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Pourquoi la Réserve fédérale américaine a augmenté ses taux

Les experts d'Intégrale Bourse ont décrypté au cours d'une édition spéciale les annonces de la présidente de la Fed, Janet Yellen.

Les experts d'Intégrale Bourse ont décrypté au cours d'une édition spéciale les annonces de la présidente de la Fed, Janet Yellen. - BFM Business

La Banque centrale américaine a annoncé ce mercredi qu'elle comptait relever ses taux directeurs pour la première fois depuis 2006. Pourquoi maintenant? Élément d'analyse avec les experts de BFM Business.

Ouf, c'est fait ! Depuis le temps qu'elle l'annonçait, la Fed a mis un terme à sa politique de taux zéro ce mercredi, en les remontant d'un quart de point. Janet Yellen, sa présidente, a ensuite tenu une conférence de presse pour expliquer le choix des membres du comité de politique monétaire de mettre fin à près de 10 ans de baisse ou de maintien de ces taux directeurs.

La hausse des taux "reflète la confiance du comité dans la poursuite du renforcement de l'économie. La reprise économique a fait de grands progrès mais elle n'est pas encore achevée", a déclaré la président de la Fed. "Il demeure des marges d'amélioration pour le marché du travail et l'inflation continue d'évoluer en dessous de notre objectif à long terme. Mais avec une économie qui se comporte bien et qui devrait continuer à le faire, le comité a jugé qu'une hausse modeste de l'objectif des Fed Funds est maintenant appropriée, tout en reconnaissant que même après cette hausse, la politique monétaire reste accommodante".

La décision aurait pu intervenir en octobre

Elle a aussi ajouté qu'il ne fallait pas "surestimer la signification" de cette première hausse. Mais alors, que faut-il en comprendre ? Et que laisse-t-elle présager de l'avenir de la politique monétaire des États-Unis ? Éléments de réponse avec les experts de BFM Business, invités de l'édition spéciale dédiée à la dernière réunion du comité de l'année 2015.

"Le seul fait nouveau mentionné par Janet Yellen dans son discours est que le risque sur l'international s'est amoindri depuis l'été dernier", souligne Laurent Berrebi, président-fondateur de Global Macro Finance. Il faut se souvenir qu'en septembre, la Fed qui évoquait déjà depuis plusieurs semaines une hausse des taux avait finalement renoncé en raison d'inquiétudes sur la Chine, avait-elle indiqué. Mais pour Laurent Berrebi, ce très léger durcissement de la politique monétaire américaine aurait "tout aussi bien pu intervenir en octobre dernier".

"Il fallait sortir de l'attente"

Finalement, l'avantage d'attendre est que les marchés étaient tellement préparés qu'ils ne se sont pas emballés à cette annonce. "C'était rassurant. Ce n'est pas un évènement, on s'y attendait", estime le patron de Global Macron Finance. Pour lui, étant donné que ces taux ont un impact sur celui auquel les banques prêtent, un effet de cette décision à court terme pourrait être que "les entreprises, anticipant un relèvement du coût du crédit, accélèrent leur investissement".

"Il fallait sortir de l'attente", estime pour sa part Wilfried Galand, responsable du Conseil en Investissements at Neuflize OBC. Pour autant, cette décision ne semble pas correspondre à "une conviction très forte" que l'économie va effectivement beaucoup mieux en décembre que les mois précédents. Ce choix reste néanmoins étonnant "parce que les votants du comité sont majoritairement des partisans de la politique monétaire accommodante", indique Wilfried Galand.

"Les surprises viendront l'année prochaine"

"La surprise, c'est qu'il n'y a pas de surprise, et tant mieux, car les marchés détestent les surprises. Mais elles viendront l'année prochaine", affirme de son côté Gregori Volokhine, président de Meeschaert Financial Services. Le gérant s'inquiète pour l'avenir, rappelant que "la Fed reste extrêmement vague. Elle ne donne aucun calendrier". Certes, Janet Yellen a indiqué que la Fed misait sur des taux à 2,5% en 2017 et 3,5% en 2018, ajoutant qu'il "faut éviter d'attendre trop longtemps sans quoi il faudrait remonter les taux brutalement". Mais elle a martelé que les hausses successives seraient adaptées et conditionnées à l'évolution de la situation économique, nuance Gregori Volokhine.

Pour lui, "si elle a augmenté les taux aujourd'hui, c'est parce qu'elle en avait tellement parlé qu'il fallait qu'elle le fasse. Mais essayer de le justifier par des statistiques économiques, c'est difficile puisque les chiffres sont les même qu'il y a six mois. Et à cette époque, la Fed n'avait pas monté les taux".

Jean-Baptiste Pethe, économiste senior chez Exane BNP Paribas, n'est pas de cet avis. Pour lui, "il y a des raisons économiques fondamentales pour remonter les taux", et tout particulièrement sur l'emploi: "On est proches du plein emploi au sens où l'entend la Fed", conclut-il.

N.G.