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Rapport sur la compétitivité française de Louis Gallois: sept ans plus tard, où en est-on ?

Le président du Conseil de surveillance de PSA était aux côtés du président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux, sur BFM Business pour évoquer la compétitivité de la France et de l'Europe. Et notamment revenir sur la constitution de champions européens qui peinent encore à émerger...

C'était il y a 7 ans, presque jour pour jour. Louis Gallois, ancien patron de la SNCF et d'Airbus, remettait son fameux "rapport sur la compétitivité française" de l'industrie à Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre. Sept années plus tard, où en est justement l'industrie française ? "L'industrie reste à un niveau très bas dans le produit intérieur brut mais elle ne descend plus (…) et on voit des éléments qui sont positifs" explique Louis Gallois, désormais président du Conseil de surveillance de PSA, au micro de BFM Business. "L'investissement industriel est important, les créations de sites ont été pendant deux ans supérieures aux suppressions de site. Vous avez eu une reprise de l'emploi industriel, ce qui n'était pas arrivé depuis une dizaine d'années."

Si Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, interviewé à ses côtés, abonde dans ce sens, il prévient aussi que "devant nous, il y a plusieurs chocs." D'abord la "concurrence mondiale" mais aussi un "choc numérique et "surtout un choc climatique", explique-t-il. "On a d'énormes investissements à faire dans l'industrie en particulier et on a besoin de continuer cet effort de compétitivité."

Et d'appeler, une nouvelle fois, à baisser les fameux impôts de production, pour assurer cette compétitivité. "Leur niveau est assez aberrant en France" renchérit Louis Gallois. "Si on veut la réduction de ces impôts de production (…) il faut peut-être que les entreprises acceptent de faire une partie du chemin, en renonçant à certaines des aides qu'elles reçoivent" et notamment "les moins utiles" qui "arrosent le sable". Cela peut "montrer que toute la collectivité nationale fait un effort dans ce sens." Une idée que ne partage pas le président du Medef. "Si on enlève des crédits d'impôts (…) en fait, on augmente les impôts" rappelle-t-il. "On plaide pour que l'effort (…) soit sur l'ensemble de l'économie".

"Jamais été un adepte du 3%"

Autre sujet, celui du déficit public. Faut-il en finir avec le totem des 3% du PIB pour donner plus de marges de manœuvre à l'Etat, qui pourra alors baisser la fiscalité? "C'est une réflexion qu'il faut avoir au niveau européen", estime Louis Gallois qui rappelle les "énormes besoins d'investissement" pour certains secteurs, notamment dans le cadre de la lutte climatique. "C'est le moment de les faire" martèle-t-il. "Moi, je n'ai jamais été un adepte du 3%" poursuit l'ancien patron d'Airbus. "Evidemment, il faut une limite (…) mais je pense qu'il faut être souple" pour "investir" et "non pas payer les dépenses de fonctionnement".

Là encore, désaccord Geoffroy Roux de Bézieux. "Les Français ne pas les mieux placés pour soulever ce débat" raille-t-il. "On peut, peut-être, attendre au moins une année de vaches grasses, si j'ose dire, pour donner la leçon." Selon lui, il faut effectivement séparer les dépenses de fonctionnement et d'investissement. Et même dans la deuxième catégorie, il juge que plusieurs domaines sont majeurs : les investissements verts, les investissements d'avenir comme l'intelligence artificielle "et peut-être le budget de la Défense" souligne-t-il.

"Une vision mondiale de la concurrence"

Toujours sur l'Europe, la redoutable commissaire à la Concurrence Margrethe Vestager se montre très opposée aux champions européens qui pourrait alors nuire, justement, à la concurrence, selon elle. L'échec de la fusion Alstom-Siemens reste d'ailleurs en travers de la gorge de Louis Gallois qui "regrette profondément" le véto européen. "Il faut que les règles de l'Union européenne changent dans le domaine de la concurrence et que l'on ait une vision mondiale de la concurrence (…) sinon, on ne s'en sortira pas !"

Un nouveau rapport Gallois?

Enfin, les deux hommes ont évoqué la crise des gilets jaunes. "Je sens que le climat social se tend" reconnait Louis Gallois. "Il y a une partie du pays, cela s'est exprimé avec les gilets jaunes, qui estime qu'on la laisse sur le bord de la route (…) Cette fracture est grave pour le pays. Il faut être capable de la surmonter. Cela ne se fera pas en un jour mais je pense qu'il faut faire confiance à l'énergie des territoires." Un constat partagé par Geoffroy Roux de Bézieux qui juge, en souriant, que la situation mérite "un nouveau rapport Gallois" sur ce sujet.

Thomas Leroy