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Comment la Chine s'accapare les Caraïbes

Aux Bahamas par exemple, Pékin a permis de construire des hôtels de luxe.

Aux Bahamas par exemple, Pékin a permis de construire des hôtels de luxe. - Pixabay

C'est l'histoire d'un empire, l'empire du Milieu, qui a décidé d'étendre son influence dans les Caraïbes et l’arc centraméricain. Voici pourquoi.

La Chine serait-elle en passe d'asseoir sa présence en Jamaïque, à Saint-Domingue, ou bien encore au Panama ? Si la question se pose, c'est bien parce que l'empire du Milieu déploie, depuis quelque temps déjà, une stratégie mondiale finement orchestrée répondant au nom de « nouvelles routes de la soie » sous la houlette de son président Xi Jinping.

Pourtant, les eaux turquoises des Caraïbes se trouvent bien loin des chemins eurasiatiques des désormais célèbres routes de la soie. Qu'à cela ne tienne. Les ressortissants chinois ont une appétence particulière pour la région (ils y viennent depuis longtemps). Mais il est vrai que leur penchant pour les Caraïbes s'est accéléré en 2005. A l'époque, la Chine aspire à diminuer l’hégémonie américaine dans la région et à profiter du manque d'intérêt des Etats-Unis pour une zone qui ne subit aucun conflits.

Au fil des ans, l'empire du Milieu est, par ailleurs, parvenu à écarter Taïwan des paysages caribéens. Comment ? En faisant croire aux pays d'Amérique centrale et des Caraïbes que la présence chinoise pourrait donner lieu à des investissements conséquents. Cela n'a finalement pas toujours été le cas. Pour autant, cette stratégie a porté ses fruits puisqu'elle a permis de détricoter les relations diplomatiques avec Taïpei.

En outre, si la Chine a jeté son dévolu sur cette région du monde forte de 43 millions d'habitants, ce n'est pas tant parce qu'elle aspire à développer sa présence dans ces pays mais bien parce que cela lui permet de prendre un certain contrôle économique qui pèse au moment des votes au sein des organisations internationales.

La preuve par trois

Dans le détail, la présence chinoise porte aujourd'hui sur trois axes de développement. D'abord, la quête de pays qui disposent de ressources naturelles ou agricoles.

Ensuite, la recherche de nations stratégiques et/ou de micro-États pour la soutenir face à des organismes internationaux. Les Caraïbes s'inscrivent dans cette deuxième ambition.

Enfin, d'un point de vue stratégique, la Chine procède depuis peu en République dominicaine à quantité d'investissements manufacturiers. Elle est même parvenue à supplanter le Venezuela en tant que premier partenaire de Cuba grâce à des échanges commerciaux de près 2 milliards de dollars par an avec ce dernier.

Opération séduction

En 2006, l'empire du Milieu parvient également à se placer dans les petits papiers du Costa Rica. Lequel devient alors le premier pays de la zone à reconnaître la dictature communiste. En contrepartie, Pékin décide d'y construire une raffinerie dont le montant est évalué à 1,3 milliard de dollars. Mais pas que...

Des routes estimées à plus de 400 millions de dollars voient aussi le jour. Mais convaincre des pays pour étendre son influence est une chose. Réussir en limitant les coûts en est une autre. Qu'à cela ne tienne, la Chine y parvient encore une fois les yeux presque fermés. Au milieu des années 2000, elle cherche à nouer des alliances peu coûteuses. C'est le cas, par exemple, à la Barbade, à la Dominique, à encore à Antigua. Là-bas, les Chinois construisent des stades, des ports, des hôpitaux et même des hôtels de luxe comme c'est le cas aux Bahamas.

Le problème, c'est que cette stratégie chinoise menée depuis près de quinze ans maintenant augmente la dépendance financière de cette région du monde vis-à-vis de Pékin. Pour le coup, l'opération séduction de la part de la Chine est réussie. Mais les Etats-Unis ne sont pas dupes - qui plus est pas loin géographiquement - et observent de près cette présence chinoise qu'ils ne voient, et c'est logique, pas forcément du meilleur oeil.