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Brexit : l'Irlande du Nord menace de faire capoter les négociations

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- - AFP - BEN STANSALL

Le différend sur l'Irlande du Nord est en passe de faire échouer les très complexes négociations du divorce réclamé par le Royaume-Uni. Michel Barnier a averti que l'Union européenne devaiit se préparer à une « douloureuse séparation ».

Dans une semaine, les dirigeants de l'UE vont se retrouver à Bruxelles pour un sommet qualifié de "moment de vérité" pour le Brexit et aucun accord n'a pour l'instant été trouvé entre Londres et ses partenaires sur le moyen de faire contrôler par les douanes de l'UE les biens transitant par la province britannique d'Irlande du Nord.

"Un non-accord n'a jamais été notre scénario mais nous devons nous y préparer", a prévenu le Français devant des chefs d'entreprise européens réunis au Parlement européen à Bruxelles.

"Le 29 mars 2019, soit dans six mois, le Royaume-Uni quittera l'Union européenne, le marché unique et l'Union douanière. Nous avons réalisé de bons progrès pour un retrait ordonné, mais plusieurs questions épineuses demeurent, notamment le moyen d'éviter la création d'une frontière entre l'Irlande et l'Irlande du Nord", a-t-il expliqué. Le paradoxe est que les Irlandais du Nord se sont majoritairement prononcés contre le Brexit.

Or le divorce va imposer des contrôles administratifs entre la Grande-Bretagne et l'Irlande du Nord, car ce qui viendra du Royaume-Uni en Irlande du Nord arrivera également sur le marché unique européen par l'Irlande, a-t-il affirmé. Une situation inacceptable pour le gouvernement britannique. 

Un des partisans du Brexit, l'ancien chef de la diplomatie Boris Johnson, s'est aussitôt saisi des propos de Michel Barnier pour accuser la Première ministre britannique Theresa May de négocier un accord qui va faire du Royaume-Uni "une colonie de l'Union européenne".

"L'Union européenne est attachée à l'intégrité territoriale du Royaume-Uni, mais le Royaume-Uni doit respecter le marché unique européen qui comprend l'Irlande", a insisté Michel Barnier.

"L'Union européenne propose de réaliser des contrôles de la manière la moins intrusive et éviter les contrôles physiques. Les entreprises du Royaume-Uni devront remplir des déclarations de douane en ligne quand elles voudront envoyer des biens en Irlande du Nord. Les camions et les conteneurs seront scannés à bord des ferries et des porte-conteneurs comme cela se fait entre l'Espagne et les îles Canaries", a-t-il expliqué.

"Des contrôles seront également réalisés pour les biens industriels dans les locaux des entreprises en Irlande du Nord et pas aux frontières", a-t-il ajouté.

Perdant-perdant

"Restent les contrôles sanitaires et phytosanitaires, qui devront être réalisés aux frontières pour des motifs de sécurité alimentaire et de santé animale. L'Irlande doit rester une zone épidémiologique unique. Des contrôles sont déjà effectués dans les ports, mais avec le Brexit, il y aura un changement d'échelle et ils devront concerner 100% des animaux vivants et non 10% comme aujourd'hui", a-t-il dit.

Theresa May participera la semaine prochaine au sommet européen. Elle devrait expliquer sa position à ses partenaires puis quitter le bâtiment du conseil avant le diner de travail consacré au Brexit auquel elle ne peut pas participer.

La chancelière allemande Angela Merkel a souligné mercredi qu'il y avait eu des "progrès" dans les négociations sur le Brexit, tout en avertissant que "le diable est dans les détails".

"J'espère qu'il y aura des progrès la semaine prochaine. Nous sommes contents qu'il y ait des discussions intenses mais le diable est dans les détails", a-t-elle averti au cours d'une conférence de presse avec le Premier ministre néerlandais Mark Rutte à La Haye.

Les 27 attendent de Theresa May des propositions pour trouver un accord pour l'Irlande du Nord, mais sa marge de manœuvre est très réduite et ses négociateurs n'ont encore rien présenté pendant les réunions avec Michel Barnier.

Le parti ultra-conservateur nord-irlandais DUP, dont Theresa May dépend pour sa majorité, a menacé de rejeter le budget si elle fait trop de concessions à l'Union européenne, a déclaré à l'AFP une source au sein du parti.

"Nous n'avons pas choisi le Brexit, ce sont les Britanniques qui l'ont choisi. Nos propositions sont destinées à aider le Royaume-Uni à en assumer les conséquences négatives", a rappelé Michel Barnier.

"La séparation est difficile comme tous les divorces, et nous souhaitons qu'elle soit ordonnée. Le Brexit n'a aucune valeur ajoutée. C'est une situation perdant-perdant", a-t-il insisté.

"J'ai rencontré les dirigeants de tous les partis politiques en Irlande et je suis prêt à les rencontrer à nouveau", a-t-il conclu.

La rédaction avec AFP