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La France n'est plus le premier partenaire commercial de l'Allemagne

Sur les neuf premiers mois de l'année, l'Allemagne a exporté pour 85 milliards d'euros de marchandises vers les États-Unis contre 77 milliards vers la France. Du jamais vu depuis 1961.

"Une ère est en train de s'achever". Voilà comment Volker Treier, le chef du commerce extérieur de la chambre allemande de commerce et d'industrie, résume la situation.

Cette année, la France ne sera, sauf improbable surprise, plus le premier pays à acheter du "made in Germany". En effet, selon les données de Destatis, sur les neuf premiers mois de l'année, Les exportations allemandes vers la voisine tricolore ont progressé de 2,8% par rapport à la même période de 2014 à 77,3 milliards d'euros.

Pas mal, sauf que les exportations vers les États-Unis ont, sur la même période, bondi de plus de 20%, à 85 milliards d'euros. Du coup la première économie mondiale devient le premier marché de l'Allemagne. 

Les exportations de l'Allemagne vers la France et les États-Unis

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Et il y a fort à parier que l'Hexagone ne rattrapera pas un retard de 8 milliards d'euros (soit un bon mois d'exportations) sur le dernier trimestre de l'année. "Les États-Unis ont clairement dépassé la France", résume Johannes Gareis, économiste de Natixis basé à Francfort.

Ce qui, selon le Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) sera une première depuis 1961, soit 54 ans! "L'arrivée des États-Unis au sommet ne doit rien au hasard. Ils vont s'y établir pour longtemps. Et c'est aussi une forme de reconnaissance pour la force de nos exportations, de voir un pays si éloigné devenir le numéro un", assure au FAZ, Volker Treier.

En fait les États-Unis devraient aussi devenir le premier partenaire commercial de l'Allemagne. Si on ajoute les importations, ils ont en effet échangé avec notre voisin germanique 129,3 milliards d'euros de biens sur les neufs premiers mois de l'année contre 126,9 milliards d'euros pour la France. 

"Une lettre de remerciement à Mario Draghi"

Il n'y a pas vraiment besoin de chercher très loin les raisons de cette tendance. "Évidemment le taux de change joue à plein. L'euro a perdu beaucoup de sa valeur face au dollar depuis janvier (-9,5% ndlr) tout comme face aux principales devises des partenaires allemands traditionnels, ce qui donne un avantage-prix aux biens allemands qui s'exportent plus facilement dans les pays qui n'utilisent pas l'euro", explique Johannes Gareis.

"Dans le même temps, les salaires en Allemagne ont augmenté plus que par le passé, ce qui fait que les biens allemands ont perdu de la compétitivité au sein même de la zone euro", poursuit-il. Autrement dit, les biens allemands ont un avantage prix aux États-Unis qu'ils n'ont pas en France ou dans tout autre pays de la zone euro.

"Je pense que l'Allemagne peut en fait écrire une lettre de remerciement au président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi", s'amuse Johannes Gareis, en référence à l'assouplissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, qui a eu pour effet de faire plonger la monnaie unique face au dollar.

Le taux de change ne fait pas tout. Car si les biens sont moins chers, encore faut-il que la demande suive. Et justement, "l'économie américaine est plus robuste, et la demande pour les produits allemands est solide", fait valoir Johannes Gareis. Selon le FMI, la croissance du pays de l'Oncle Sam devrait progresser de 2,6% cette année et 2,8% l'année prochaine. Soit bien plus que l'Hexagone où le gouvernement table sur 1% puis 1,5%.