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Ce qu’il faut savoir sur le traité transatlantique

De nombreuses mobilisations contre le TTIP (appelé également Tafta) sont organisées partout en Europe.

De nombreuses mobilisations contre le TTIP (appelé également Tafta) sont organisées partout en Europe. - Raymond Roig - AFP

En réponse au scandale des écoutes, de nombreux dirigeants politiques proposent de suspendre les négociations en cours sur le traité transatlantique, aussi appelé Tafta. Mais le sujet s’avère complexe : explications.

Alors que le scandale des écoutes téléphoniques de la NSA ne désenfle pas, de nombreuses voix indignées s’élèvent au sein de la classe politique française. Beaucoup d’entre elles proposent, en réponse, de suspendre – voire annuler – les négociations sur le traité transatlantique (ou TTIP, ou Tafta). Voulu par les Etats-Unis et l’exécutif européen, cet éventuel accord de libre-échange inquiète. Voilà pourquoi.

> Pourquoi un traité transatlantique?

Toujours au stade de l’élaboration, le projet de traité vise à mettre en place une vaste zone de libre-échange entre les Etats-Unis et l’UE, qui concernerait plus de 800 millions de consommateurs. L’avantage, selon ses défenseurs, serait d’harmoniser les normes règlementaires de part et d’autre de l’Atlantique. Mais aussi de mettre un terme aux dernières barrières douanières, créant ainsi une zone commerciale plus compétitive, notamment vis-à-vis des pays émergents. La création d’un mécanisme indépendant destiné à régler les différends entre les Etats et les entreprises est également à l’étude.

> Que contient-il ?

C’est sur ce point que le bât blesse. Négocié dans l’opacité la plus totale par la Commission européenne et les représentants américains, ce traité échappe complètement aux citoyens, médias, et même aux parlementaires nationaux. Pour se justifier, les négociateurs bruxellois évoquent la nécessité de discuter en toute confidentialité, et ainsi protéger les intérêts européens. La Commission fait également valoir qu’au terme des négociations, l’accord devra être approuvé par le Conseil européen et le Parlement. Les anti-traité dénoncent, eux, un stratagème pour court-circuiter la démocratie et ne pas prendre en compte l’avis des peuples. Des efforts ont été déployés pour rendre le processus plus transparent, restant toutefois à la marge.

> Qui est pour ?

La Commission européenne, évidemment, défend ardemment ce projet. Devant les inquiétudes grandissantes en France (mais aussi dans les autres pays européens), elle met en avant les opportunités pour les entreprises tricolores, notamment celles dont les activités reposent sur l’export. Et ce qu’il s’agisse de l’industrie agro-alimentaire (notamment sur la levée de certains embargos, les procédures d’agrément, ou les appellations d’origine) ou des PME (levée des droits de douane et des barrières techniques). En outre, elle fait miroiter un impact positif sur la croissance française de l’ordre de 0,5%, une augmentation des salaires de 1,5% à 2%, et une hausse des exportations de 10%.

> Qui est contre ?

Outre le secret dans lequel sont menées les négociations, les détracteurs du traité mettent l’accent sur plusieurs aspects. D’abord, en ce qui concerne le rééquilibrage des normes entre les Etats-Unis et l’Europe, qui pourrait aboutir à une dérèglementation généralisée. Normes sociales, environnementales, OGM, pesticides, protection des données personnelles…les points d’interrogation sont nombreux, et le silence radio observé par Bruxelles –mais aussi par l’Elysée- ne manque pas d’alimenter les craintes. En outre, le recours à un arbitrage privé pour régler les différends entre entreprises et Etats inquiète : les multinationales verraient leur pouvoir renforcé, au détriment des Etats souverains. En France, le Front de gauche – qui déposé, en vain, une résolution pour stopper les négociations nationale le 22 mai dernier-, le FN et EELV se sont clairement prononcés contre le projet de traité. Quant à l’UMP et le PS, la discrétion semble être, là aussi, de mise. De nombreuses ONG se sont également mobilisées, et un collectif dénommé Soptafta a même été mis en place.

> Qui négocie ?

Le 14 juin dernier, les ministres européens du Commerce ont officiellement donné mandat à la Commission européenne pour négocier avec les Etats-Unis. A la tête de la délégation, le commissaire européen Karel de Gucht – par ailleurs soupçonné de fraude fiscale en Belgique- avait été mandaté pour traiter directement avec Washington. Au lendemain des élections européennes, c’est la Suédoise Cécilia Malmström, nouvelle commissaire chargée du commerce, sui lui a succédé.

> Quand doit-il entrer en vigueur ?

Officiellement, les négociations ont débuté en juillet 2013, et doivent aboutir en 2015. L’accord trouvé sera ensuite soumis à l’avis des différentes institutions européennes. Officieusement, les discussions durent depuis une dizaine d’années, ce qui laisse augurer d’un processus traînant en longueur.

> Quelle est son appellation officielle ?

Le traité transatlantique porte désormais le nom officiel de TTIP, pour Transatlantic Trade and Investment Partnership. L’appellation Tafta, (pour Transatlantic Free Trade Area), a finalement été abandonnée, car trop ressemblante au controversé traité ACTA, rejeté en 2012 par le Parlement européen.