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Comment le Canada pourrait tripler sa population d'ici la fin du siècle

Le Canada compte actuellement 36 millions d'habitants

Le Canada compte actuellement 36 millions d'habitants - s.yume - Flickr - CC

Un comité chargé de proposer des "initiatives exceptionnelles" au gouvernement canadien suggère de relever "drastiquement" le seuil d'immigration pour permettre à la population canadienne de tripler d'ici 2100. Et donner ainsi un gros coup de fouet à la croissance.

Le Canada est le deuxième pays le plus grand au monde, derrière la Russie, mais il n'est que le 36e État le plus habité de la planète avec 36 millions d'habitants.

D'ici la fin du siècle, les choses pourraient néanmoins radicalement changer. C'est en tout cas l'idée défendue par un comité de 14 experts chargés de donner des conseils "audacieux" au ministre canadien des Finances, Bill Morneau. Dans un rapport baptisé "l'initiative du siècle", il propose ni plus ni moins de tripler la taille de la population du Canada en la portant à 100 millions d'habitants. Et pour y parvenir, il n'y a qu'une solution: recourir massivement à l'immigration.

Un "choc" nécessaire

"Pour dire les choses simplement, la population canadienne n'augmente pas assez vite pour s'assurer que l'économie continuera d'être assez grande pour favoriser l'emploi, l'innovation et l'investissement", résume l'un des membres de "l'initiative du siècle", Thomas Milroy, cadre-dirigeant pour le fonds Generation Capital Management. Car, selon les projections établies par le Conference Board du Canada à la demande de "l'initiative du siècle", la population canadienne devrait atteindre 53 millions d'habitants, si le pays conserve le rythme actuel d'intégration de nouveaux arrivants. Mais surtout le pays continuerait à voir sa population vieillir.

Car, à l'instar de l'Allemagne, la population canadienne vieillit et fait moins d'enfants. Le nombre de Canadiens seniors (plus de 65 ans) va ainsi, dès l'an prochain, dépasser celui des enfants de moins de 14 ans. Ce qui pose d'importants problèmes, que ce soit pour financer les retraites ou pour éviter une envolée des dépenses de santé.

Maîtriser le coût des dépenses de santé et de retraite

"L'initiative du siècle" propose donc de relever progressivement le seuil d'immigration, en le portant de 300.000 à 450.000 personnes par an, d'ici à 2021. Une première étape. Dans leur rapport, ces experts estiment que pour atteindre les 100 millions d'habitants en 2100, il faudrait qu'à cette date le Canada accueille plus d'un million d'immigrés par an contre 273.000 à l'heure actuelle, mais qu'en plus, le taux de fécondité se redresse légèrement, passant de 1,56 enfant par femme à 1,7.

Le Canada parviendrait alors à réduire fortement la part des seniors (moins de 65 ans) dans sa population. Elle passerait à 21,3% au lieu de 28,3% si rien ne change. Par ailleurs, le taux de dépendance, c’est-à-dire le pourcentage de jeunes qui font encore leurs études et de personnes à la retraite par rapport à la population active, chuterait de 10 points. Il y aurait ainsi 100 Canadiens qui travaillent pour 77 Canadiens inactifs, contre 100 pour 87 si la politique migratoire n'évolue pas. Le Canada ferait alors d'importantes économies. La part des dépenses fédérales consacrées aux retraites passerait ainsi de 12% à moins de 10%.

Une croissance plus forte

Par ailleurs, cet afflux massif d'immigrés dynamiserait fortement l'activité et, par ricochet, la croissance, en augmentant la taille du marché intérieur canadien. Les constructions de logements seraient nettement plus nombreuses (432.000 par an en 2100 contre 268.000 dans le scénario sans choc migratoire) et les investissements des entreprises "augmenteraient bien plus fortement pour suivre l'expansion de l'économie", souligne Conference Board du Canada.

Ce dernier estime que, sans choc migratoire, la croissance s'élèverait à 1,7% d'ici à 2030, avant de tomber à 1,6% entre 2050 et 2070, puis 1,55% en 2100. Alors qu'un Canada à 100 millions d'habitants bénéficierait d'une croissance de plus de 1,9% en 2030, de plus de 2,3% en 2050, et d'environ 2,6% à partir de 2070.

Reste à convaincre le gouvernement de Justin Trudeau. Le Premier ministre canadien est certes un libéral convaincu des bienfaits de la mondialisation et de l’ouverture des frontières aux étrangers qui veulent travailler ou étudier dans son pays, mais il sait aussi que les Canadiens pourraient mal réagir si on ouvre grand les vannes. Le ministre canadien de l'immigration, John Mc Callum, a d'ailleurs indiqué qu’il était prêt à augmenter le seuil d'immigration. Mais pas au point de passer, en rythme annuel, à 450.000 migrants d'ici à 2021.