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Rachats de dettes: la justice allemande réclame des comptes à la BCE

La question des contours du mandat de la Banque centrale européenne reste un sujet de débat controversé en Allemagne. Dans un arrêt retentissant, la Cour constitutionnelle allemande donne trois mois à la BCE pour justifier ses rachats de dette, impulsés par Mario Draghi après la crise de 2008.

La Cour constitutionnelle allemande a exigé mardi que la Banque centrale européenne (BCE) justifie dans les trois mois la conformité de ses vastes rachats de dettes à son mandat, dans un arrêt retentissant aux implications incertaines.

La puissante Banque centrale allemande se verra interdire de participer à ce programme anti-crise, qui a encore gagné en ampleur en raison de la pandémie de coronavirus, si "le Conseil des gouverneurs de la BCE" ne démontre pas "de façon compréhensible et substantielle" qu'il n'a pas outrepassé les traités européens, a décidé la juridiction suprême allemande.

Saisie par plusieurs requérants eurosceptiques, la Cour constitutionnelle explique certes n'avoir "pas pu établir de violation" par la BCE de l'interdiction qui lui est faite de financer directement les Etats européens.

D'une rare virulence

Mais, dans une décision d'une rare virulence, les magistrats de Karlsruhe jugent "douteuse" la compétence de l'institut de Francfort de racheter massivement de la dette publique, qui a représenté la majeure partie des 2.600 milliards d'euros d'achats d'obligations opérés entre mars 2015 et décembre 2018, dans le cadre de "l'assouplissement quantitatif" ou "QE" réactivé en novembre dernier.

En particulier, ils refusent de se plier à l'avis de la Cour de justice européenne, qui avait validé fin 2018 le programme de la BCE, et déplorent l'absence de contrôle du QE par le Parlement allemand.

La justice de l'UE "prime" sur la justice allemande

La Commission européenne a, de son côté, mis en avant mardi la "primauté" du droit européen sur le droit national, en réponse à la décision de la justice allemande.

"Nous réaffirmons la primauté du droit communautaire et le fait que les arrêts de la cour de justice européenne sont contraignants pour toutes les juridictions nationales", a déclaré le porte-parole de la Commission, Eric Mamer, interrogé sur la décision de la Cour constitutionnelle allemande, basée à Karlsruhe.

"Nous allons maintenant étudier la décision de la justice allemande en détail. Etant donné la complexité de l'arrêt, c'est notre seule réaction", a-t-il ajouté.

L'arrêt rendu mardi "ne concerne pas" le programme d'urgence contre la pandémie (PEPP) annoncé mi-mars par la BCE et doté de 750 milliards d'euros d'ici la fin de l'année, rappellent néanmoins les magistrats.

TL avec l'AFP