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L'Allemagne pressée de toutes parts pour mettre en place une relance budgétaire

Angela Merkel à la chancellerie à Berlin, le 23 juillet 2016.

Angela Merkel à la chancellerie à Berlin, le 23 juillet 2016. - Tobias Schwarz - AFP

Mario Draghi, patron de la BCE et Bruno Lemaire, ministre de l'Economie, souhaitent que Berlin assouplisse sa rigueur budgétaire pour investir davantage. Un appel du pied qui risque d'être vain.

Si la Banque centrale européenne a sorti un nouveau paquet de mesures ce jeudi pour dynamiser l'économie européenne en phase de ralentissement, elle exhorte les pays membres disposant de marges budgétaires à investir davantage.

"Au vu de l'affaiblissement des perspectives économiques et de l'importance des risques baissiers, les gouvernements disposant de marges budgétaires devraient agir de manière rapide et efficace.", a ainsi déclaré Mario Draghi, patron de la BCE. Une exhortation reprise par le ministre de l'Economie Bruno Lemaire ce vendredi.

"Il y a un manque de croissance dans la zone euro. (...) Il faut davantage d'investissement de la part des pays qui disposent de marges budgétaires", a-t-il lancé. Son homologue luxembourgeois, Pierre Gramegna, va dans le même sens : "Les pays qui ont bien travaillé pour équilibrer leur budget et ont de la marge devraient l'utiliser".

L'Allemagne très exposée à la guerre commerciale

Jamais citée, l'Allemagne est clairement visée par ces appels du pied. La première économie européenne jouit depuis presque toujours d'un excédent budgétaire, il atteint même le montant colossal de 45 milliards d'euros au premier semestre. Le pays demeure toutefois très attaché à la notion d'équilibre budgétaire qui est même inscrit dans le marbre de sa constitution, le déficit ne pouvant excéder 0,35% du PIB. C'est la fameuse rigueur budgétaire allemande.

Mais depuis quelques temps, un assouplissement de cette position est réclamée en Europe donc mais aussi dans le pays étant donné les difficultés qu'il traverse. Très exposée aux guerres commerciales, l'Allemagne voit tous ses indicateurs passer au rouge (exportations, production industrielle…) et pourrait afficher une récession technique au troisième trimestre (après -0,1 % de croissance au deuxième).

Opinion publique hostile

Généralement sourd à ces appels, le gouvernement allemand évoque désormais la question car il s'agit de sauver la croissance. "Nous avons une marge de manœuvre un peu plus large pour financer des dépenses d'infrastructures en Allemagne, ce qui pourrait évidemment aider l'industrie allemande à se relever", indiquait le 31 août dernier Peter Altmaier, ministre allemand de l'Economie et de l'Energie au micro d'Edwige Chevrillon sur BFM Business.

Mais même si Berlin décidait d'ouvrir (un peu) les vannes, ses marges de manoeuvre resteraient limitées. On l'a dit, il y a la limite de 0,35 % de PIB de déficit annuel. D'ailleurs, le prochain budget présenté cette semaine par le ministre des Finances Olaf Scholz est à l'équilibre.

Ensuite, il faudra trouver une majorité au sein de la grande coalition entre frères ennemis formée par les chrétiens-démocrates de la CDU/CSU et les sociaux-démocrates du SPD, qui sont divisés sur l'opportunité d'une relance budgétaire.

Enfin, l'opinion publique demeure hostile à l'augmentation des dépenses et aux politiques monétaires accommodantes qui diluent la rentabilité de l'épargne. Bild, le grand quotidien populaire d'outre-Rhin titrait d'ailleurs en réaction aux annonces de la BCE : "C'est un jour noir pour les épargnants allemands".

OC avec AFP