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Moins d’une TPE sur trois a entamé sa transformation numérique

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Si une grande majorité de très petites entreprises a conscience de la nécessité de se transformer, peu ont passé le cap. Les autres mettent en avant les trop nombreux freins.

Les TPE et les PME constituent les forces vives de l’économie française avec pas moins de 6 millions d’emplois. Mais elles demeurent les parents pauvres de la transformation numérique. Selon un récent classement, elles se situent au 18e rang, européen, et une nouvelle étude réalisée par OpinionWay pour la Confédération des PME et Sage (éditeur de logiciels) confirme ce constat et illustre un certain paradoxe en la matière.

Si la transformation digitale est perçue comme une réelle opportunité pour ces entreprises voire un enjeu important pour la moitié d’entre elles, son déploiement reste encore très limité.

C’est pourtant un enjeu essentiel, cette transformation permettant d’accélérer l'activité grâce à des outils de connectivité très haut débit, de dématérialisation, de communication, de collaboration…. Une étude du cabinet TERA affirmait en 2018 que 500.000 emplois pourraient être créés si la France rattrapait la Suède en matière de numérisation des entreprises.

Ainsi, moins d’une TPE française sur trois (29%) a commencé sa transformation ou l’a déployé, selon l'étude. "Beaucoup d’entre elles sont réfractaires au changement et voient cette digitalisation comme une entrave plutôt qu’une opportunité".

Peur du changement

D'après l’étude, ces TPE craignent de faire face à des problèmes au niveau des process (fonctionnement au quotidien, 43%), des équipes (41%) et du financement (40%) ».

"Ces chiffres révèlent le retard des TPE à effectuer leur transition numérique. Les principales causes sont la peur du changement et le manque de moyens pour la financer. Il faut éviter à tout prix que cette révolution numérique ne laisse nos entreprises sur le bord de la route. C’est pour cela que la CPME déploie une démarche de sensibilisation et d’accompagnement des TPE à leur indispensable transformation digitale" explique François Asselin, Président de la CPME.

Evidemment, le retard observé dépend de nombreux facteurs, notamment la taille et le secteur d’activité. Ainsi, les artisans et commerçants sont ceux qui accusent le plus de retard: les structures employant entre 0 à 2 salariés sont les plus touchées avec 89%, suivi par celles comptant 3 à 9 salariés (47%). Les secteurs de la construction, du commerce et des services aux particuliers sont également les plus concernés.

"Les TPE ne doivent pas rester en dehors de la transformation digitale. Si l'enjeu n’est plus à démontrer, il faut aujourd’hui rassurer les entreprises sur le déploiement et les aider à prendre le train en marche très rapidement. Pour cela, la pédagogie et l’accompagnement sont clés", déclare Laurent Dechaux, directeur général Sage pour l'Europe du Sud.

Car les bénéfices sont clairement identifiés par celles qui ont sauté le pas. Notamment au niveau de la communication (41%), de l’organisation, du suivi des activités et la gestion comptable (35%) et enfin de la paie et des ressources humaines (34%).

Outils encore basiques

On notera cependant que la conquête de nouveaux clients et la productivité sont des gains assez peu mis en avant par les dirigeants : 39% et 35% respectivement.

Il faut dire que les outils mis en place dans les TPE sont encore basiques : adresses mails professionnelles (70%), site Internet vitrine (50%), logiciels de gestion ou RH (47%), réseaux sociaux (45%). Les outils plus sophistiqués sont encore peu déployés : intranet (29%), logiciel CRM (23%), cloud (23%), site marchand (21%). Le très haut débit via la fibre optique n’est même pas cité.

Mais alors que des enjeux importants arrivent à grands pas, comme la fin prochaine de la téléphonie analogique (RTC) qui équipe une large majorité de petites entreprises en France, la complexité de l’offre n’aide pas.

Selon Amir Reza-Tofighi, Co-président de la commission innovation et économie numérique à la CPME : "les offres ne sont pas lisibles car le dirigeant n’a ni le temps ni les connaissances pour s’en occuper vraiment. D’ailleurs, il s’en occupe après tout le reste. La complexité, c’est le premier frein. Il y a un travail de fond à engager qui va au-delà de la technique", pointe-t-il.

La CPME multiplie d’ailleurs les initiatives pour guider les patrons de petites entreprises. Avec l'Arcep (le régulateur des télécoms), l'Afutt, InfraNum, et le MEDEF, elle vient de publier un guide "Entreprises connectées : choisir son offre télécom pour réussir sa transformation numérique". Il se concentre sur la question des télécoms d’entreprise, épine dorsale de la transformation numérique.

Or, et c'est une autre mauvaise nouvelle, seulement 23% des entreprises de 1 à 249 salariés sont équipées en fibre optique, selon une enquête menée en mai dernier par l’Ifop pour Covage. Une performance encore trop faible, et encore plus si on considère les TPE de 1 à 5 salariés où ce taux ne dépasse pas les 20%.

Olivier Chicheportiche