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Ceta: la Wallonie "déçue", la signature toujours menacée

À trois jours de sa signature prévue, le Ceta ne convint toujours pas la Wallonie.

À trois jours de sa signature prévue, le Ceta ne convint toujours pas la Wallonie. - Georg Hochmuth - APA - AFP

La signature du traité de libre-échange UE-Canada prévue jeudi est plus qu'hypothétique. Les propositions transmises à la Wallonie pour la rassurer et obtenir son accord sur le texte ont "déçu" le chef de son gouvernement.

La signature prévue jeudi à Bruxelles du traité de libre-échange UE-Canada (CETA) semblait plus que jamais menacée dimanche par le non de la Wallonie qui a rejeté tout "ultimatum" de l'UE et s'est dite "déçue" par une nouvelle proposition visant à la rassurer.

"On nous remet un document décevant et parallèlement on nous donne un ultimatum. C'est très étonnant. Cela nous pousse à nous poser des questions sur le but poursuivi", a indiqué l'entourage du chef du gouvernement wallon, Paul Magnette.

Le pessimisme semble donc plus que jamais de rigueur. D'autant plus que0, en plus de Paul Magnette, le président du parlement de Wallonie, André Antoine a affirmé ce lundi matin sur la radio belge RTL qu'il ne serait "pas possible de respecter" l'ultimatum fixé par l'UE. 

La Wallonie rejette l'ultimatum

La Belgique est le seul des 28 pays de l'Union européenne qui se trouve dans l'impossibilité de signer le CETA, un accord concernant plus de 500 millions d'Européens, en raison du blocage de cette région francophone du sud de la Belgique de 3,6 millions d'habitants.

Le président du Conseil européen -qui représente les 28 États de l'UE-, Donald Tusk a donné dimanche à la Belgique jusqu'à lundi soir pour dire si oui ou non elle peut signer le CETA, ultimatum rejeté par la Wallonie qui bloque l'accord. Sans le feu vert de la Belgique, le sommet et la signature prévus jeudi à Bruxelles, en présence du Premier ministre canadien Justin Trudeau, seront annulés.

Annulation du sommet

Paul Magnette considère qu'un tel ultimatum "n'est pas compatible avec le processus démocratique", a déclaré son porte-parole. Il "a toujours refusé de s'installer dans un timing contraignant", a souligné le porte-parole.

"Demain après-midi/soir, Donald Tusk aura une conversation téléphonique" avec Justin Trudeau, "pour décider s'ils maintiennent le sommet", a détaillé une source européenne. "Concernant la date de jeudi, si la Belgique n'est pas en position de dire si elle peut garantir qu'elle va signer, il est très clair pour Donald Tusk que cela ne fait aucun sens d'avoir un sommet, et il n'y aura pas de sommet et pas de date fixée pour un nouveau sommet", a expliqué cette source.

Des concertations en Belgique

"Cette décision sera prise d'un commun accord entre Donald Tusk et Justin Trudeau", a-t-elle précisé. Elle "dépendra beaucoup de ce que le Premier ministre belge, Charles Michel, dira à Donald Tusk", a souligné cette même source. Avant de parler à Justin Trudeau, Donald Tusk aura eu une "conversation téléphonique avec Charles Michel, qui devra lui dire si la Belgique est en position de signer ou pas l'accord jeudi".

"Au niveau belge, des négociations sont en cours. Est prévue pour lundi après-midi une réunion du 'comité de concertation' (qui regroupe toutes les entités fédérées de Belgique, les francophones, les néerlandophones et la germanophone, ainsi que le gouvernement fédéral, ndlr) pour faire le point", a indiqué un porte-parole du Premier ministre belge.

Un pas en avant, un pas en arrière

De leur côté, les services de la Commission européenne ont transmis dimanche matin un document au socialiste Paul Magnette, et au représentant permanent de la Belgique auprès de l'UE, selon un diplomate européen. 

Le texte d'une page et demie contient un projet de déclaration possible du Royaume de Belgique concernant la protection des investissements "qui répond à toutes les réserves dont Paul Magnette a fait part", a expliqué le diplomate. Une interprétation contestée par l'entourage de Paul Magnette: "Ce document nous étonne dans la mesure où il contient largement moins d'avancées que celles atteintes vendredi et samedi", a regretté une source proche du chef de gouvernement wallon.

La question sensible de la protection des investissements

Pendant ces deux jours, les Wallons avaient négocié avec le Canada et la Commission européenne pour tenter d'aplanir les différends sur cet ambitieux accord de libre-échange transatlantique. La question de la protection des investissements est en effet l'une des plus sensibles du CETA: elle a trait à la possibilité donnée aux multinationales investissant dans un pays étranger de porter plainte contre un État adoptant une politique publique contraire à leurs intérêts.

Le traité prévoit la création d'un tribunal permanent composé de 15 juges professionnels nommés par l'UE et le Canada, dont toutes les auditions seraient publiques. Mais les ONG jugent que cette concession ne va pas assez loin et craignent que ces "pseudo-juges" soient des avocats d'affaires liés à des cabinets privés. La Wallonie voit dans le CETA les prémices du traité TTIP (ou Tafta), très impopulaire, que l'UE négocie très laborieusement avec les Etats-Unis, et réclame plus de garanties face aux puissantes multinationales.

N.G. avec AFP