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Businessman et président, Trump pourra-t-il éviter les conflits d'intérêt?

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- - CHIP SOMODEVILLA GETTY IMAGES NORTH AMERICA - AFP

Au travers du conglomérat The Trump Organization qu'il dirige, le futur président des États-Unis a noué de nombreuses relations commerciales, ce qui pose déjà la question d'une éventuelle interférence dans ses décisions. Mais comment va-t-il concilier business et politique, et que dit la loi? Explications.

Donald Trump va-t-il réussir à éteindre la polémique née après son élection? Le futur 45e président des États-Unis, devenu dans la nuit du 8 au 9 novembre 2016 le premier milliardaire à être élu à la Maison Blanche, fait face aujourd’hui à de tenaces soupçons de conflits d’intérêt. "Son empire financier devrait poser un problème éthique sans précédent dans l'histoire de la constitution américaine", alertait la semaine dernière le journal The Scotsman avant les résultats du vote, se demandant justement ce qu'allaient devenir les activités du futur président en Écosse. Il faut dire que l’homme d’affaires est à la tête d’un véritable empire immobilier constitué d’un enchevêtrement de relations, ce qui pose la question d'une éventuelle interférence dans les décisions du futur dirigeant de la première puissance mondiale. Au travers de son conglomérat The Trump Organization, le magnat possède notamment des terrains de golf, des hôtels de luxe, des immeubles de bureaux, des tours résidentielles ou encore des villas. Il estime lui-même sa fortune à plus de 10 milliards de dollars, loin des 3,7 milliards avancés par le magazine Forbes.

Problème: pour financer ses ambitieux projets, Trump a emprunté beaucoup d’argent à la Deutsche Bank, actuellement dans le viseur de la justice américaine pour pratiques illégales. Le département US de la Justice (DoJ) réclame en effet 14 milliards de dollars (13 milliards d’euros) au géant allemand pour clore son enquête liée à la crise des "subprimes". Depuis 1998, la banque aurait prêté au moins 2,5 milliards de dollars à des sociétés affiliées à l’élu américain, révélait le Wall Street Journal en mars dernier. L’un de ses plus gros emprunteurs, qui plus est futur locataire de la Maison Blanche, pourrait être tenté de voler à son secours. Ne serait-ce que pour préserver ses intérêts personnels. D'ailleurs, les marchés financiers l’ont compris. Le jour des résultats du vote, l’action Deutsche Bank pourtant malmenée depuis des semaines en raison de sa situation financière a subitement amorcé une franche reprise, si bien qu’elle a gagné près de 20% au cours des cinq dernières séances à la bourse de Francfort.

Ce que dit la loi américaine

Bien sûr, Trump pourrait céder une partie de ses activités ou créer une holding indépendante pour mettre fin à la polémique, comme l’ont déjà suggéré ses conseillers éthiques. Toutefois, la loi fédérale américaine n’interdit pas à un président américain d’entretenir des relations d’affaires avec des entreprises privées. Et comme le rappelle Le Monde, "la loi de 1978 sur l’éthique du gouvernement, qui avait été adoptée après l’affaire du Watergate, est très contraignante envers les membres du Congrès. Mais paradoxalement elle le reste beaucoup moins envers le président des États-Unis. Celui-ci est seulement tenu de refuser tout émolument d’une puissance étrangère". On peut aussi imaginer que les enfants du président, déjà bien impliqués dans les affaires de leur père, prennent progressivement la relève. Donald Jr., le fils aîné du milliardaire, n'est autre que le vice-président exécutif de la Trump Organization. Éric, son autre garçon, et sa fille Ivanka, dirigent la partie développement et acquisitions du groupe.

Donald Trump est souvent comparé à l'ancien Premier ministre italien Silvio Berlusconi, personnage charismatique et controversé ayant lui aussi largement fondé son succès politique sur la réussite de son business. Bien sûr, les Américains avaient déjà élu par le passé d’anciens dirigeants dotés d’une expérience managériale, à l’image de George W. Bush qui a fondé la compagnie pétrolière Arbusto Energy ou de Herbert Hoover (1929-1933) qui a dirigé une activité minière. Mais à la différence de Trump, ils avaient tous les deux fait de la politique avant d’accéder au pouvoir.

Julien Mouret