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Les gagnants et les perdants du virage fiscal de Hollande en 2014

Le nombre de ménages perdant dépasse les 19 millions.

Le nombre de ménages perdant dépasse les 19 millions. - Miguel Medina - AFP

L'ensemble des mesures fiscales et sociales entrées en vigueur l'an passé ont profité à 4,8 millions de ménages tandis que 19 millions de foyers fiscaux ont vu leur contribution grossir, selon une étude de l'Insee et de la Drees, publiée ce mercredi. Au final: elles auront également réduit les inégalités. Explications.

2014 a été l'année du virage fiscal. C'est à partir de cette dernière année que l'exécutif a décidé d'amorcer "la pause" de François Hollande et a ainsi pleinement pris conscience du "ras-le bol fiscal" des Français.

2014 a ainsi à la fois été la dernière année où le gouvernement a pris des mesures pour alourdir l'impôt sur le revenu; et la première où il a commencé à l'alléger, avec des réductions pour les ménages modestes entrées en vigueur à l'automne.

Du coup quel est le bilan pour l'ensemble des mesures prises en 2014? L'Insee et la Drees apportent la réponse dans le portrait social de la France publié ce mercredi 4 novembre. Les deux instituts se sont intéressés à toutes les mesures entrées en vigueur en 2014 et portant sur les impôts directs, les cotisations et les prestations sociales. Ils ont ainsi calculé leur impact sur le niveau de vie (voir définition en encadré) des Français.

Au total, les décisions du gouvernement ont fait 19,2 millions de ménages perdants contre seulement 4,8 millions des ménages gagnants. Et globalement, ces mesures ont fait reculer le niveau de vie moyen des Français de 0,5%, amputant leurs revenus (salaires et allocations) de 220 euros sur l'année.

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Sauf que ces chiffres restent des moyennes qui ne disent évidemment pas tout. Car comme le soulignent les auteurs de l'étude, l'ensemble de ces mesures n'a pas eu le même effet sur tous les Français. Concrètement, seule la moitié la plus riche a senti un effet net sur son portefeuille, c'est-à-dire 100 euros au moins par an.

Et plus ces ménages appartiennent à une catégorie aisée, plus l'impact a été fort. Ainsi les 10% des Français les plus riches ont payé le tribut le plus lourd avec une perte de plus de 500 euros.

A l'inverse, les 10% les plus modestes ont été épargnés et ont même vu leur revenus légèrement progresser, grâce à la revalorisation des minimas sociaux (RSA, minimum vieillesse, allocation de soutien familial).

Recul des inégalités

Au final, l'Insee note que l'ensemble des décisions prises par l'exécutif a permis de réduire, les inégalités. "Le rapport entre les niveaux de vie des 10% les plus riches et des 10% les plus modestes aurait été de 6,40 sans elle", expliquent les auteurs de l'étude. En tenant compte de leur effet, il passe à 6,32", expliquent-ils. Autres indicateur: l'indice de Gini, qui mesure les inégalités sur l'ensemble de la population, est lui passé de 28,9% à 28,7%. "Cette évolution n'est pas négligeable: elle est du même ordre de grandeur que l'accroissement annuel moyen de cet indice sur la période 2004-2012 (+0,2 point)", écrit l'Insee.

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La réduction de ces inégalités tient surtout aux mesures fiscales. "Cette diminution est pour les trois-quarts imputable aux réformes qui ont eu lieu sur l'impôt sur le revenu", précise ainsi Marie-Cécile Cazenave, de la Drees.

Et la mesure qui a le plus d'effet reste la baisse du bénéfice fiscal lié au quotient familial. Le gouvernement a en effet rogné dans cette niche, qui permet de réduire l'impôt sur le revenu des familles en fonction du nombre d'enfant. A elle seule, cette décision a contribué pour un tiers dans la réduction globale des inégalités. Les 1,5 million de ménages perdants appartiennent en effet aux "familles payant un impôt élevé", explique l'Insee. Ceux-ci ont, en moyenne, perdu 820 euros sur l'année.

A l'inverse la baisse exceptionnelle d'impôt sur le revenu accordée aux ménages les plus modestes a profité à 2,9 millions de personnes, avec un effet positif de 480 euros. C'est la deuxième mesure qui a le plus contribué à la réduction des inégalités (30%). 

Neutralisation

Cette mesure n'a toutefois permis d'augmenter les revenus des ménages concernés, mais a en fait neutralisé l'impact d'autres dispositions sur les prélèvements. Car début 2014, même les ménages les plus modestes ont dû faire face à des décisions qui concernaient énormément de contribuables.

D'abord la hausse du taux de cotisation pour la retraite a touché tout simplement tous les actifs cotisants (17,7 millions de ménages) amputant leurs revenus de 140 euros par an. Ensuite, l'intégration dans l'impôt sur le revenu de la participation de l'employeur aux mutuelles santé d'entreprise, a impacté beaucoup des salariés travaillant dans le privé. Soit 7,6 millions de ménages pour une perte moyenne de 130 euros par an.

Enfin, en 2014, le gouvernement a mis fin à un avantage fiscal dont bénéficiaient les retraités ayant élevé 3 enfants ou plus. La majoration de pensions qui leur est versée est devenue imposable. Ce qui a concerné 3,98 millions de personnes qui ont perdu presque 400 euros.

Le niveau de vie

L'Insee détermine le niveau de vie de la façon suivante. Il calcule d'abord les revenus d'un ménage c'est-à-dire les salaires, pensions, prestations sociales ou revenus tirés du patrimoine, en y retranchant les impôts. Une fois ceci fait, il divise ses revenus par le nombre de personnes composant le foyer, en retenant les unités de consommation (UC). Le premier adulte d'un ménage vaut 1 UC, les autres valent 0,5 UC. Les enfants de moins de 14 ans valent 0,3 UC.

Exemple: un couple avec deux enfants a 52.000 euros de revenus. Les unités de consommation totales sont au nombre de 2,1. Son niveau de vie est donc de 24.760 euros.