« L’introduction en Bourse, un levier de croissance et une nouvelle vie pour l’entreprise »
Jean-Pierre Valensi, Associé KPMG
Qu’elle soit mature ou de croissance, PME ou ETI, start-up ou scale-up, l’entreprise peut viser l’introduction en Bourse pour accélérer sa croissance. Le chemin est long, mais la destination en vaut la peine. Au dirigeant de fixer les objectifs, de raconter la bonne histoire et surtout de s’entourer des bonnes compétences.
Mais pourquoi tant désirer accéder à l’univers boursier. Un rêve ? Une lubie ? Un effet de mode ? Pour un dirigeant qui a les pieds sur terre, rien de cela. L’introduction en Bourse est une affaire réfléchie, qui peut paraître a priori longue, technique, coûteuse… et capable de rebuter les volontés. « Les raisons majeures d’une introduction en Bourse, résume Jean-Pierre Valensi, c’est la recherche de liquidités par les investisseurs historiques et le financement du développement de l’entreprise. Il s’agit donc d’un évènement important et porteur d’avenir. » Face à eux, les investisseurs en Bourse, amateurs de belles histoires de croissance.
La transparence rassure les investisseurs
Une entrée sur les marchés boursiers peut accompagner un développement, donc une rentabilité. Elle ouvre des portes, donc de l’activité potentielle. Un levier de croissance à l’évidence. Exemple symptomatique, l’entrée sur Euronext du fabricant français de serveurs informatiques 2CRSI. 38 M€ levés, une grande visibilité et une transparence rassurante qui lui permet de se porter candidate sur des marchés exclusifs. En l’occurrence les organismes publics américains. Ou encore Wallix, éditrice de logiciels de sécurité informatique. Introduite sur Euronext Growth en 2015, elle a récemment levé 35 M€ (en actions) pour son développement lié aux enjeux de la cyber criminalité.
Des levées de fonds maîtrisées
Les sociétés qui se sont introduites au premier semestre 2018 telles que Cogelec, spécialisée dans les systèmes de contrôle d’accès pour les immeubles collectifs, Don’t Not, dans l’édition de jeux video, Kalray dans les processeurs, Oxatis dans les solutions de e-commerce pour les PME, ou Vente Unique, plateforme de commerce en ligne de meubles et objets décoratifs, ont toutes levé des fonds pour accompagner leur croissance, pour la grande majorité sans cession des actionnaires historiques qui restent donc au capital.
Mieux vaut ne pas se lancer seul
« L’introduction en Bourse implique des fondamentaux sains, un projet crédible, une volonté partagée au sein de l’entreprise, et c’est le début d’une nouvelle vie pour l’entreprise », raconte Jean-Pierre Valensi. Le projet est structurant pour l’entreprise, parce qu’il en appelle aux meilleures pratiques de gouvernance, de gestion des risques, de contrôle interne, de fiabilité des informations financières. Cependant, la stratégie du dirigeant gagne à être adossée à des conseils extérieurs pour mieux communiquer vers les investisseurs boursiers. « Au travers des analyses de marché menées par les équipes de KPMG, nous voyons naître de nouvelles ambitions », dit Jean-Pierre Valensi. De même, face à un ensemble d’actions à mener de front, « le risque pour le dirigeant s’il ne s’entoure pas, c’est d’être totalement accaparé par l’introduction en bourse et de ne plus se dédier au quotidien de l’entreprise, ce qui risque de créer un trou d’air néfaste. »
Un accompagnement en amont
En amont, la stratégie consiste à envisager tous les scénarios de financement pour une décision éclairée. Un à deux ans pour se mettre dans le bain ! Dans cette optique, KPMG participe à Family Share en partenariat avec Euronext, un programme dédié à l’accompagnement vers les marchés financiers des entreprises familiales ; elle a aussi lancé le programme Tech Pulse 40 pour identifier les 40 start-up à plus haut potentiel de financement boursier. « Par ce biais, nous leur apportons une pré-connaissance des sujets. Les cinq premières du classement bénéficieront d’un coaching gratuit et d’un diagnostic de maturité à l’introduction en bourse. Les chefs d’entreprise et le top management se projettent ainsi sur le marché, savent anticiper les attentes des analystes financiers et des investisseurs. » Suivront les quatre à six mois intenses de préparation, avant le grand bain.
Quant aux banques…
La confiance générée par l’introduction en Bourse facilite-t-elle le recours à l’emprunt ?
« Oui, du fait d’une meilleure transparence de l’information financière et du renforcement des fonds propres qui augmentent la capacité d’endettement. »
Les banquiers d’affaires proposent-ils les bonnes affaires aux sociétés cotées plutôt qu’aux autres ?
« C’est vrai pour les fusions acquisitions. C’est l’un des effets positifs de la visibilité générée par la cotation. »
Le cas particulier de la Tech
Scale-up et start-up de la Tech ne sont pas toujours rentables. Mais gourmandes en financement, elles peuvent tenter l’aventure boursière. Jean-Pierre Valensi explique : « Peu importe que l’entreprise soit ou non déjà rentable. C’est un pari réfléchi et les investisseurs boursiers sont très rigoureux. Dans ces sociétés de croissance, ils recherchent le potentiel de marché, ils perçoivent la capacité de l’entreprise à convertir ce marché grâce à ses compétences, à ses technologies, à sa R&D. La biotech est typiquement dans ce schéma. »
Une histoire à construire
Les effets positifs de l’introduction en Bourse sont donc multiples. Et ses enjeux réels. Si elle facilite le recrutement des talents, la vive concurrence, dans la Tech notamment, ne garantit pas d’attirer les meilleurs. Par ailleurs, pour les sociétés familiales, l’ouverture du capital induit une dilution qui ne doit pas mettre en danger les investisseurs historiques. Quant à la tentation pour un dirigeant et sa famille de céder une partie de leurs parts : « Trop en céder peut bloquer une opération. L’entreprise doit garder un actionnariat de référence. La confiance des investisseurs n’est pas facile à acquérir et l’histoire doit être simple à raconter pour convaincre les investisseurs boursiers en 30mn chrono. »