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Baisse de taux, prêts aux PME… L'arsenal dont dispose la BCE pour faire face au coronavirus

Pressée d'agir face à l'épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait dégainer jeudi une série de mesures afin de calmer les marchés financiers et soutenir les secteurs les plus touchés.

C'est l'heure de vérité pour Christine Lagarde. Aux manettes de la Banque centrale européenne (BCE) depuis novembre, la présidente de l'institution monétaire s'apprête à présenter une série de mesures pour tenter de limiter les conséquences du coronavirus sur les pays de la zone euro.

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Voici les principales actions possibles parmi l'arsenal dont dispose la BCE:

- Baisser les taux

Comme la BCE maintient son principal taux à zéro depuis mars 2016, elle ne dispose pas des marges de manoeuvre de la Réserve fédérale américaine, qui vient de descendre le sien de 0,5 point pour le porter dans une fourchette de 1% à 1,25%.

Mais les gardiens de l'euro pourraient abaisser leur "taux de dépôt", qui s'applique aux liquidités que les banques choisissent de leur confier faute de les distribuer sous forme de crédits.

Déjà négatif, à -0,50%, ce taux pourrait être porté à -0,60%, tout en laissant la possibilité de nouvelles baisses, pour inciter encore plus fortement les banques à prêter aux ménages et aux entreprises.

- Soulager les banques

Consciente que ce taux négatif rogne les marges des banques, la BCE exonère une partie des liquidités en excès, selon un système dit "two-tier" inauguré en septembre et élargi en novembre.

Selon Eric Dor, de l'Institut d'économie scientifique et de gestion, l'institution monétaire pourrait encore relever la proportion des dépôts dispensés de ce prélèvement. Il pourrait désormais représenter "dix" fois les réserves obligatoires constituées par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients, contre "six" actuellement.

La mesure profiterait principalement aux banques allemandes et françaises, aujourd'hui les plus pénalisées par les taux négatifs.

- Soutenir les PME via des prêts

Depuis octobre, la BCE mène sa troisième campagne de prêts géants aux banques (dits TLTRO), à des taux très avantageux, à condition que les banques prêtent à leur tour aux ménages ou aux entreprises.

Comme elles empruntent au niveau du taux de dépôt, soit -0,50%, les banques recourant au TLTRO sont de fait rémunérées par la BCE quand elles prêtent de l'argent.

Il semble difficile d'assouplir encore ces conditions à quelques jours d'une nouvelle vague, mais la BCE pourrait concevoir un nouveau type de prêts ciblant "les entreprises non financières les plus touchées par la crise", en particulier les PME, selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

- Augmenter les rachats de dette

La BCE a réactivé depuis novembre ses rachats de dette publique et privée, sa puissante arme anti-crise baptisée "QE" ("quantitative easing", ou "assouplissement quantitatif"), déjà déployée entre mars 2015 et fin 2018. L'institution détenait fin février 2.623 milliards d'euros de dettes à son bilan, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Mais le conseil des gouverneurs de la BCE était apparu divisé comme jamais en septembre, au moment de décider la reprise de ces rachats de dette à raison de 20 milliards d'euros par mois.

La BCE pourrait toutefois augmenter le rythme de ses achats, à 30 milliards par mois selon les observateurs, en accentuant par exemple la part de la dette d'entreprise rachetée.

Elle pourrait aussi modifier les règles qui limitent le rachat de dette souveraine, voire envisager le rachat de dette ou d'actions de banques si la crise s'aggrave, avance Florian Hense, analyste chez Berenberg.

Mais la contestation n'est pas près de s'éteindre en Allemagne, où la Cour constitutionnelle doit se prononcer le 24 mars sur la validité du "QE". Des eurosceptiques veulent faire établir qu'à travers cet outil, la BCE viole l'interdiction de financer directement les Etats.

JCH avec AFP