Hyperloop: la voie vers le train supersonique est longue et pavée d'embûches
Ce véhicule supersonique sera d'une grande complexité à mettre en oeuvre. Vitesse, signalisation, évacuation des passagers, la preuve de la faisabilité technique du projet doit encore être apportée par les différents groupes qui travaillent à sa réalisation dans des installations-tests.
En pleine tournée européenne, le fondateur de Transpod, Sébastien Gendron, est l’un des nombreux acteurs qui tentent de concrétiser le projet de train supersonique Hyperloop imaginé par Elon Musk. Ce mardi 20 juin 2017, il a livré de nouveaux détails techniques lors d’un passage à Paris. L’occasion de mesurer le chemin qui reste à parcourir aux principales entreprises impliquées pour que ce transport du futur devienne une réalité.
Le concept Hyperloop (littéralement "super boucle") a vocation à transporter des passagers à très grande vitesse (jusqu'à 1.200 km/h) dans des capsules circulant dans un tube à basse pression.
La vitesse supersonique ne sera pas atteinte avant plusieurs années
Au mois de mai 2016, la société Hyperloop One, soutenue par la SNCF, pensait faire fureur en étant la première à procéder à un test. Pourtant, la démonstration dans le désert du Nevada a fait pschitt, comme on a pu le voir en vidéo (ci-dessous).
Le train n’est alors propulsé qu’à 185 km/h sur 50 mètres. Hyperloop One vient maintenant d’achever une nouvelle piste de 500 mètres de long, afin de procéder à une nouvelle expérimentation publique cette année. Une distance qui reste insuffisante pour prouver la capacité du prototype à atteindre une vitesse de plus de 1200 kilomètres/heure.
De son côté, Hyperloop Transportation Technologies (HTT) ne prévoit pas d’achever ses deux tronçons d’essai, l’un à Quay Valley en Californie, l’autre à Toulouse, avant trois ans au moins. Celui de Quai Valley revêt l’intérêt de s’étendre sur huit kilomètres. Enfin un terrain de jeu laissant le chant à une accélération satisfaisante !
Des néerlandais ont bâti une installation-test de 30 m de long
Même son de cloche avec Transpod qui annonce un premier prototype pour 2020 avec l'espoir de décrocher une certification pour le fret deux ans plus tard.
Quant aux étudiants hollandais distingués au mois de janvier dernier, lors du concours organisé par Elon Musk, ils ont créé leur propre start-up, Hardt Global Mobility, et ont construit un tube de 30 mètres de long et de 3,3 mètres diamètre sur le campus de l'université de Delft aux Pays-Bas. Mais ce dernier servira à tester en priorité la stabilisation du véhicule, sa sécurité, la propulsion et la lévitation… à faible vitesse avant de passer à la grande vitesse. Les virages et les changements de voies à l'intérieur du tube seront également mis à l'étude par le groupe néerlandais de chercheurs.
Mais quant à savoir entre quelles destinations pourrait se faire ce premier trajet, "nous devons toujours faire quelques recherches" sur les distances et les villes qui nécessiteraient un tel service, a précisé Tim Houter, directeur exécutif d'Ardt Global Mobility à l'AFP. Il n'exclut toutefois pas que l'Hyperloop puisse circuler entre Amsterdam et Paris, alors que ces villes sont déjà reliées par avion et par des trains atteignant les 300 km/h.

Quelle technologie pour la lévitation ?
Pour rappel, le rêve d’Elon Musk était de propulser des capsules dans un tube avec un champ magnétique généré par des moteurs à induction linéaires. Les capsules devaient se trouver en lévitation sur des rails et se déplacer sur un coussin d’air. Aucune des start-up n’entend respecter à la lettre ce cahier des charges.
HTT a fait le choix d’une lévitation passive avec des électro-aimants sous les capsules. Et Hyperloop One mise tout sur le train à sustentation magnétique, sur le modèle du Maglev japonais qui utilise des aimants supraconducteurs sur la voie et des bobines supraconductrices dans le véhicule. Transpod a déposé un brevet de lévitation active fonctionnant avec des moteurs électriques à induction linéaires. Mais personne n'a encore prouvé que sa technologie était efficiente.

Quelles infrastructures et quelle sécurité ?
La vitesse et la lévitation ne sont pas les seuls défis à relever. Il faudra construire les infrastructures dans lesquelles circuleront le tube. Ces dernières seront-elles enterrées, au ras du sol ou surélevées sur des pylônes ? Pour le moment, il faut se contenter de vues d'artistes montrant toutes des infrastructures au-dessus du sol.
Comme pour le ferroviaire, un système de signalisation et d'aiguillage reste à imaginer. Car les start-up en lice prévoient des intervalles extrêmement courts entre chaque départ : 90 secondes, par exemple, pour Transpod. Et certaines capsules ne s'arrêteraient pas dans toutes les gares.
De nombreuses questions de sécurité se posent également. Le train roulant à plus de 1200 km/h, il lui faudra une longue distance pour parvenir à s'arrêter. Cela sera-t-il compatible avec une grande rotation de départs ? Et comment évacuer les passagers en cas de panne dans un tube pressurisé qui ne comporte pas de porte ? Cela reste un point noir pour les exploitants de transport.
Lorsque tous ces défis seront relevés, il faudra encore prouver qu’Hyperloop n’est pas un puits financier sans fond et qu'il apporte un gain par rapport au TGV ou au transport de marchandises par camion. Si ce n’est pas le cas, le projet pourrait bien finir comme l’aérotrain des années 70. Un exploit technologique mort dans l’œuf parce qu’il coûtait plus cher que de développer le TGV. Ce qui porte d'Hyperloop pour le moment, c'est sa capacité à faire rêver le monde et à mobiliser de grands groupes et des Etats, prêts à investir beaucoup pour relever ce pari fou.