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Mistral: les Russes fixent un délai à la France pour sa livraison

Le contrat entre la France et la Russie est de 1,2 milliard d'euros.

Le contrat entre la France et la Russie est de 1,2 milliard d'euros. - Franck Perry - AFP

Les Russes laissent à la France deux semaines pour livrer le porte-hélicoptère. Passé ce délai, ils se verront contraints de demander de lourdes compensations.

La France est prise entre deux eaux. D'un côté, Paris est soumise à la pression de ses partenaires, tels que les Etats-Unis, l’Angleterre ou l’Allemagne, qui demandent de suspendre la livraison du Mistral tant que la Russie n’aurait pas cessé ses actions en Ukraine. De l'autre côté, la France a pris des engagements auprès de la Russie.

Et cette dernière commence sérieusement à s'impatienter. Une source russe "haut placée" a déclaré, ce vendredi 14 novembre à l'agence Ria Novosti, que la France a jusqu'à fin novembre pour livrer un premier navire de guerre Mistral à la Russie.

"Nous nous préparons à différents scénarios. Nous attendrons jusqu'à la fin du mois (la livraison du 1er Mistral, ndlr), et ensuite nous présenterons nos sérieuses réclamations" financières, a déclaré cette source.

Et les Russes peuvent se permettre de taper du poing sur la table. Ils sont conscients que ce contrat d'1,2 milliard d'euros est vital pour la France dans le contexte général de crise économique et de marasme politique.

Des conditions "pas réunies"

A l'origine, Moscou pensait recevoir le Mistral en octobre. En juillet encore, François Hollande affirmait, lors d'un dîner à Paris avec l'Association de la presse présidentielle, que le premier navire serait livré en octobre. "Le marché a été conclu en 2011, le bateau est quasiment achevé et doit être livré en octobre", a-t-il assuré.

Mais l'escalade russe en Ukraine a forcé Paris à repousser cette livraison. Et les Russes pensaient recevoir ce premier bâtiment ce vendredi. Le vice-Premier ministre, Dmitry Rogozine, chargé du complexe militaro-industriel russe, avait annoncé, le 29 octobre, qu'un premier porte-hélicoptère Mistral devrait être livré par la France le 14 novembre.

La société "Rosoboronexport (chargée de l'exportation des armes russes) a reçu une invitation pour le 14 novembre à Saint-Nazaire où se trouvent 360 marins russes (...) pour la remise à la Russie du premier navire, le Vladivostok et la mise à l'eau du second", a déclaré Dmitry Rogozine, cité par les agences de presse russes.

Mais le ministre des Finances, Michel Sapin, avait immédiatement réagi en affirmant que les conditions ne "sont pas réunies aujourd’hui" pour qu'elle ait lieu.

"Couteaux suisses" de la marine

La question épineuse des Mistral devrait sans doute être au programme de la rencontre entre les présidents français François Hollande et russe Vladimir Poutine lors du sommet du G20 de Brisbane samedi et dimanche.

Si elle se décide à livrer ces bâtiments, véritables "couteaux suisses" de la marine en raison de leur polyvalence (ils peuvent emporter 16 hélicoptères, quatre chalands de débarquement, 13 chars, un état-major, 450 fantassins et un hôpital), la France est assurée de semer l'émoi en Pologne et dans les pays Baltes, qui s'estiment en première ligne face à la Russie et redoutent de faire à leur tour les frais de son imprévisibilité.

A l'inverse, une annulation risque de placer la France dans la difficile position du partenaire qui n'honore pas ses contrats.

Diane Lacaze avec AFP