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Bourse : Quand le nationalisme s'invite sur les marchés

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Les marchés boursiers ont subi de nombreuses secousses ces dernières semaine.

Les marchés financiers des différents pays vivent toujours au rythme de Wall Street. La mode du Black Friday a traversé l’Océan atlantique et n’a pas pâti de la grogne des gilets jaunes qui demandent une baisse du prix de l’essence pour justement consommer davantage. La question est de savoir si Thanksgiving a conclu une période d’ajustement des marchés ou marque-t-il une rupture dans le processus de valorisation des actions. En raison justement de Thanksgiving, la semaine dernière, les marchés américains ont tourné au ralenti.

Pour autant, es investisseurs présents ont continué à juger sévèrement les valeurs technologiques. Apple a enregistré vendredi sa quatrième séance de baisse d'affilée (et la neuvième en onze). La marque à la pomme a perdu 20 % de sa valeur depuis le début du mois de novembre. Cette valeur était jugée par de nombreux analystes surévaluée. Apple dépend de plus en plus d’un seul produit qui lui offre de confortables marges mais qui subit la concurrence de modèles chinois ou coréens.

Les marchés au-delà de la correction des valeurs technologiques commencent à intégrer un changement de rapport de force entre actions et obligations. Dans quelques jours, la FED devrait procéder à sa quatrième hausse de l’année. Les anticipations jouent donc contre les actions. En une semaine, le Dow Jones a perdu près de 4,5 % et le Nasdaq un peu plus de 4 %. Ce dernier indice a reculé de 7 % depuis le 1er novembre. Il n’est pas non plus sans lien avec les sanctions commerciales engagées contre la Chine. Les entreprises technologiques pourraient voir leurs ventes reculer en Chine et subir des hausses de coûts sur les biens intermédiaires entrant dans la composition de leurs produits.

La bourse de Paris et celle de Tokyo ont été touchées par l’affaire Carlos Gohn. Au-delà des considérations fiscales et éventuellement judiciaires de cette affaire, force est de constater que la malédiction du « numéro 1 » a encore frappé.

Quand l’Alliance Renault - Nissan avait ravi au Groupe Volkswagen la place de premier producteur mondial de voitures de tourisme, plusieurs articles de presse avaient fait mention que ce titre ne portait pas chance. Les précédents constructeurs ayant occupé ce rang ont, en effet, connu quelques déboires. Toyota qui avait dépossédé General Motors de son titre en 2008, a rapidement été confronté à une série de problèmes de fiabilité. L’affaire avait commencé par un banal accident de voiture durant l'été 2009 occasionnant le décès d’une famille, roulant dans une Lexus à San Diego, en Californie. Le tapis de sol est mis en cause, mais aussi le système de freinage. Puis viennent s'ajouter d'autres incidents et des problèmes sur les boîtiers de vitesse. Cette triste affaire conduit Toyota à rappeler, entre novembre 2009 et février 2011, plus de 16 millions de véhicules dans le monde. En 2015, Volkswagen devient le premier constructeur mondial, année durant laquelle intervient le scandale concernant les moteurs diesel. La manipulation d’un logiciel permettant le contrôle des émissions de CO2 et de polluants obligea Volkswagen à effectuer des centaines de milliers de rappels d’automobile. Le groupe devra payer plusieurs milliards d’euros en indemnités et en amendes. Deux ans plus tard, Renault - Nissan dépasse la firme allemande.

Les marchés ont vivement réagi après l’arrestation de Carlos Gohn qui portait l’Alliance sur ses épaules. Si les craintes d’une remise en cause des liens entre Renault et Nissan ont été exprimées par de nombreux experts, certains estiment que cette affaire devrait permettre une clarification et un rééquilibrage des pouvoirs pouvant s’avérer positif pour les investisseurs. L’Etat français devra en particulier préciser ses intentions, céder sa participation ou la conserver, ce qui est également attendu.

Les marchés regardent de plus en plus près l’évolution des cours du pétrole. Après avoir dépassé, de manière fugace, la barre des 80 dollars, le baril de pétrole Brent est tombé en-dessous des 60 dollars, vendredi 23 novembre, pour la première fois depuis plus d'un an. Depuis le mois d’octobre, le pétrole a perdu 30 % de sa valeur.

Cet accès de faiblesse est lié tout à la fois au ralentissement économique de plusieurs pays et à l’évolution de l’offre, l'Arabie saoudite ayant annoncé que sa production serait à nouveau en hausse en novembre après avoir atteint près de 11 millions de barils en octobre, un niveau proche de ses records. Malgré tout, l’Arabie saoudite a confirmé qu’elle réduirait sa production de 500 000 barils jours au mois de décembre afin de peser sur les prix. L'OPEP dans son ensemble pourrait annoncer un million de barils en moins lors de la prochaine réunion du cartel à Vienne le 6 décembre prochain.

Cette offre abondante intervient au moment où la demande américaine augmente moins vite. Les stocks de brut aux Etats-Unis ont progressé pour la neuvième semaine consécutive.

La baisse des cours ne fait pas l’affaire des valeurs pétrolières et financières. La variation rapide des prix du pétrole contribue à la volatilité accrue des marchés et rend très difficile les prévisions sur l’évolution des indices dans les prochains mois. Certes, une hausse des cours est attendue en décembre après les reculs d’octobre et de novembre. Pour Paris, l’année 2018 pourrait ne pas être blanche que sur le plan fiscal, elle pourrait l’être également sur le plan boursier.

Philippe CREVEL