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Taxes sur l'acier: Trump pose ses conditions à l'UE

Le président américain veut que l'Europe abandonne les "horribles obstacles" et les "droits de douane sur les produits américains" en contrepartie de l'exemption des droits sur l'acier et l'aluminium.

Donald Trump a exigé samedi de l'Union européenne un abaissement des barrières douanières et règlementaires sur les produits américains, si elle veut être exemptée des lourdes taxes qu'il vient d'imposer sur l'acier et l'aluminium importés. Le président américain a lancé cette mise en garde sur Twitter quelques heures après une réunion infructueuse sur le sujet à Bruxelles entre son représentant au commerce Robert Lighthizer et la Commission européenne.

"L'Union européenne, des pays merveilleux qui traitent très mal les Etats-Unis dans le commerce, se plaignent des droits sur l'acier et l'aluminium", a écrit Donald Trump. 

"S'ils abandonnent leurs horribles obstacles et leurs droits de douane sur les produits américains, nous abandonnerons les nôtres. Sinon, nous taxons les voitures etc. Honnête !", a-t-il ajouté.

Plus tard dans la journée, lors d'un rassemblement politique en Pennsylvanie, important producteur d'acier, Donald Trump a défendu sa décision et s'en est pris à la mauvaise qualité, selon lui, de l'acier importé dans son pays.

"Ce n'est pas un bon acier, vous les gars savez ce que je veux dire. C'est de la merde", a-t-il lancé à la foule qui l'a acclamé. Il a aussi assuré que sa décision allait contribuer au développement économique dans la région. "Beaucoup d'aciéries ouvrent maintenant suite à ce que j'ai fait. L'acier est de retour et l'aluminium est de retour", a-t-il ajouté.

Pas d'exemption pour l'Europe et le Japon

Les Européens ont signifié leur déception samedi à Robert Lighthizer, lors d'une rencontre prévue de longue date avec la commissaire au Commerce Cecilia Malmström et le ministre japonais de l'Economie Hiroshige Seko. Le Japon, comme l'Union européenne, exige d'être exempté des taxes américaines.

Le Mexique et le Canada bénéficient d'une dérogation à ces taxes de 25% sur l'acier et 10% sur l'aluminium, et Donald Trump a signalé qu'un traitement de faveur était aussi envisageable pour l'Australie.

"La discussion a été franche" mais "nous n'avons pas obtenu de clarté immédiate sur la procédure pour être exemptés et les discussions vont se poursuivre la semaine prochaine", a annoncé Cecilia Malmström. 

"Nous sommes un allié proche et un partenaire commercial des États-Unis. A ce titre, l'Union européenne doit être exclue des mesures annoncées" par le président Trump, a encore répété Cecilia Malmström.

Les entretiens ont par ailleurs porté sur la coopération entre les trois partenaires pour lutter contre les pratiques de dumping et les problèmes posés par les surcapacités dans la sidérurgie. Les Européens ont fait état de bons résultats sur cette partie de la rencontre et espèrent que leurs efforts seront pris en compte par Donald Trump. Les Européens et les Japonais n'attendaient pas de décision samedi mais ils ont souhaité mettre la pression sur les Américains.

Le président français Emmanuel Macron avait mis en garde vendredi soir son homologue américain contre les conséquences de sa décision.

"De telles mesures visant des pays alliés, qui respectent les règles du commerce mondial, ne seraient pas efficaces pour lutter (contre) les pratiques déloyales", a-t-il affirmé. "L'Europe répondra de manière claire et proportionnée" à "toute pratique infondée et contraire aux règles du commerce mondial", a-t-il averti.

Contre-mesures européennes

L'UE a préparé des contre-mesures si Donald Trump persiste dans son intention de sanctionner ses sidérurgistes.

La plus immédiate, applicable en trois mois, consisterait à taxer lourdement, en guise de rétorsion, certains produits américains emblématiques - dont Bruxelles a établi une liste - comme les jeans, les motos de grosse cylindrée et le beurre de cacahuète.

L'UE envisage également de mettre en oeuvre des mesures dites "de sauvegarde" pour protéger son industrie des importations étrangères d'acier et d'aluminium.

Elle prévoit, enfin, de déposer, le cas échéant, une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), estimant que les mesures prises par les États-Unis, sous couvert de protéger la sécurité nationale, ne servent qu'à avantager leurs entreprises.

L'Europe a exporté en 2017 vers les États-Unis pour 5,3 milliards d'euros d'acier et pour 1,1 milliard d'euros d'aluminium. Les Européens restent pour l'instant unis, mais la Commission européenne redoute les initiatives américaines pour les diviser.

"Nous ne pourrons pas accepter que l'UE soit divisée par l'administration américaine", a averti le vice-président de la Commission Jyrki Katainen, très explicite à l'adresse des Britanniques, en train de négocier leur départ de l'UE. Il a rappelé que "le Royaume-Uni est toujours membre de l'Union européenne et que cela lui impose des obligations".

Les alliés et les rivaux des Etats-Unis ont dénoncé depuis jeudi le net virage protectionniste américain et une attaque contre le libre-échange.

L'Allemagne, un des plus grands pays exportateurs du monde, directement montrée du doigt par Donald Trump, a été particulièrement virulente, dénonçant un "affront" envers les alliés de Washington.

Pour le ministère chinois du Commerce, il s'agit d'un "abus". Et le chef de la diplomatie, Wang Yi, a promis une "réponse appropriée" en cas de guerre commerciale avec Washington.La Chine, de loin le premier producteur mondial d'acier, est régulièrement accusée d'être à l'origine de la surcapacité dans le secteur, en raison de ses subventions massives.

La rédaction avec AFP