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Défiscalisation : comment éviter les erreurs ?

Outre l’emplacement du bien, il faut s’interroger sur le prix au mètre carré, l’évolution économique et démographique de la ville et les rendements issus de l'investissement locatif.

Outre l’emplacement du bien, il faut s’interroger sur le prix au mètre carré, l’évolution économique et démographique de la ville et les rendements issus de l'investissement locatif. - Pixabay

Les Français s’acquittent, chaque année, de milliards d’euros d’impôt sur le revenu. Pour tenter de réduire la douloureuse, effectuer un certain nombre d’investissements peut se révéler judicieux. A condition de s’y employer dans le cadre d’une véritable stratégie patrimoniale…

En 2018, les contribuables Français ont payé 73,8 milliards d’euros d’impôt sur le revenu. Un chiffre qui se révèle, certes, un peu moins élevé que l’année précédente (74,1 Mds en 2017), mais qui n’en reste pas moins particulièrement conséquent. Aujourd’hui, 6 Français sur 10 ne sont pas imposables compte tenu d’un revenu global trop faible. La contrepartie, c’est que les ménages soumis à l’imposition le sont chaque année un peu plus.

Aussi, le fait d’investir en vue par exemple de bénéficier de rendements locatifs, mais surtout de profiter de déductions ou de réductions d’impôts peut se révéler particulièrement tentant. Le problème, c’est qu’effectuer des placements, notamment immobiliers, en vue de défiscaliser n’est pas sans risques. Si le produit d’investissement n’est pas sélectionné avec soin au regard du patrimoine et de l’appétence au risque de l’épargnant, la ristourne fiscale espérée peut, au mieux, être revue à la baisse, au pire, constituer une opération nulle. Bref, défiscaliser pour défiscaliser ne serait pas forcement la panacée.

Et cela, Marcelina Stark, Directrice Associée au sein du Groupe Angelys (une société indépendante spécialisée dans la restauration et la réhabilitation d’immeubles anciens en centre-ville) le constate régulièrement.

« En France, il y a environ 50% de la population qui se situe dans la tranche d’imposition à 14% et 30% qui ne paie pas d’impôt. C’est tout simplement énorme. Si l’on se penche d’un peu plus près sur la question, cela revient à dire qu’en moyenne les Français gagnent entre 20 et 25 000 euros par an. Non seulement, c’est un salaire qui s’avère faible, mais en plus cela implique qu’une part relativement importante de la population doit compenser. Aussi, le fait de réfléchir à une stratégie patrimoniale peut être judicieux ».

>> Défiscalisation immobilière : téléchargez le guide Loi Pinel de BFM Immo

Ne pas se poser les questions de base

Selon l’experte, il est clair qu’avant tout investissement immobilier, que celui-ci soit défiscalisant ou non, il convient de mener une réflexion préalable. Outre l’emplacement d’un bien dans le cadre d’un investissement locatif par exemple, il faut s’interroger, rappelle-t-elle, sur « le prix au mètre carré, l’évolution économique et démographique de la ville où se situe le bien, les rendements issus de l’investissement locatif… Il s’agit de critères lambda que tout investisseurs doit d’observer ».

Défiscaliser pour défiscaliser

Le fait est que ces précautions de base sont loin d’être les seuls points à considérer. Pour Marcelina Stark, « un investissement dans un but fiscal ne peut être envisagé uniquement sous cet angle ».

Pourquoi ? Parce qu'« on se rend compte que de nombreux contrats sont signés en fin d’année. En France, c’est le paiement de la part d’impôt de l’année N qui est générateur de défiscalisation si bien que l’on constate très souvent que 90% des contrats immobiliers sont signés entre septembre et décembre. Le fait générateur de l'économie d'impôt est bien le paiement des travaux avant le 31 décembre mais seulement dans le cadre des dispositifs Malraux, Déficit foncier et Monument historique. En Pinel, ce n'est pas le cas. La réduction ou la déduction d'impôt ayant lieu lors de la livraison du bien ».

« Or », poursuit-elle, « pour investir dans un bien immobilier, il faut avant tout se poser des questions concernant l’investissement en lui-même. Il ne faut pas seulement penser au gain fiscal de l’opération. Surtout que chaque dispositif fiscal (Malraux, Pinel, Monuments historiques, LMNP, etc.) a des contraintes juridiques et économiques. En investissant au dernier moment, avant la fin de l’année, on n’a pas toujours le temps de bien mesurer l’intégralité des paramètres. Quelles sont les garanties ? Quelles plus-values peut-on espérer générer ? Quid de la stabilité financière du promoteur immobilier ? Toutes ces questions doivent trouver des réponses avant chaque investissement si bien que la défiscalisation ne peut constituer une fin en soi ». 

Ne pas diversifier

De la même manière que le fait de diversifier ses placements financiers et immobiliers se révèle judicieux pour contenir les risques, diversifier ses investissement défiscalisants est une stratégie qui se révèle souvent pertinente.

Pour quelle raison ? Parce que de cette diversification découle la rentabilité globale d’un portefeuille. Résultat : plus de placements il y a, plus les rendements issus de ses placements et les ristournes fiscales associées peuvent être conséquents.

C’est en tout cas ce que préconise Marcelina Stark. Laquelle rappelle que « les Français ont historiquement une appétence toute particulière pour les vieilles pierres. Ils adorent investir avec une rentabilité, hors défiscalisation, dans les produits financiers tout comme dans la pierre. A la différence près cependant que ceux qui réalisent des placements financiers sont ceux qui disposent à l’instant T de fonds propres, tandis que ceux qui réalisent des investissements immobiliers sont les plus souvent des personnes qui investissent à long terme ». 

La jouer perso

Comme souvent en matière de stratégie patrimoniale, la situation peut se révéler complexe. Aussi, l’idée de se faire accompagner par un conseil en gestion de patrimoine (CGP) est tout sauf dénué d’intérêt. « Les CGP ont l’avantage d’étudier les montages patrimoniaux de manière globale. Ils réfléchissent à comment répartir les investissements entre le financier et l’immobilier », souligne la Directrice Associée d’Angelys.

S’inscrire dans une posture 100% défensive

Enfin, si le fait de miser sur une approche défensive pour structurer son patrimoine et se poser les bonnes questions est recommandé, il ne faut pas omettre l’idée que le patrimoine en question peut aussi être dynamisé. Notamment sur le volet immobilier.

« Le fait de mélanger plusieurs régimes avec le Malraux au travers d’un seul investissement peut permettre d’effacer la base d’optimisation restante. Il s’agit d’un levier extraordinaire pour en maximiser l’efficacité. Mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. En France, les contribuables paient certes beaucoup d’impôts mais il existe aussi de fantastiques instruments d’optimisation fiscale que les épargnants ne connaissent pas forcément », conclut l’experte.

Au final, le fait d’investir en vue de défiscaliser constitue peut-être une fin en soi, mais ne doit pas être l’unique point à considérer. L'idée de ne se concentrer que sur cet aspect apparaît comme une erreur. Le risque premier étant de ne pas miser sur les bons produits d’investissement et de perdre plus que le crédit ou la déduction d’impôt escompté.

Julie COHEN-HEURTON