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Droit d'auteur: l'heure de vérité pour la réforme européenne

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Les eurodéputés s'apprêtent à voter mardi sur la réforme européenne du droit d'auteur, un texte très attendu par la presse et les artistes, mais honni par les Gafa et les défenseurs de la liberté sur internet.

C'est la dernière chance pour cette directive controversée d'être adoptée à Strasbourg avant les élections européennes. Partisans et opposants de la réforme se sont fortement mobilisés ces derniers jours.

Présentée par la Commission européenne en septembre 2016, cette réforme a connu d'intenses rebondissements. Rejetée une première fois en juillet 2018 par le Parlement européen, elle a finalement été acceptée, avec des amendements, en septembre 2018. Le texte a ensuite été retravaillé entre les représentants des 28 Etats membres de l'Union et du Parlement européen. Un compromis a finalement été trouvé en février dernier. C'est donc ce texte qui sera soumis au vote ce mardi.

Le nouveau texte prévoit d'adapter à l'ère du numérique la législation européenne du droit d'auteur, datant de 2001. Une époque où YouTube, détenu par Google, n'existait pas encore. La réforme est soutenue par les médias et les artistes, qui veulent obtenir une rémunération plus juste des plateformes utilisatrices de leurs contenus.

171 artistes et journalistes français signent d'ailleurs une tribune publiée ce dimanche dans le Journal du Dimanche en faveur de cette réforme. Parmi eux, l'actrice Sandrine Bonnaire, le dessinateur Enki Bilal, le compositeur et interprète Jean-Jacques Goldman, la star de l'électro David Guetta ou encore la chanteuse Louane. Cette tribune débute sous la forme d'une fable intitulée « les bons géants qui devinrent ogres » : elle raconte comment les GAFA, géants au départ altruistes, sont devenus des ogres motivés par l'argent, résistant à toute forme de régulation. Le texte dénonce les « sommes vertigineuses » dépensées par ces géants du Net pour combattre ce projet de directive révisant le droit d'auteur.

« Un enjeu majeur pour la presse, les artistes, la démocratie et la culture »

« Jusqu'à présent, ce sont les géants américains du Web qui captent l'essentiel des profits. L'enjeu est majeur pour la presse, les artistes, la démocratie et la culture », écrivaient déjà vendredi dans une tribune 267 directeurs de médias européens.

Une réforme combattue avec force par Google ou Facebook, qui profitent des retombées publicitaires générées par les oeuvres qu'ils hébergent, ainsi que par les partisans d'un internet libre, qui craignent de voir restreint ce canal de diffusion. Ces opposants affirment que la réforme nuirait à la créativité et à la gratuité du Net.

Dans le collimateur des opposants à la réforme, deux articles: le 13, qui a pour objectif de renforcer la position de négociation des créateurs et ayants droit (compositeurs, artistes...) face aux plateformes comme YouTube ou Tumblr, qui utilisent leurs contenus. Et l'article 11, qui préconise la création d'un « droit voisin » du droit d'auteur pour les éditeurs de presse. Il doit permettre aux médias de se faire mieux rémunérer lors de la réutilisation en ligne de leur production par des agrégateurs d'informations, comme Google News, ou des réseaux sociaux, comme Facebook.

Le suspense reste entier. L'eurodéputé allemand Axel Voss, rapporteur de la directive et fervent défenseur de la réforme, avait déclaré récemment être optimiste. Avant d'ajouter « mais, on ne sait jamais en politique ».

Sandrine Serais