BFM Business
Economie et Social

Jean-Claude Trichet : "Vous l’appelez la crise, je l’appelle processus d’adaptation"

Pour Jean-Claude Trichet, l'Europe est l'épicentre de la crise

Pour Jean-Claude Trichet, l'Europe est l'épicentre de la crise - -

L’ancien président de la Banque centrale européenne était invité sur BFM Business ce jeudi 4 octobre. S’il refuse de prévoir une sortie de crise, il martèle que les pays avancés doivent ajuster leurs politiques pour en sortir.

En fait de crise, ce que vivent "les Etats-Unis, l’Angleterre, le Japon, et la Zone euro", c’est un "processus nécessaire d’ajustement". C’est ce qu’a martelé Jean-Claude Trichet ce jeudi, au micro d’Hedwige Chevrillon dans le Grand Journal sur BFM Business. Une situation particulièrement vrai pour l’Europe qu’il désigne comme "l’épicentre de la crise".

Pour lui, les "pays d’Amérique latine, d’Asie et d’Afrique", ainsi que quelques "pays avancés" comme "l’Allemagne, le Canada et la Suède" ont procédés à "de gros efforts, réduit leur dette publique, leur déficit, ils ont assaini leurs comptes externes". Le fait qu’ils aient "déjà procédé à des ajustements" est ce qui leur a permis, selon l’ancien président de la Banque centrale européenne "de montrer une forte résistance à la crise".

L’OMT, le rachat de dette souveraine annoncé le mois dernier, est-il conforme au mandat de la BCE ?

"La balle est dans le camp des Etats, le message [qu’a fait passer Mario Draghi] est on ne peut plus clair", estime Jean-Claude Trichet. "La BCE ne peut ni ne doit se substituer aux gouvernements", insiste-t-il. Elle a "toujours fait ce qu’il fallait pour maintenir le cap de la stabilité tout en répondant à une situation difficile".

Jean-Claude Trichet l’assure, il n’a "jamais épousé les craintes d’une partie des observateurs sur la fin de l’euro". Pour lui, la spéculation, les tempêtes boursières qui s’abattent sur la zone euro tiennent de ce que "les marchés sous estiment fréquemment la détermination de la BCE et des gouvernements" à ne pas laisser tomber l’euro.

Les actions de la Réserve fédérale américaine sont-elles justes ?

"Aux Etats-Unis, en Angleterre, au Japon, en zone euro, nous constatons une augmentation de la taille du bilan des banques centrales qui va de 11 % du PIB de chacune des entités concernées, à 19 % et plus. Le Japon détient le triste record", indique Jean-Claude Trichet. La situation de l’Europe lui semble plus saine dans la mesure où "les banques centrale donnent beaucoup de liquidités mais les liquidités lui reviennent. Les agrégats monétaires ne galopent pas du tout".

En revanche, "l’injection de liquidités massive" est pour lui "le symptôme d’un dysfonctionnement de l’économie". Et le maintien par la Fed de taux d’intérêt très bas, dans la durée, "signale un état de l’économie de marché qui n’est pas normal". En somme, ses inquiétudes concernent "l’ensemble des pays avancés".

Le budget français est-il adapté à une situation de crise ?

Le prédécesseur de Mario Draghi a noté que la France avait "le niveau le plus élevé de dépense publique en proportion de notre PIB dans la zone euro". Or, a-t-il ironisé, "si la dépense était la solution pour avoir croissance, création d’emplois, éviter le chômage de masse, alors nous serions le pays le plus prospère".

Autrement dit, selon Jean-Claude Trichet, l’Hexagone a "un sérieux problème de réduction de la dépense publique". La solution pour lui : "il faut que la dépense publique baisse beaucoup beaucoup beaucoup. Plus nous le ferons vite, mieux nous nous porterons."

Que répondre à ceux qui disent que l’austérité n’est pas la solution ?

En référence à la France, aux Etats-Unis aussi, l’ancien président de la Banque centrale européenne souligne que "ce n’est pas parce que vous financez aisément votre déficit externe et votre déficit budgétaire que vous n’êtes pas dans une situation anormale".

"Dans les pays qui continuent à financer très aisément leur déficit", on peut dire que l’austérité ne résout rien, dit-il, "mais ce n’est pas conforme à ce qui est raisonnable et pas adapté pour les pays qui emprunte difficilement".

Nina Godart