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Martin Shkreli, l'homme le plus détesté des États-Unis, arrêté pour fraude

Martin Shkreli a été arrêté.

Martin Shkreli a été arrêté. - Andrew Burton - AFP

Martin Shkreli, qui avait fait passer le prix d'un médicament contre le paludisme et des co-infections du sida de 13,50 à 750 dollars, est accusé d'avoir trompé ses investisseurs.

Martin Shkreli aime faire parler de lui mais cette fois il risque de le regretter. L'entrepreneur de la pharmacie et financier, qui s'était attiré les foudres du monde politique américain en septembre après la forte augmentation du prix d'un médicament, a été inculpé jeudi à New York pour avoir trompé ses investisseurs. Le jeune homme de 32 ans est notamment accusé d'avoir trompé les investisseurs des deux fonds alternatifs (hedge funds) dont il était le gérant, MSMB Capital Management et MSMB Healthcare Management.

Il est également soupçonné d'avoir contraint le laboratoire pharmaceutique qu'il avait créé, Retrophin, à transférer des titres de la société à ces fonds sans contrepartie financière. Au total, Retrophin et ses actionnaires auraient perdu plus de 11 millions de dollars dans l'affaire, selon le communiqué publié jeudi par le procureur du district est de New York, Robert Calpers. Il a été inculpé jeudi de sept chefs d'accusation par un juge fédéral de Brooklyn, principalement de fraude et de détournement de fonds. Les faits portent sur une durée de cinq ans, de 2009 à 2014.

Caution de 5 millions de dollars

L'avocat Evan Greebel, soupçonné d'avoir conseillé Martin Shkreli pour ses montages aux dépens de Retrophin, a également été inculpé pour fraude. L'entrepreneur a été remis en liberté moyennant une caution de cinq millions de dollars, a indiqué à l'AFP une porte-parole du procureur général Robert Calpers. Evan Greebel a également été laissé libre après cautionnement d'un million de dollars, a-t-on précisé de même source.

Personnage très médiatique à l'allure juvénile, Martin Shkreli s'est fait une spécialité de racheter des brevets sur des médicaments bon marché et d'en augmenter ensuite massivement le prix. "Martin Shkreli est convaincu qu'il sera innocenté", a assuré un communiqué publié en son nom, selon lequel "il n'y a pas coïncidence dans le fait que les chefs d'inculpations (...) ont été déposés au moment où Martin Shkreli menait des activités très médiatisées et controversées qui n'ont pourtant aucun lien". Le texte faisait visiblement référence au scandale déclenché en septembre lorsque, l'une de ses sociétés, Turing Pharmaceuticals, avait fait passer le prix d'un comprimé de Daraprim, un médicament utilisé contre le paludisme et des co-infections du sida, de 13,50 à 750 dollars du jour au lendemain.

L'entrepreneur avait alors été surnommé l'homme le plus détesté des Etats-Unis et de nombreuses voix s'étaient élevées pour dénoncer cette hausse, notamment au sein du monde politique. Turing avait ensuite annoncé que s'il ne baisserait pas le prix unitaire du médicament, il négocierait des accords avec les groupes de santé sur un prix de gros. Concernant les faits qui lui ont valu son inculpation jeudi, le ministère public l'accuse d'avoir, à plusieurs reprises, donné une image de la santé financière des deux fonds qu'il gérait sans rapport avec la réalité, afin d'attirer de nouveaux investisseurs.

Roi de la provocation

En décembre 2010, il avait notamment assuré que MSMB Capital Management avait environ 35 millions de dollars d'actifs sous gestion, alors qu'il ne détenait plus que 700 dollars au total. Quant à Retrophin, après avoir permis le transfert de titres vers les deux fonds, il a obtenu de la société qu'elle indemnise des investisseurs de MSMB Capital Management et MSMB Healthcare Management. Ces investisseurs, trompés par les informations volontairement erronées que leur avait transmises Martin Shkreli, menaçaient d'attaquer Retrophin, s'estimant lésés financièrement. Le marché a vivement réagi jeudi à l'annonce de l'interpellation de Martin Shkreli: le cours de la société pharmaceutique Kalobios, dont il avait pris le contrôle en novembre, s'est effondré de plus de 50% dans les échanges hors marché avant que le titre ne soit suspendu préalablement à l'ouverture de la Bourse de New York.

Cultivant volontiers la provocation, il avait racheté en décembre pour 2 millions de dollars l'unique exemplaire d'un album "secret" du célèbre groupe de rap new-yorkais Wu-Tang Clan. "Pas de mandat de saisie lors de l'interpellation de Martin Shkreli aujourd'hui, ce qui signifie que nous n'avons pas saisi l'album du Wu-Tang Clan", a tweeté le compte officiel du bureau de New York du FBI.

D. L. avec AFP