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Christine Lagarde appelle à ne pas "faire une fixation sur les coronabonds"

Christine Lagarde

Christine Lagarde - AFP

Dans une longue interview au Parisien, la présidente de la BCE assure que la banque centrale ne se fixe "aucune limite" dans son soutien à la zone euro. Mais c'est la réponse politique qui est attendue en Europe, alors que les dissensions entre "pays du nord" et "pays du sud" peinent à s'effacer.

Dans la fameuse "boîte à outils" de la banque centrale européenne (BCE), sa présidente Christine Lagarde a encore quelques solutions sous le coude. "Mais je ne vais pas vous dire lesquelles, car l'impact sera aussi lié à l'effet de surprise, soyons clairs" explique-t-elle dans une interview au Parisien. Une chose est sûre : "il n'y a aucune limite à notre engagement au service de la zone euro" promet-elle, rappelant la mise en place d'un plan de 750 milliards d'euros de rachats de dettes privées et publiques par la BCE.

Mais la réponse attendue est aussi politique en Europe. Et la colère du ministre de l'Economie français Bruno Le Maire, après l'échec des premières négociations au sein de l'Eurogroupe, met en lumière les dissensions au sein de la zone euro, notamment sur la question de la mutualisation de la dette. "En Europe, les choses prennent un peu plus de temps que ce qu'on aimerait, mais nous finissons toujours par trouver une solution. Je ne suis pas surprise que le problème ne se règle pas en une nuit", indique-t-elle.

"Les Européens devront rembourser un jour"

Et pour faire avancer le débat sur la mutualisation des dettes, elle prend position : "je ne crois pas qu'il faille faire une fixation sur les coronabonds" tranche-t-elle. C'est "une expression de la solidarité européenne. Mais il y en a d'autres" comme la "mutualisation de la dépense dans le cadre d'un budget européen spécifique à la sortie de crise."

L'après-crise, justement, entraînera probablement des changements de règles, notamment en termes de concurrence ou de mondialisation. "Je pense que nous irons vers des relocalisations et des chaînes d'approvisionnement réduites, ainsi que vers une réflexion sur la valeur et le juste prix" explique Christine Lagarde.

Reste une autre question : qui paiera l'immense dette? "Les Européens devront rembourser un jour" reconnaît Christine Lagarde. "Si nous gérons la sortie de crise comme il faut, nous retrouverons une situation de croissance qui permettra, au fil du temps, d'amortir la nouvelle dette."

Ne pas laisser ses muscles s’atrophier

Interrogée dans la matinée sur France Inter, la patronne de la BCE est aussi revenue sur le redémarrage qui s'annonce "laborieux" en Europe. "C’est un peu comme un sportif qui, d’un coup, devrait s’arrêter de s’entraîner et voit ses muscles s’atrophier. (...) Toute la mission consiste à continuer de faire un peu d’entraînement, pour que le jour où il faut reprendre on ne soit pas trop affaiblis, et qu’on puisse repartir de plus belle" explique-t-elle.

"Il ne faut pas se poser la question de savoir si l'on va tenir, il faut tenir" martèle Christine Lagarde. "S’il faut rester confinés pendant deux mois, il faudra que le chômage partiel soutienne les salariés pendant deux mois, que les entreprises bénéficient de financements pendant deux mois. Il faut qu’on protège cette économie qui est en partie sous cloche. Il va y avoir un après, on va avoir des vaccins, des déconfinements graduels par pays, il ne faut pas imaginer que l’état actuel sera permanent."
Thomas Leroy