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L'inflation en Chine s'est emballée en janvier

Entre la crise du porc et le coronavirus, le pays a vu ses prix à la consommation bondir de 5,4%, le mois dernier sur un an.

L'inflation en Chine s'est emballée en janvier, emportée par une envolée des prix alimentaires, alors que les mesures drastiques prises pour endiguer l'épidémie du coronavirus désorganisent les transports de biens agricoles.

Les prix à la consommation ont grimpé de 5,4% le mois dernier sur un an, un record depuis fin 2011, leur renchérissement s'accélérant après une progression de 4,5% le mois précédent, a indiqué lundi le Bureau national des statistiques (BNS).

Une poussée de fièvre due aux prix alimentaires, qui se sont envolés de 20,6% sur un an. Très surveillés, les prix du porc -- la viande la plus consommée dans le pays -- ont plus que doublé (+116%).

Certes, l'inflation était déjà dopée ces derniers mois par une flambée des prix du porc, le cheptel chinois étant décimé depuis août 2018 par une épidémie de peste porcine africaine.

Un traditionnel pic de la consommation avant les congés traditionnels du Nouvel an lunaire --qui tombait le 25 janvier-- a aggravé le problème, les foyers gonflant leurs achats avant les fêtes.

"L'inflation reflète en grande partie la volatilité habituelle à l'approche (des vacances), mais les ruptures d'approvisionnement" résultant de l'épidémie "ont contribué à maintenir les prix alimentaires élevés après le Nouvel an", insiste Julian Evans-Pritchard, analyste de Capital Economics.

La Chine a adopté des mesures drastiques à partir du 23 janvier pour endiguer la propagation de l'épidémie de pneumonie virale: barrages routiers, restrictions de déplacement et confinement de populations de régions entières.

De quoi désorganiser largement les réseaux de distribution de biens agricoles à travers le pays: les prix des légumes frais ont bondi en janvier de 17,1% sur un an.

 "Accumuler des stocks chez soi"

"Certaines productions alimentaires peuvent se gâter avant leur acheminement vers les villes, étant donné les perturbations des transports et mesures de confinement, notamment les légumes, fruits et viandes" à péremption rapide, avertissait jeudi Lu Ting, économiste de Nomura.

Dans ce contexte, "les gens tendent" à acheter tout ce qu'ils trouvent "pour constituer des stocks d'aliments chez eux", contribuant à exacerber les tensions sur l'offre et à faire grimper les prix, avait-elle prévenu.

Alors qu'habituellement les prix alimentaires retombent dans la foulée des congés du Nouvel an, l'inflation devrait continuer de s'emballer en février, dans un pays toujours paralysé par les restrictions, abonde auprès de l'AFP Suan Teck Kin, chercheur de la banque singapourienne UOB.

La situation inquiète les autorités chinoises, soucieuses de conserver des prix sous contrôle, gage de stabilité sociale -- d'autant que les répercussions sont multiples: des exploitants mettent en garde face au risque de pénurie d'aliments pour bétail et volailles.

Le gouvernement central a enjoint fin janvier les fournisseurs d'aliments pour élevages à "accélérer" leur production, tout en appelant les abattoirs à "gonfler leur offre de viande".

Tensions sur le porc

Car les tensions sur le porc, viande favorite des tables chinoises, restent fortes: en glissement mensuel, les prix ont grimpé de 8,5% par rapport à décembre.

Ils avaient pourtant légèrement reculé en décembre sur un mois, avec la mise sur le marché par le gouvernement d'importants stocks de porc congelé prélevé sur les réserves nationales -- cela n'a pas suffi à enrayer durablement l'envolée.

Dans l'industrie, les prix à la production (prix sortie d'usine) sont restés quasi-stables, grimpant d'un maigre 0,1% sur un an en janvier, a annoncé le BNS. Ils évoluaient auparavant en repli (en déflation) depuis juillet, avec un repli de 0,5% en décembre.

La demande demeure atone, dans une conjoncture déjà plombée par la guerre commerciale sino-américaine et désormais assombrie par l'épidémie.

"Mais il pourrait être encore trop tôt pour constater l'impact sur la demande, car les usines étaient fermées pendant les congés prolongés", et "les évolutions récentes des cours des matières premières suggèrent que les prix sortie d'usine seront pénalisés" en février, avance M. Evans-Pritchard.

Pour lui, la banque centrale pourrait donner la priorité à la relance de l'activité et adopter de nouveaux assouplissements monétaires... quitte à laisser l'inflation s'envoler sur l'année très au-delà des 3%, niveau-cible que s'était fixé Pékin pour 2019.

TL, avec l'AFP