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Chine : vers le week-end de 2 jours et demi ?

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La province du Hebei (75 millions d’habitants), dans le Nord de la Chine, veut anticiper le départ en week-end. Un temps de repos allongé pour pouvoir consommer davantage.

L’organe central du Parti communiste chinois, « Le Quotidien du Peuple », se montre plutôt enthousiaste : « Deux jours et demi de repos par semaine… Et pourquoi pas ? Cela ne coûte rien d’essayer ! ». Les autorités du Hebei ont rendu public un plan « d’amélioration du système de consommation ». C’est dans ce cadre que sont avancées différentes pistes concernant le temps libre : la promotion des congés fractionnés, la flexibilité des journées de repos comme celle des heures de travail, et puis, il y a l’éventuelle mise en œuvre de ce que l’exécutif provincial qualifie de « petites vacances hebdomadaires » de deux jours et demi (de vendredi, début d’après-midi, à dimanche soir). Certaines zones seraient plus particulièrement concernées.

Cette perspective suscite forcément la curiosité à travers le pays, à tel point que le sujet est devenu, à en croire Ecns (la 2ème agence de presse nationale), le principal sujet de recherche sur les réseaux sociaux chinois. Il y a ceux qui espèrent une approbation rapide, dans l’espoir d’en profiter. D’autres redoutent que seuls les fonctionnaires y aient droit, au risque de surcroît de perturber les services publics.

Un professeur de l’Ecole nationale d’administration à Pékin met en garde contre un possible dérèglement dans les établissements scolaires, hôpitaux et commissariats. Certains commentaires sur Weibo (l’équivalent de Twitter) se veulent plus terre-à-terre : avant de songer à allonger le week-end, il vaudrait mieux veiller au respect de celui de deux jours et que les jours fériés soient appliqués.

Du temps pour faire ses courses

L’initiative du Hebei n’est pas isolée. Le journal des jeunesses communistes rapporte que plus d’une dizaine de gouvernements provinciaux réfléchissent aux moyens d’augmenter la durée du repos hebdomadaire, « dans l’espoir que des week-ends plus longs donnent aux travailleurs davantage de temps pour faire leurs courses ». La décélération de la croissance des ventes de détail forcerait à prendre des mesures audacieuses, au-delà des mécanismes traditionnels de soutien des revenus.

Elargir donc les possibilités de dépenser son argent. L’Etat chinois y est d’autant mieux disposé qu’il a fait de l’augmentation de la part de la consommation dans la structure du produit intérieur brut un paramètre essentiel de l’évolution de son modèle économique. En conséquence, un jour, consommer à l’échelle des Américains. Jim O’Neill, un ancien dirigeant de la banque américaine Goldman Sachs et concepteur de la notion de BRICS, explique qu’il s’agit, à présent, de « ressusciter » le consommateur chinois. Lui consentir plus de repos est supposé y contribuer.

Coup de collier

Mais alors, cette évolution du modèle national de développement pourrait entrer en collision avec un certain discours chinois de dénonciation d’une culture de l’oisiveté, attribuée à l’Occident contemporain. En décembre 2011, dans un entretien retentissant à la chaîne d’information qatarie Al Jazeera, le président du fonds souverain chinois imputait ainsi la crise de la dette de la zone euro à des législations sur le travail ayant rendu les Européens « paresseux » et « indolents »…

Quel contraste avec l’éloge du temps libre effectué actuellement dans les médias d’Etat chinois. Toutefois, cela ne signifie en rien qu’ils aient renoncé à promouvoir une philosophie du labeur. « Sur le chemin de l'effort, [se trouve] la combinaison du travail et du repos. Quand il faudra donner un coup de collier le moment venu, ce ne sera pas difficile ». Commentaire de conclusion du « Quotidien du Peuple ».