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Inégalités, accès à l'enseignement… Pourquoi les Etats-Unis et la France "ne brillent pas"

Invité sur le plateau de 12H L'Heure H, Thomas Piketty, économiste et auteur de "Capital et idéologie" évoque l'idée d'un "socialisme participatif" pour le XXIe siècle qui permettrait, entre autres, de mettre sur pied une "nouvelle idéologie de l’égalité".

Dans son dernier ouvrage "Capital et idéologie" (chez Seuil), Thomas Piketty met en exergue les raisons qu'avancent "les sociétés humaines" pour justifier les inégalités en leur sein. Son ambition: observer le passé afin d'"envisager les conditions" de la transformation "de nos propres institutions".

"La leçon la plus importante du livre c'est que finalement, la réduction des inégalités a été plutôt un très grand succès au XXe siècle", estime l'économiste. "C’est-à-dire qu'il y a un mouvement de fond qui commence à la fin du XIXe siècle, qui s'accélère après les guerres mondiales, après la crise des années trente mais qui conduit entre 1900 et 1980 à une très forte réduction des inégalités de revenus qui passe par une augmentation de la mobilité sociale, une augmentation de la dépense publique en matière d'investissement éducatif et que c'est tout cela qui a permis beaucoup de prospérité et une croissance extrêmement forte comme on avait jamais vue avant avec une forte réduction des inégalités par rapport au XIXe siècle".

De l'impasse au renouveau?

Le problème, continue poursuit Thomas Piketty, c'est que cette croissance forcément heureuse et cette révision des inégalités ont connu un revirement il y a près de quarante ans. "Depuis les années 80-90, ce mouvement s'est interrompu (je pense largement pour de mauvaises raisons) et je pense que ce mouvement va reprendre. (…) Dans le fonds (…) dans une société très éduquée, avoir une circulation du pouvoir, essayer d'impliquer le plus grand nombre dans les décisions économiques. Je pense qu'il y a une certaine logique. Sauf que depuis les années 80-90, on a eu tendance à suivre une évolution différente pour deux raisons", analyse Thomas Piketty.

La première, compte tenu de "l'échec dramatique du communisme soviétique, du maoïsme". La deuxième, du fait du "mouvement reaganien dans les années 80". Trente ans plus tard aux Etats-Unis, "la croissance a été divisée par deux. C'est-à-dire que la promesse de dynamisation de la croissance n'a pas eu lieu".

Aussi, pour contrer cette décroissance qui s'inscrit dans la durée, Thomas Piketty préconise de se concentrer sur un point qui revêt pourtant toute son importance.

"L'approche qui est défendue par exemple par beaucoup de candidats démocrates aux Etats-Unis de rétablir la progressivité fiscale à des niveaux qu'on a observés dans le passé me semble être une bonne orientation. Mais cela ne suffit pas !", insiste l'économiste. Pourquoi ? Parce que la question qui est devenue encore plus centrale que tout cela (…) c'est la question de la justice éducative. (…) Les États-Unis comme la France, à un degré moindre, ne brillent pas" en matière d'égalité d'accès à l'enseignement. Si bien qu'au final, explique l'économiste, l'abaissement de la croissance depuis les années 80-90, serait avant tout lié à "la stagnation de l'investissement éducatif".

J.C-H