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Bourse: les leçons de la secousse

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Analyse d'une semaine de secousses violentes, vécue en direct dans Intégrale Bourse

L'image de la marée descendante est un grand classique de la vie des marchés, elle illustre encore parfaitement la période actuelle de fin de cycle : les banques centrales (la Fed américaine en tête) profitent d'une croissance à un stade avancé mais jugée encore suffisamment solide pour retirer une partie des tombereaux de liquidités injectées dans le système financier depuis près de 10 ans.

Chute des valeurs stars

C'est dans ce climat qu'un événement redouté a fini par se produire cette semaine : la chute des valeurs stars. Ou plus précisément, la remise en cause par le marché de la valorisation de ces entreprises emblématiques par leur taille, leur croissance, leurs profits et leur surperformance boursière exceptionnelle. Bon nombre d'entre-elles ont subi des décrochages d'une rare violence en quelques heures seulement. Amazon, Netflix, Apple, Google aux Etats-Unis, Kering, Hermès, LVMH à Paris accusent ces derniers jours des pertes de 5 à 10% et plus. Certes, sur un graphique de long terme ces secousses sont à peine visibles. Elles marquent néanmoins l'essoufflement a minima et peut-être même la fin temporaire d'une logique de marché qui a permis de porter ces valeurs au firmament, en délaissant au passage des pans entiers de la cote.

L'exemple de LVMH est frappant : 10% de croissance organique des ventes au 3ème trimestre reste dans l'absolu une performance impressionnante. Sauf que cette croissance était de 14% en début d’année et que les investisseurs n'ont eu de cesse d'intégrer "le prix de la perfection" dans la valorisation de ces entreprises. Dans ces conditions là, une performance de 10% apparaissait comme une déception, et dans ce climat incertain, elle a été très lourdement sanctionnée, les investisseurs en profitant pour prendre leurs bénéfices, c'est à dire récupérer une partie de leurs gains considérables de ces derniers mois, et se mettre en position de saisir d'autres opportunités. C'est sans doute le même raisonnement qui peut être appliqué à la Tech américaine. Quand deux valeurs, Netflix et Amazon, portent à elles seules, pendant des mois, un indice qui comporte 250 valeurs, il est assez légitime de voir les investisseurs commencer à les vendre. 

Un 5ème set sans tie-break

L'heure d'une nouvelle grande crise de marché a-t-elle pour autant sonné? Ceux qui l'attendent depuis des années trépignent d'impatience et se font plus bruyants. Sans doute leur (bref) moment de gloire reviendra-t-il, mais peut-être devront-ils patienter encore un peu. Le problème des fins de cycle, c'est qu'elles peuvent s'éterniser.

Le grand gestionnaire de fonds Pimco utilise l'image tennistique d'un 5ème set sans tie break, qui peut durer en théorie indéfiniment en l'absence d'excès et d'erreurs politiques majeures. Quitter trop tôt le bain des marchés boursiers est le piège que tout le monde cherche à éviter aujourd'hui, et il est indispensable pour cela de trouver de nouveaux espoirs de performance afin d'assurer un relais avec les stars d'hier.

Mais regardons les inconnues macro-économiques sur lesquelles les marchés s'interrogent: est-il absurde de penser que la croissance mondiale va décélérer d'un cran mais pas s'effondrer? que le couple Trump/Powell (président de la banque centrale américaine) va trouver le meilleur compromis possible afin de piloter la normalisation à venir de l'économie américaine? Que la Chine va mettre en place des moyens suffisants pour contrer à court terme le ralentissement? Que le climat de guerre commerciale durable ne va pas se dégrader au-delà des limites déjà franchies? Qu'un accord sur le Brexit sera finalement trouvé? Que Rome et Bruxelles vont sortir par le haut de leur bras de fer? Oui, la liste des conditions à remplir pour se convaincre que le moment de mettre les voiles n'est pas encore venu, est longue. Mais aucune de ces conditions ne semblent totalement insurmontable (certaines de ces inquiétudes se sont d'ailleurs déjà un peu apaisées).

C'est bien en franchissant, une fois encore, ce nouveau "mur des craintes" que le marché pourra étendre quelques temps encore son cycle de hausse historique en reconsidérant avec un oeil nouveau certains secteurs et valeurs trop longtemps délaissés.