ici là, Google met à leur disposition un logiciel baptisé "Ad Experience Report" qui permettra de tester l’impact de ce futur filtrage sur leurs sites.
Il n’est pas question, en effet, de bloquer toutes les publicités. Google vit de la réclame, rappelons-le. L’objectif est plutôt de supprimer les publicités particulièrement intrusives et qui gênent l’internaute dans sa navigation. Pour cela, l’outil va s’appuyer sur les règles établies en avril dernier par le consortium "Coalition for better ads", qui regroupe un grand nombre d’annonceurs et d’acteurs de la publicité, dont Google, Facebook, Teads, The Washington Post, Procter & Gamble, etc. Ainsi seront bannis les fenêtres pop-up, les bannières envahissantes, les vidéos avec son et démarrage automatique, les comptes à rebours et les animations façon guirlande de Noël.
L’objectif de cette démarche est d’améliorer l’expérience utilisateur de l’internaute et éviter que celui-ci, excédé par ces obstacles visuels et ces lenteurs, n’installe un blocage total sur son navigateur. "Ces expériences frustrantes peuvent mener certaines personnes à bloquer toutes les pubs, au grand dam des créateurs de contenu, des journalistes, des développeurs web et des vidéasts dont la rémunération dépend de la publicité", explique Sridhar Ramaswamy, vice-président publicité et commerce chez Google, dans une note de blog qui sonne comme un slogan publicitaire: "Construire un meilleur web pour tout le monde".
Mais cette nouvelle stratégie risque évidemment de faire grincer des dents car Google est juge et partie dans cette affaire. Un mastodonte de la publicité en ligne va désormais décider quelles publicités seront affichées dans le navigateur le plus utilisé du marché. Il est très probable que la réclame de Google ne sera pas impactées par cet outil de filtrage, même si Sridhar Ramaswamy souligne que les publicités servies par Google seront soumises au même traitement. Certains acteurs de la publicité pourraient arguer qu’il s’agira là d’un abus de position dominante et pourraient porter cela au tribunal.
Enfin, signalons que Google propose également aux fournisseurs de contenu d’intégrer dans leurs sites le dispositif "Funding Choices" qui permet de détecter l’utilisateur d’un bloqueur de pub et de lui proposer de payer pour cacher la publicité. Une démarche qui est loin d’être évidente…