BFM Business
International

Quand les bonnes nouvelles font baisser les Bourses

-

- - BRYAN R. SMITH / AFP

Nouvelle preuve de la dichotomie entre économie réelle et marchés, les bons chiffres de l’emploi américain ont fait reculer les principales places mondiales obsédées par les prochaines baisses de taux.

Ce n’est pas nouveau. Les variations des grandes Bourses mondiales sont de moins en moins guidées par les chiffres macro-économiques des pays. Et cette tendance se renforce aujourd’hui avec l’obsession des investisseurs pour les politiques monétaires des banques centrales vis-à-vis des taux d’intérêt. Les cours actuels semblent bien être uniquement fixés à cette aune.

Dernier exemple en date, les chiffres de l’emploi américain vendredi dernier. Bonne surprise, la première puissance économique mondiale a créé 224.000 emplois en juin, c’est bien plus qu’attendu et surtout bien mieux que le petit 72.000 de mai, preuve que le ralentissement américain n’est pas si rapide que l’on pensait.

Mais pour les marchés, cette bonne surprise n’en est pas une puisqu’elle repousse mécaniquement la perspective d’une baisse des taux du côté de la FED qui a clairement affiché son intention de prendre des mesures pour soutenir la croissance américaine.

« Le marché action a donc plus réagi à la perspective de moindres baisses des taux de la Fed qu’aux bons chiffres d’emplois. C’est d’ailleurs le miroir parfait de ce qui s’était passé il y a un mois : mauvais chiffres de création d’emplois, perspectives d’une Fed beaucoup plus accommodante et donc bonne performance des bourses. Bref la Fed devient bel et bien « the only game in town », les bonnes nouvelles font baisser la bourse », commente Stéphane Déo, stratégiste à la Banque Postale Asset Management.

Retour de bâton

Les prochaines variations fortes des indices resteront associées à cette question des taux. Pour Hussein Sayed, analyste pour FXTM, ce « n'est pas suffisant pour changer les anticipations du marché à l'égard d'un assouplissement de la politique de la Fed à la fin du mois, mais cela a clairement mis fin aux spéculations sur une baisse agressive des taux, de 50 points de base ».

Les analystes seront attentifs à toute information en provenance de la banque centrale américaine, notamment l'audition de son président, Jerome Powell, devant le Congrès américain mercredi et jeudi. De plus, le compte-rendu de la dernière réunion du Comité de politique monétaire sera publié également mercredi.

Large ou mesurée, la baisse des taux américains est une certitude, comme ceux en Europe. De quoi satisfaire encore les marchés cette année. Mais un retour de bâton n’est pas à exclure et ces baisses pourraient in fine déstabiliser des poids lourds de la cote comme les banques et donc plus généralement les indices.

Comme l’a rappelé sur BFM Business, Patrick Artus, économiste et directeur de recherche chez Natixis, « On arrive à la limite des taux bas. Il faut faire très attention, il y a plein d’inconvénients majeurs qui surviennent quand les taux d’intérêts sont bas : on affaiblit les banques, un débat qu’on devrait avoir en Europe, (la multiplication) des ‘zombies companies’ », ces entreprises qui auraient dû disparaître mais qui survivent dans un environnement de taux bas.

Conclusion, ces « interventions (des banques centrales) ont renforcé l’appétit pour la dette à risque américaine (High Yield US) dans un contexte de ralentissement économique mondial. C’est un match macroéconomie contre banques centrales qui se joue actuellement sur les marchés », abonde Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés chez IG France.

Olivier CHICHEPORTICHE