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Ces"maîtres de l'univers" qui paient leur épouse en fonction de ses performances

Dans l'Upper east side, le plus huppé des quartiers New yorkais, la pratique des "bonus d'épouses" est répandue.

Dans l'Upper east side, le plus huppé des quartiers New yorkais, la pratique des "bonus d'épouses" est répandue. - Tina Leggio - Flickr - CC

Une anthropologue a étudié les us et coutumes dans le plus huppé des quartiers de New York. Elle y a notamment découvert que certains milliardaires attribuaient à leurs femmes des primes annuelles en fonction de leur bonne gestion du foyer.

Une Américaine formée à l'anthropologie va vivre avec sa famille dans le quartier le plus coté de Manhattan, l'Upper East Side, à New York. Elle y découvre un monde nouveau, qu'elle estime digne d'une enquête ethnologique poussée, enquête qui fera l'objet d'un livre dont elle raconte la genèse dans le New York Times de dimanche 17 mai.

Elle précise d'abord qu'elle a révélé à ses voisines qu'elle écrit un livre sur sa vie de mère dans ce haut-lieu de la gentrification. Celles-ci se déclarent désireuses de partager leur point de vue sur ce que l'on décrit "à bien des égards comme notre monde très bizarre", assure-t-elle.

La ségrégation sexuelle banalisée

Elle constate d'abord la ségrégation sexuelle qui a cours au cœur d'une ville communément considérée comme l'une des plus libertaires au monde. Elle relate par exemple comment les femmes ne sortent qu'entre elles, ou se rendent à des évènements avec leur conjoint, mais où maris et épouses dînent chacun à des tables différentes, dans des salles séparées. Une partition "par choix" disent-elles. Un choix que la sociologue compare à celui que revendiquent les femmes Dogon au Mali lorsqu'elles se rendent dans des "cases de menstruations".

Elle s'attarde surtout sur une pratique très étonnante concernant celles qu'elle appelle les Glam FAF (pour Femmes Au Foyer Glamour), des américaines très diplômées, extrêmement chics, apportant un soin très pointu à leurs tenues, même pour accompagner leurs enfants à l'école: "les primes d'épouses".

Elle gèrent leur maison comme des PDG

Ces "wife bonuses" sont octroyés par leurs puissants maris, majoritairement des gérants de Hedge fund ou de fonds de private equity. Il faut dire que leurs femmes, selon l'auteure de l'article, "gèrent leur maison comme des PDG".

La première fois qu'elle entend parler de ces bonus, la chercheuse est atterrée. A un café, elle entend une femme diplômée de commerce mais sans emploi, dire qu'elle attend sa "prime de fin d'année" pour s'acheter des vêtements. "Un sondage plus approfondi a révélé que la prime annuelle d'épouse n'était pas une pratique rare dans cette tribu", détaille l'auteure de l'article.

Ces bonus peuvent être mentionnés dans le contrat de mariage, et distribués sur la base non seulement des performances du fonds pour lequel travaille le mari, mais aussi sur la propre performance de l'épouse. C'est-à-dire la façon dont elle a géré le budget de la maison, si les enfants ont ou non intégré une bonne école. Sur le même principe que les banques d'investissement récompensent leurs meilleurs traders.

Une sphère sociale qui impose des dépenses faramineuses

Ces primes apportent un peu d'indépendance à ces femmes et leur permet d'intégrer une sphère sociale où il ne suffit pas d'aller déjeuner ensemble, mais "d'acheter une table à 10.000 dollars au cours d'un déjeuner de charité où une amie vous a convié".

Les femmes qui n'obtiennent pas ces primes plaisantent sur d'éventuelles mesures de performance sexuelle. Celles qui les ont reçus bottent en touche quand l'anthropologue les questionne. La preuve selon elle, qu'elle a affaire à un "tabou", une pratique culturellement chargée de sens.

La sociologue en conclut que les hommes riches et puissants ont beau parler de partenariat et de parité, en vertu de cet arrangement, leurs femmes dépendent entièrement d'eux. Ils peuvent octroyer ou non un bonus à leur épouse, mais ils ne peuvent lui offrir le sentiment de puissance qu'on obtient en étant celui qui chasse à l'extérieur du foyer. "Les épouses des maîtres de l'univers sont donc un peu comme des maîtresses: dépendantes et relativement impuissantes". 

Nina Godart
https://twitter.com/ninagodart Nina Godart Journaliste BFM Éco