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Réseaux sociaux : révolutionnaire blockchain

L’une des premières applications à laquelle pense Facebook est de créer sa propre cryptomonnaie pour permettre à ses utilisateurs de réaliser des transferts d’argent.

L’une des premières applications à laquelle pense Facebook est de créer sa propre cryptomonnaie pour permettre à ses utilisateurs de réaliser des transferts d’argent. - Sous licence Creative Commons CC0

A l’heure ou des géants du web comme Facebook perdent des millions d’utilisateurs chaque année, d’autres réseaux sociaux voient leur communauté de contributeurs augmenter. Logique, leurs publications sont récompensées.

Imaginez. Vous naviguez sur votre réseau social préféré et décidez d’écrire un commentaire et/ou de partager une information. Parce que vous avez contribué d’une manière ou d’une autre à faire vivre le réseau en question, vous avez gagné le droit d’être financièrement remercié. Une idée qui pourrait sembler surprenante. Elle est pourtant bien réelle, grâce à la blockchain…

De fait, des réseaux sociaux qui ont opté pour ce business model, il en existe aujourd’hui des dizaines. C’est le cas de Steemit créé en 2016 et qui réunit en son sein pas moins de 1 million de contributeurs. Son principe : plus le contenu d’un contributeur obtient de votes positifs et de commentaires, plus le post en question génère de la valeur. Une valeur qui est ensuite transformée en monnaie virtuelle (en steem), puis en monnaie réelle. Ainsi, l’idée selon laquelle une contribution sur un réseau social pourrait être rémunérée ne se révèle en rien de fantaisiste. Et cela, Mark Zuckerberg, le co-fondateur et patron de Facebook, en a largement pris la mesure.

Contributeurs travailleurs

Voilà maintenant plus d’un an qu’il a annoncé en grande pompe accorder un intérêt tout particulier à la blockchain. En janvier 2018, il déclarait que Facebook allait étudier de près « les aspects positifs et négatifs de ces technologies, et la manière de les utiliser aux mieux ».

Une initiative que salue Vidal Chriqui, fondateur et directeur de BTU Protocol, spécialiste du Bitcoin. « Facebook ne vaut rien sans ses contributeurs. C’est ce que l’on appelle : le ‘User Generated Content’, ‘UGC’ (soit le ‘contenu généré par les utilisateurs’) », pointe le spécialiste. « Or, Facebook engrange aujourd’hui un chiffre d’affaires de 40 milliards de dollars. Lorsque l’on arrive à de tels revenus, il n’est plus question de parler d’UGC, mais plutôt d’UG’work’. Pourquoi ? Parce que la valeur et le travail sont fournis par les utilisateurs. Mais que le fruit de ce travail est ensuite récolté par Facebook. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Mark Zuckerberg se soit posé la question de la blockchain ».

Lucrative philanthropie

Mais si le PDG de Facebook a décidé de se pencher sérieusement sur le sujet, ce n’est pas tant dans le but de faire pareil si ce n’est mieux que les jeunes pousses qui tentent de se démarquer dans le monde ultra connecté des réseaux sociaux, mais bien parce que l’opération peut, en plus de cela, revêtir un double intérêt (financier).

« L’une des premières applications à laquelle pense Facebook est de créer sa propre cryptomonnaie pour donner à ses utilisateurs la possibilité de réaliser des transferts d’argent vers des pays du tiers monde. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un marché absolument gigantesque de plusieurs centaines milliards. Dans ces régions du monde, nombreuses sont les personnes à ne posséder ni pièce d’identité, ni compte bancaire, encore moins de carte de paiement. En revanche, elles ont Facebook ! Et leur permettre de réaliser des transferts d’argent à la manière de Western Union constituerait à peu de choses près une révolution, sinon un grand pas en avant », analyse Vidal Chriqui.

Sauf que derrière cette ambition on ne peut plus philanthrope, se cache un tout autre intérêt. Celui, pour Facebook, de s’adresser à une nouvelle communauté d’utilisateurs. Pourquoi ? Parce qu’entre réseau social où les utilisateurs ne sont pas payés pour leur contribution et un autre réseau social où ils le sont, il y a un monde. Du moins un business model totalement différent qui incite aujourd’hui Facebook à repenser sa stratégie et à accorder une attention toute particulière à la technologie blockchain. « Or, la blockchain a cette ambition mutualiste à laquelle Facebook est justement en train de se préparer » commente le patron de BTU Protocol.

Mutualiser pour fédérer

Il y a un an, Facebook constituait une équipe d’une cinquantaine de développeurs entièrement dédiés à cette technologie. Un cheminement que d'autres mastodontes à l’instar d’Instagram ou de Twitter auraient également intérêt à suivre. Car au-delà des réseaux sociaux, ce qui se joue actuellement c’est avant tout la survie d’un écosystème et plus largement celle des entreprises.

« Toutes les sociétés du monde ont besoin de clients et d’utilisateurs. Or la blockchain est une façon d’engager des utilisateurs. Le fait de les rémunérer est une bonne manière de les fidéliser et de générer une implication plus forte », commente Vidal Chriqui pour qui cette transition devrait « certes, prendre encore un peu de temps à se développer, mais Facebook l’a compris et commence à s’y préparer ».

Et lorsque l’on observe de près les revenus générés par des projets ayant recourt à la blockchain dans le secteur financier (100 milliards d’euros d’ici 2024 et 462 milliards en 2030, selon les dernières données du cabinet IHS Markit), on se rend compte qu’une entreprise qui passerait outre cette technologie, passerait, in fine, à côté de nombreuses opportunités.

Julie COHEN-HEURTON