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Budget 2018: le coup de pouce de la croissance à Macron

Emmanuel Macron doit tenir pendant deux années au moins un déficit sous les 3%.

Emmanuel Macron doit tenir pendant deux années au moins un déficit sous les 3%. - Dmitar Kilkoff - AFP

La conjoncture française s'améliore progressivement. Une chance pour le gouvernement qui prépare actuellement un premier budget compliqué et qui doit respecter d'importants objectifs de déficit.

Si l'état de grâce présidentiel d'Emmanuel Macron est bel et bien terminé, le président de la République continue en revanche de bénéficier de vents favorables sur la conjoncture économique. Le deuxième trimestre s'est ainsi achevé sur un bon 0,5% de croissance, selon la première estimation de l'Insee, publiée fin juillet. "Clairement on est dans une phase de reprise commune à l'ensemble des pays européens qui est assez logique. Elle a tardé à venir, elle est présente et se consolide", considère Mathieu Plane, économiste à l'OFCE.

"Depuis le dernier trimestre 2016, la croissance française est sur un rythme assez confortable, puisque cela fait trois trimestres qu'elle est égale à 0,5%. Et quand on regarde les bons signaux venant des indicateurs conjoncturels ainsi que les composantes de cette croissance, on se dit que les prochains trimestres devraient rester sur un rythme de croissance proche", confirme Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas.

Cette éclaircie économique est telle que la croissance devrait ainsi être, cette année, la plus forte enregistrée depuis 2011 (l'Insee prévoit pour le moment 1,6%), et devrait rester robuste l'an prochain. Hélène Baudchon table sur 1,7% pour 2018, soit le même chiffre que le gouvernement et le FMI.

L'économie française accélère donc plus vite qu'initialement espéré. D'ailleurs au début de l'année, le précédent exécutif était moins optimiste. Il prévoyait ainsi un "petit" 1,5% pour 2017 comme pour 2018.

Des recettes supplémentaires

Cette croissance plus vigoureuse va donner un important coup de pouce à Bercy qui travaille actuellement d'arrache pied pour boucler dans les clous le premier budget du quinquennat d'Emmanuel Macron. Avec l'objectif ambitieux de réaliser 11 milliards d'euros de baisses des prélèvements en 2018 tout en arrivant à un déficit public de 2,7% du PIB (après 3% en 2017).

"L'effet favorable sur le budget côté recettes est qu'une meilleure conjoncture engendre davantage de cotisations sociales par le biais des emplois créés, ainsi que plus d'impôts directs et indirects. Du côté des dépenses, cela permet de ralentir le rythme de progression de certaines prestations notamment les indemnités chômage, les plus sensibles à la conjoncture", explique ainsi Hélène Baudchon.

Mais comment connaître l'effet d'une croissance plus forte sur la réduction du déficit?

"Il faut regarder l'écart entre ce que l'on appelle la croissance potentielle (la croissance qui correspond à l'utilisation optimale des ressources de l'économie sans générer d'inflation, NDLR) et la croissance réelle. On estime ensuite que la moitié de cet écart correspond alors à la variation de la composante conjoncturelle du déficit. Dans le cas de la France, si notre prévision de croissance de 1,7% pour 2018 se vérifie, avec l'hypothèse d'une croissance potentielle de 1,2%, l'amélioration conjoncturelle du déficit se monterait alors à 0,25 point de PIB", répond Hélène Baudchon.

Un coup de main

Dans ce scénario, ce chiffre de 0,25 point de PIB est quasiment égal à l'effort que le gouvernement compte faire sur le déficit l'an prochain (de 3 à 2,7%). "L'amélioration de la conjoncture pourrait, sous ces hypothèses, presque suffire, si l'on suppose aussi que le gouvernement arrive à équilibrer ses nouvelles dépenses et ses baisses d'impôts avec des économies. Or nous sommes encore dans l'inconnu sur ce point", nuance l'économiste de BNP Paribas.

Mathieu Plane est quasiment sur la même ligne. "Pour être à 2,7% l'an prochain, et à supposer que le gouvernement arrive à 3% de déficit cette année, il faudrait, toutes choses égales par ailleurs, une croissance d'au moins 1,8%. Ce qui n'est pas impossible", abonde-t-il. "On voit donc que l'aspect conjoncturel devrait pas mal aider à réduire le déficit".

Le regard de la Commission européenne

Mais dans ce cas de figure, l'exécutif se présenterait ensuite devant la Commission européenne avec, certes, des efforts à faire valoir, mais sans pour autant avoir amélioré le déficit structurel (le déficit de long terme). Une position qui n'est pas évidente. "C'est compliqué", estime Mathieu Plane.

Dans tous les cas, Emmanuel Macron n'a pas énormément de marge de manœuvre. Actuellement, la France est sous l'étroite surveillance de Bruxelles. Elle se situe dans le "bras correctif" du pacte de stabilité, le dispositif de contrôle des budgets européens par la Commission européenne. Cette procédure oblige un pays à "corriger des déséquilibres graves" sous peine de sanctions financières, et limite donc sa souveraineté budgétaire. Or "pour sortir de cette procédure, il faut être deux années de suite sous les 3% de déficit pour revenir ensuite dans le 'bras dit préventif', rappelle Mathieu Plane. Ce n'est qu'ensuite que le gouvernement français pourra plaider la clémence budgétaire auprès de Bruxelles, en vantant ses efforts menés sur le plan des réformes structurelles (marché du travail, assurance-chômage, etc…).