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Pour Gaspard Koenig, "prospérité et liberté entrent en conflit" à cause de l'intelligence artificielle

Pour l'essayiste Gaspard Koenig, invité sur BFM Business, l'essor de l'intelligence artificielle pose la question du libre-arbitre et des libertés individuelles.

Gaspard Koenig, essayiste et auteur de "La fin de l’individu" (Editions de l'Observatoire), était l'invité de l'émission "12H L'heure H" sur BFM Business. Il est revenu sur l'essor de l'intelligence artificielle et la question du libre-arbitre.

"Les gens qui tournent de l'IA, les utilitaristes, ont un peu confondu optimisation et progrès. Le progrès, ça vient aussi de la divergence et de l'erreur (…). Les bactéries de la soupe originelle, au tout début de l'histoire de la vie, imaginez qu'on ait eu un super système d'IA pour assurer leur bien-être et leur confort. Jamais ne seraient apparues des espèces vivantes supérieures, parce qu'on les aurait organisées dans leur petite soupe d'une manière qu'elles souffrent le moins possible et qu'elles soient le plus heureuses, et la première qui aurait eu une mutation génétique et qui aurait commencé à diverger, on lui aurait dit 'non non toi tu ne te comportes pas correctement, on va te remettre dans la norme' (…). Ce que produit l'IA, par la statistique, c'est de la norme", avance Gaspard Koenig.

"Le monde occidental est traversé par une tension extrêmement forte parce qu'on nous a appris depuis deux ou trois siècles que les libertés individuelles et la prospérité économique allaient de pair. Que c'est parce qu'on avait un Etat de droit, parce qu'on avait le droit des contrats, parce qu'on avait les brevets, que nous pouvions nous développer économiquement et regarder ces dictatures terribles qui échouent et qui n'arrivent pas à produire du bien-être pour leurs populations. Or, aujourd'hui, ces deux termes, prospérité et liberté, entrent en conflit. On voit bien que pour avoir (…) quelque chose qui soit mieux pour l'environnement, plus efficace, moins consommateur d'énergie, il faut ramasser les données de tout le monde", poursuit-il.

Un modèle alternatif?

"Il y a une tension terrible entre le fait de dire vous avez le droit qu'on vous protège vos données et le fait de dire qu'il faut bien construire des systèmes efficaces collectivement, et (…) le fait d'essayer de ne pas être complètement à la traîne dans la compétition économique, parce qu'il est clair que la Chine, qui n'a pas de limites sur l'utilisation de l'IA, prend un avantage économique colossal. (…) La question est 'est-ce qu'il y a un modèle alternatif que l'Europe pourrait promouvoir?' (…) L'option que je défends (…) c'est celle de la propriété privée des données personnelles", souligne l'essayiste.

J. B.