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Quand le FMI dénonce une erreur cruciale de Piketty

Une étude menée par l'économiste du FMI Carlos Goes remet en cause l'une des principales hypothèses formulées par l'auteur du Capital au XXIe siècle.

Thomas Piketty a l'habitude d'avoir maille à partir avec ses confrères économistes. Et cette fois encore, l'auteur du Capital au XXIe siècle est pris pour cible. Dans une étude publiée il y a cinq jours et repérée par Bloomberg, l'économiste du FMI Carlos Goes explique avoir voulu vérifier l'une des principales conclusions du best-seller de Thomas Piketty, lui permettant en grande partie de justifier l'accroissement des inégalités passées et à venir.

Pour faire extrêmement simple l'ouvrage de l'économiste français repose surtout sur une idée fondamentale: l'accroissement des inégalités est dû au fait que la rémunération du capital (les dividendes) augmente plus vite que la croissance.

Ainsi, selon l'économiste français, plus la différence entre la rémunération du capital et le taux de croissance s'accroît, plus la part du capital dans le revenu national augmente. Or, comme le capital est bien plus inégalement réparti que les salaires, ce phénomène conduirait, in fine, à accroître les inégalités. 

Dans 75% des cas, la théorie ne se vérifie pas

Carlos Goes a voulu vérifier ce postulat, qu'il considérait comme plausible "a priori". Il a ainsi regardé dans 19 pays développés si la part du capital dans l'économie augmente effectivement lorsque la différence entre le capital et le taux de croissance se creuse.

Résultat: dans 75% des cas, la théorie de Piketty ne se vérifie pas. "Je n'ai trouvé aucune évidence empirique montrant que la dynamique va dans le sens que suggère" l'économiste français, conclut Carlos Goes.

Selon ce dernier, Thomas Piketty se serait trompé sur une donnée importante: le taux d'épargne. Piketty suppose qu'il est relativement stable dans le temps là où Carlos Goes considère au contraire que ce taux évolue significativement. Et ce sont ces variations du taux d'épargne qui feraient que la théorie de Piketty ne se vérifie pas.

Ce n'est pas la première fois que Thomas Piketty voit sa théorie être contestée. D'ailleurs Carloes Goes estime que ses travaux crédibilisent une précédente étude de 2015, dans laquelle deux économistes, Per Kussell et Anthony A. Smith, considéraient que Piketty s'était trompé sur le taux d'épargne.

En mai 2014, le Financial Times avait lui pointé des erreurs des calculs dans Le Capital au XXIe siècle, ce qui avait passablement irrité son auteur. Le "FT" avait ensuite enterré la hache de guerre en décernant à Piketty, quelques mois plus tard, le prix du meilleur ouvrage économique de l'année. En septembre dernier, les économistes de Morgan Stanley avaient, eux, carrément affirmé que la théorie de Piketty "appartenait au passé".

J.M.