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Avec son protectionnisme pur et dur, Trump met l'OMC au pied du mur

Donald Trump lors de son premier discours face au Congrès le 28 février.

Donald Trump lors de son premier discours face au Congrès le 28 février. - JIM LO SCALZO / POOL / AFP

Lors de son discours devant le Congrès, le président américain a réitéré sa volonté de mettre en place des mesures protectionnistes de grande ampleur. Quitte à agiter la menace d'une sortie des États-Unis de l'Organisation mondiale du commerce.

Donald Trump semble bien décidé à se détacher des règles internationales de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Mardi soir, face au Congrès, le président américain a réaffirmé sa volonté de donner la priorité aux États-Unis en faisant passer les lois et entreprises américaines avant toute réglementation émanant d’organismes internationaux.

À ce titre, l’ancien magnat de l’immobilier a réitéré sa promesse d’alléger le montant des impôts qui pèsent sur les entreprises nationales. Il a également indiqué vouloir imposer des taxes sur les importations de produits étrangers pour protéger les industriels américains. Des mesures qui semblent finalement peu compatibles avec le principe fondateur de l’OMC qui veut que les exportations de chaque pays membre bénéficient d’un traitement équitable sur les marchés extérieurs. De la même manière que ses importations doivent profiter du même traitement sur le marché intérieur.

L'OMC prise pour cible

Il faut dire que Donald Trump n’a jamais caché sa défiance vis-à-vis de l’organisation régissant le commerce mondial. Déjà en juillet dernier, le président américain affirmait vouloir "renégocier ou sortir" de l’OMC, qualifiant ses accords commerciaux de "désastre". Cette fois, l’administration Trump est allée plus loin en couchant ses plans sur le papier dans un rapport relatif à la politique commerciale révélé par le Financial Times. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que son contenu sonne comme un véritable pied de nez à l’institution de Genève.

Le rapport rappelle dans un premier temps que l’indépendance est "un principe de base" des États-Unis et que les citoyens sont soumis "à des lois et des règlements pris par le gouvernement" et non "par des gouvernements étrangers ou des organismes internationaux".

"En conséquence, l’administration Trump défend ardemment la souveraineté américaine sur les questions de politique commerciale" ajoute le rapport. L’OMC fait également l’objet d’une profonde remise en cause. Clairement cité, l’édifice du commerce international est notamment accusé d’avoir imposé un système dysfonctionnel favorisant l’essor de la Chine et des autres économies émergentes, en pénalisant dans le même temps les travailleurs américains.

Faut-il dès lors s’attendre à une sortie pure et simple des États-Unis de l’OMC, ou à une profonde renégociation? Difficile à dire, mais il est certain que Donald Trump souhaite bousculer le système en place en se détournant des règles établies. "Le président Trump a appelé à une nouvelle approche, et l'administration de Trump va tenir cette promesse" précise le rapport avant de poursuivre: "Il est temps d'adopter une approche plus agressive." 

Envisager tous les leviers possibles

Le Département du Commerce étudie déjà la possibilité d’échapper aux règles de l’OMC et notamment de l’ORD, son organe de règlement des différends, en cherchant tous les leviers légaux possibles pour ouvrir les marchés étrangers aux produits américains, appliquer légalement des sanctions commerciales et éviter la saisine de l’ORD par les autres pays membres.

Parmi les outils disponibles, le rapport cite le "super 301", un article de la loi commerciale américaine qui permet aux États-Unis d’interdire à la fois les importations gênantes mais également de menacer de sanctions les pays partenaires dont les marchés seraient trop fermés aux produits américains. Le recours à cet article par Washington serait une première depuis la création de l’OMC en 1995.

Une sortie des États-Unis de l’organisation de Genève porterait un coup terrible à la crédibilité de l’institution et signerait probablement sa lente dislocation. D'autant que les États-Unis, à travers leur puissance commerciale et politique, font partie des acteurs essentiels à l'OMC. Classé deuxième derrière la Chine, le pays pèse plus de 8% du commerce international en matière d’exportations. Il se classe au premier rang pour ses importations qui représentent plus de 12% du total, selon les chiffres de l'OMC.

Paul Louis