Bouge!
"Confrontation" avec Angela Merkel? Quand la menace impuissante tient lieu de politique
Mais de quoi parle-t-on ? Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire d’austérité ? Quelle austérité ? Où ça l’austérité ? Les salaires en France n’ont cessé d’augmenter depuis le début de la crise, les dépenses publiques ne cessent d’augmenter, de quoi parle-t-on ? Au moment où j’écris, on est en train de discuter avec les sociétés d’autoroutes pour allonger leurs concessions en échange d’un plan d’investissement qu’elles financeraient, elles. Négligeable, je vous rassure, on allonge un peu, elles investissent ce qu’elles peuvent, et on avance, comme un vieux traverse le boulevard, cahin-caha, pas à pas, les chaussons rasent le bitume en faisant mine d’ignorer le danger de mort, tout autour.
Voilà notre action politique. Il ne se passe rien, absolument rien, que de s’assurer que l’on va pouvoir, encore demain, aller chercher le pain à la boulangerie du quartier. L’Italie a retrouvé un solde extérieur positif (elle n’est plus en déficit commercial), l’Espagne a gagné 10 points de compétitivité sur 2 an. Et nous ? On compte les chômeurs, ouf, l'Espagne en a encore plus que nous. Ça n’est pas une question d’austérité, de relance, de mots que l’on jette par les fenêtres et qui tiennent lieu de politique, c’est une question d’ambition.
Comprenez bien que toutes les théories économiques ont volé en éclat. Nous sommes en terre inconnue, nous, les américains, les anglais, les japonais, les allemands, tout le monde. Nulle part, jamais, le scénario de ce que nous traversons n’a été écrit, pensé, modélisé. La planète est traversée de milliards de milliards émis à gros bouillons par les banques centrales, personne ne sait quelle valeur aura cet argent dans 5 ans.
Les japonais, par exemple, veulent désespérément créer un effet d’inflation pour inciter les consommateurs à prendre des risques, il faudrait pour cela que les grandes entreprises suivent, il faudrait une impulsion par les salaires. Mais pour suivre, les entreprises doivent trouver un peu de visibilité, or c’est le brouillard, total, à commencer par l’état réel de la croissance chinoise, mystère ultime. Ils auraient pu attendre encore, après tout la boulangerie n'est pas si loin, ils ont choisi le grand saut, nous les regardons voler.
Et de même l’Amérique a choisi un cap, l’Angleterre a choisi un cap, l’Allemagne a choisi un cap. Le bon, le mauvais, je n’en sais rien. Plus personne n’en sait rien.
François Hollande n’a rien choisi. Rien d’autre que de passer des semaines à défaire ce qu’il a fait. Mais là même, il n’y va qu’avec le bout des doigts : plus d’impôts nouveaux… mais quand même, la taxe à 75%, quelques points retraites, un petit coup sur les allocs. Tout pour les entreprises et l’investissement… mais quand même, on mijote une petite loi sur la « cession obligatoire des sites rentables », on met la banque publique d’investissement sous contrôle politique etc… la politique est celle de l’équilibre, le mot pudique que l’on a trouvé pour ne pas dire « l’attente », en fait, le vide.
Partout autour de nous, les dirigeants des grands pays se sont saisis d’enjeux qui les dépassent. Et nous, de quoi parle-t-on ?