BFM Business
Services

Thomas Rebaud (Meero): "si vous dépassez les 100 millions de levée, il faut faire un petit tour" aux Etats-Unis

Thomas Rebaud, Meero

Thomas Rebaud, Meero - -

Le fondateur de la licorne française, spécialisée dans la photographie professionnelle, revient sur les difficultés des start-up à trouver de l'argent pour grossir.

La problématique est connue. Si les start-up françaises ont de moins en moins de mal à réaliser un premier tour de table, le passage à l'étape supérieure est souvent plus délicat.

L'enjeu, c'est transformer l'essai avec de grosses opérations de sortie (ou "exits") comme des fusions-acquisitions ou des introductions en Bourse qui sont pour l'instant le talon d'Achille de la French tech. Le président de la République Emmanuel Macron doit d'ailleurs faire des annonces sur ce sujet ce mardi, à la veille de l'ouverture de la conférence France Digitale Day. Premier levier: le lancement du Next40, une liste des sociétés non cotées les plus prometteuses de la French tech, afin de leur donner de la visibilité à l'international et leur permettre de grossir plus rapidement. Parmi les sociétés choisies, on retrouve notamment Blablacar, Deezer, Sigfox, Meero ou encore Doctolib, comme le révèle BFM Business ce lundi.

Meero est l'illustration exacte de cette problématique. L’entreprise française, spécialisée dans la photographie professionnelle, a réalisé en juin son troisième tour de table et a levé 230 millions de dollars (208 millions d'euros). Il s'agit de la plus grosse levée de fonds de l’année en France et de la troisième la plus importante de l’histoire de la French Tech derrière OVH (250 millions d'euros en 2016) et Parrot (300 millions d'euros en 2015).

Avec cette levée, Meero a rejoint le clan des "licornes", ces entreprises non cotées valant plus d'un milliard de dollars. Mais comme beaucoup de start-up, Meero a dû aller du côté des Etats-Unis pour trouver des capitaux. Comme l'explique Thomas Rebaud, son co-fondateur, invité de l'émission Good Morning Business ce lundi sur BFM Business.

Un problème de profil de risque

"Que ce soit pour une sortie pour une entrée en Bourse ou pour une levée de fonds, si vous dépassez les 100 millions de levée, en général, il faut faire un petit tour côté territoire américain", explique Thomas Rebaud.

Comment inciter investisseurs, notamment institutionnels (banques, assureurs...), à mettre plus d'argent dans l'écosystème des start-up françaises? "Il y a un problème de profil de risque", souligne Thomas Rebaud. "Les assurances-vie, je ne sais pas si vous, en tant que particulier (...), vous avez envie que cette assurance-vie investisse dans des start-up (...). Parce qu'il y a un taux de défaillance qui est quand même très élevé. Donc je ne sais pas si toquer à la porte des assurances-vie est pertinent. Ou alors il faudrait qu'on les oblige dans leurs portefeuilles d'actifs (qu') ils préviennent les investisseurs particuliers, que vous êtes vous et moi, qu'une partie de leur argent va sur un profil de risque". Autrement dit, que le capital investi n'est pas garanti et que vous pouvez perdre votre mise de départ.

Pour autant, l'entrepreneur estime que la situation évolue dans le bons sens. "Il y a trois ans, une série A, donc un premier tour d'investissement qui était plutôt correct, plutôt bon, c'était un million (d'euros). Aujourd'hui, vous faites une levée de fonds série A d'un million, c'est pas excellent. (...) (Désormais), on est sur des séries A qui vont entre 5 et 10 (millions) assez fréquemment, des séries B qui sont entre 10 et 25 (millions)", détaille Thomas Rebaud. "Ca veut dire quoi? Ca veut dire que l'argent a quand même commencé à rentrer en France, notamment parce que les fonds étrangers également regardent la France, ce qui n'était pas le cas auparavant. Vous allez aux Etats-Unis maintenant, la seule question qu'ils vous posent, c'est 'quelles sont les nouvelles boîtes sympas en France'. Alors qu'il y a trois ans on ne vous regardait pas. (...) Ca prend le bon chemin".
Olivier CHICHEPORTICHE