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Stress tests: les Etats-Unis confrontent leurs banques à une violente récession

La Fed peut émettre des réserves sur les dividendes versés par les banques, en cas d'échec à ces tests

La Fed peut émettre des réserves sur les dividendes versés par les banques, en cas d'échec à ces tests - -

La Fed, banque centrale américaine, a annoncé qu’elle demanderait à 19 banques américaines de prouver leur résistance face à trois scénarios. L’un d’entre eux retient une baisse du PIB américain de presque 5% sur un an.

Les banques américaines vont subir une nouvelle séance de torture réglementaire. La Réserve fédérale (Fed) a annoncé jeudi 15 novembre qu’elle allait demander à 19 banques de faire leurs preuves face à trois scénarios d’évolution de l’économie mondiale.

Le premier, le plus optimiste, table sur une poursuite de la croissance économique américaine à un rythme moyen de 2,75% par an aux Etats-Unis. Le scénario intermédiaire retient l'hypothèse d'un affaiblissement de l'activité économique en Amérique, en Europe et en Asie, qui irait de pair avec une brusque poussée d'inflation aux Etats-Unis. Surtout le pire des trois scénarios se base sur des hypothèses assez impressionnantes : chute du PIB américain de presque 5% entre le troisième trimestre 2012 et la fin de l’année 2013, hausse de quatre points du taux de chômage, récession en zone euro, au Royaume-Uni et au Japon. La Chine l’Inde et Taïwan ne connaîtraient pour leur part qu’une croissance faible.

Ces trois scénarios serviront de base pour conduire les tests de résistance ("stress tests") auxquels les banques sont soumises chaque année. Les 19 banques américaines vont devoir prouver qu’elles ont les reins assez solides pour tenir face à ces trois cas de figure. Elles sont tenues de soumettre à la Fed, avant le 7 janvier prochain, leurs plans d’utilisation du capital, qui indiquera notamment les dividendes qu’elles comptent verser à leurs actionnaires. La Fed précise qu'elle décidera d'accepter ou non pour chaque banque le versement de ces dividendes sur la base des résultats individuels des tests.

Dexia qui réussit (uniquement) les stress tests

Ces "stress tests" ne sont évidemment pas une grande première. Les Etats-Unis en ont conduit plusieurs auparavant, les résulats des derniers en date ayant été rendus publics en mars dernier. Sur la base de ces séances de torture infligées aux banques, la Fed peut également demander aux banques de se recapitaliser.

L’Europe le fait également, sous l’égide de l’EBA (European banking authority), régulateur des banques de l’Union européenne. Des stress tests européens parfois décriés comme n’étant pas assez exigeants. L’exemple le plus souvent cité est Dexia. La banque franco-belge avait réussi haut la main les stress tests en 2011, quelques mois avant que les Etats belges et français ne décident d’acter son démantèlement pour cause de bilan remplis de titres illiquides.

Une Fed pas si sévère

Mais les tests de résistance menés par la Fed semblent bien plus sévères que ceux des Européens. Un constat que Céline Cholet, économiste bancaire chez BNP Paribas, nuance : "la Fed retient généralement des scénarios macroéconomiques plus pessimistes que l’EBA,ce qui d’une certaine façon lui donne plus de crédibilité. Cependant, la cible de fonds propres est bien moins contraignante que celles des stress tests européens".

Pour évaluer la réussite d’une banque à ces tests de résistance, les régulateurs regardent si les banques parviennent à maintenir un certain niveau de fonds propres selon le scénario appliqué. Or l’EBA effectue ses tests en retenant des normes de capitaux dites de Bâle 2.5, plus restrictives que celles de la Fed (dites de Bâle 1). L’EBA a même dernièrement demandé aux banques de valoriser les dettes souveraines dans leur bilan à leur prix de marché, ce qui signifiait de lourdes dépréciations pour elles. Une exigence qui ne figure pas dans les normes de Bâle 2.5.

Toutefois, Céline Choulet explique de des stress tests trop sévères ne sont pas forcément pertinents : "L’objectif d’un stress test est de tester la capacité des banques à maintenir leurs ratios de solvabilité au-dessus d’exigences réglementaires minimales dans le cadre d’un scénario adverse, mais néanmoins plausible. Il faut donc bien placer le curseur : la portée d’un test de résistance est tout autant fonction de la robustesse de sa méthodologie que du calibrage de ses hypothèses".

A voir désormais si les banques américaines réussiront cette nouvelle vague de tests. L’année dernière, la très grande majorité d’entre elles s’en étaient tirées. Citigroup, troisième banque des Etats-Unis, les avait toutefois raté, comme trois autres établissements.

Julien Marion et AFP