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Qui sont les gagnants et les perdants du RGPD?

Le logo de Google

Le logo de Google - Kimihiro Hoschino/AFP

L'entrée en vigueur ce vendredi du règlement européen sur la protection des données personnelles contraint toutes les entreprises. Mais certaines vont s'en tirer mieux que d'autres.

Le Règlement général sur les données personnelles est entré en vigueur ce 25 mai. Cette nouvelle loi applicable à tous les acteurs du numérique qui ont une activité en Europe a pour but de procurer au citoyen européen davantage de contrôle sur ses données personnelles. Même si pour le moment, il constate juste l'encombrement de sa boîte mail et le temps que prend la révision de tous les paramètres de confidentialité des sites et plateformes qu'il utilise.

Parmi les entreprises, grandes ou petites, les corporations, les fondateurs de sites, les prestataires, qui de leur côté ont dû se plier à un gros travail de mise en conformité ces dernières années, certaines vont en ressortir plutôt gagnantes, et d'autres vraiment perdantes. Tableau des résultats.

LES GAGNANTS

> Les avocats

Le RGPD concerne les données qu'ont les entreprises sur un large panel d'acteurs: fournisseurs, clients, partenaires, salariés, intérimaires, etc. Et le champ des données personnelles est extrêmement vaste: la loi évoque toute donnée qui permet d'identifier un individu de manière directe (sa photo, son nom) ou "pseudonymisée" (adresse mail, numéro de téléphone, adresse IP, voix, etc). De quoi propulser des tonnes d'entreprises dubitatives devant l'interprétation à faire des nouvelles normes, et apeurées par l'amende de 4% du chiffre d'affaires mondial en cas de non-conformité, aux portes des cabinets d'avocats.

> Google

L'Europe va sans doute passer au crible la façon dont Google applique le RGPD et le géant sera sans doute la principale cible des associations de défense de la vie privée. Mais Alphabet, sa maison-mère, a largement les ressources pour les affronter: des armées d'avocats, une trésorerie sans fond qui lui a permis de développer les systèmes de gestion du consentement exigés par la réglementation.

Et surtout, Google peut se servir du RGPD pour encore mieux assoir sa position de maître du jeu dans l'industrie de la publicité sur internet. Car le nouveau règlement prévoit que ceux qui ont un contact direct avec l'internaute, ceux qui peuvent donc lui demander directement l'autorisation d'utiliser ses données, puissent transmettre cette autorisation à des intermédiaires. À condition qu'ils les jugent dignes de confiance. Donc Google, qui bénéficie de cet accès direct, va pouvoir imposer ses vues à tous les intermédiaires qui n'ont pas de moyens d'entrer en contact avec l'individu qui surfe sur le web.

> Les très gros éditeurs de contenus comme Axel Springer

Les plus gros éditeurs ont eux aussi les moyens de se conformer à la RGPD, et de ne pas trop subir la pression des géants Google et Facebook. Comme ils disposent d'une grande variété de titres grand public et connus, ils peuvent se passer de l'audience qui transitent par les plateformes de ces géants. C'est le cas pour l'Allemand Axel Springer, aux puissantes marques comme les tabloïds allemands Die Welt et Bild, et les françaises Au féminin, Mylittleparis, Seloger.com, Marmiton, etc.

LES PERDANTS

> Les agences et vendeurs de technologies publicitaires

Pour eux, la donnée est le cœur du réacteur. Or ils n'ont pas d'accès direct à l'internaute pour lui demander de permission explicite d'utiliser ses données personnelles. Il faudra qu'ils aient développé des liens de confiance avec les gros éditeurs et les grosses plateformes afin qu'ils continuent de leur fournir des données.

Même si ces agences obtiennent ces autorisations par ricochet, à mesure que les utilisateurs vont verrouiller leurs paramètres de confidentialité, elles vont en récupérer de moins en moins. De grosses incertitudes pèsent ainsi sur l'avenir de Criteo, qui vend aux annonceurs du ciblage précis des internautes susceptibles d'acheter leurs produits. Le cours de bourse de l'ex-première licorne française fluctue dangereusement depuis six mois. Ses concurrents américains comme Verve et Drawbridge, eux, ont carrément quitté l'Europe à cause du RGPD, ont-il admis.

> Facebook

Le réseau social va continuer de générer énormément de trafic sur ses différents sites et applis, comme Whatsapp et Instagram. Mais le groupe encore empêtré dans l'affaire Cambridge Analytica risque de perdre une part de ses revenus issus de la récupération et de la revente des données de ses utilisateurs. Nul ne sait encore quelle part de ses 400 millions d'utilisateurs européens -près d'un tiers de son audience mondiale- va décider de verrouiller au maximum l'utilisation qu'elle peut faire de ses données personnelles pour du marketing.

N.G.